Comment la mairie de Montfermeil décourage les nouveaux électeurs

S’inscrire sur les listes électorales pour voter aux élections municipales de cette commune de Seine-Saint-Denis relève du parcours du combattant et en décourage plus d’un.

Agathe Mercante  • 24 janvier 2020
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Comment la mairie de Montfermeil décourage les nouveaux électeurs
© Photo : FRANCK FIFE / AFP

En France, les démarches administratives sont rarement des parties de plaisir. Que l’on soit, comme l’éphémère secrétaire d’Etat au Commerce extérieur, Thomas Thevenoud, frappé de « phobie administrative » – surtout quand il s’agissait de déclarer ses revenus – ou non, il faut souvent s’armer d’un peu de paperasse et de beaucoup de courage pour parvenir rapidement à ses fins. À l’approche des élections municipales, qui auront lieu les 15 et 22 mars 2020, il est encore possible de s’inscrire sur les listes électorales, la dead-line étant fixée au 7 février. Mais selon où l’on vit, il faut faire preuve de ténacité. À Montfermeil, en Seine-Saint-Denis, par exemple. Selon plusieurs témoignages et un article paru dans Le Parisien, s’inscrire relève du parcours du combattant. « Ça fait trois fois qu’on va à la mairie ! », déplorait, sur le groupe Facebook des habitants, une administrée visiblement excédée.

Pourtant, à en croire le site internet Service-public.fr, la procédure devrait être simple : il suffit de se présenter en mairie avec un justificatif d’identité, un justificatif de domicile, un formulaire – téléchargeable ici – dûment rempli et le tour est joué ! Mais pas à Montfermeil. Dossiers « en attente de pièces complémentaires », demandes d’autres papiers plus difficiles à se procurer si l’on est un nouveau résident (taxe d’habitation) et autres requêtes farfelues attendent les administrés.

Manœuvre politique ?

« Dans les autres villes de Seine-Saint-Denis les habitants ne rencontrent pas ces problèmes », explique Jean-Riad Kechaou, candidat sur la liste de rassemblement de la gauche, d’écologistes et de citoyens « Montfermeil autrement ». Dans un communiqué de presse, ils dénoncent :

« L’inscription sur la liste électorale à Montfermeil relève du parcours du combattant plus que de la citoyenneté. Car la pièce d’identité et le justificatif de domicile exigés par la loi ne suffisent pas dans notre commune ! Taxe d’habitation ou foncière, bail de location ou titre de propriété, avis d’imposition, la liste est longue des pièces qui peuvent être demandées : de multiples obstructions qui découragent plus d’un habitant : « J’ai dû abandonner, trop compliqué » nous disent certains ».

Si elle reconnaît des « lenteurs », la municipalité se défend de toute obstruction. « L’industrie du faux étant ce qu’elle est en Seine-Saint-Denis, les mairies reçoivent la consigne de faire attention aux inscriptions fantaisistes », justifiait au Parisien le maire (Parti chrétien démocrate) de la ville, Xavier Lemoine, favorable à un rapprochement de la droite et du RN. Pas d’obstruction, donc, mais une certaine mauvaise volonté. À titre d’exemple, il est impossible, sur le site internet de la mairie de Montfermeil, de trouver des informations relatives à l’inscription sur les listes électorales pour les élections municipales…

Une manipulation « par omission » d’autant plus plausible qu’en la matière, Xavier Lemoine n’en est pas à son coup d’essai. En 2014, déjà, l’opposition accusait l’édile de « manoeuvres machiavéliques » pour assurer sa réélection. Comme le raconte l’Obs, dans le quartier populaire des Bosquets (où a été tourné le film Les Misérables, de Ladj Ly), la municipalité avait envoyé des courrier informant les habitants de leur radiation des listes à des adresses situées dans des HLM… qui n’existaient plus ! Et Politis de reprendre l’adage du film La Cité de la peur : « On peut tromper une personne mille fois. On peut tromper mille personne une fois. Mais on ne peut pas tromper mille personnes, mille fois ». C’est désormais aux Montfermeilloi.ses de le démontrer.

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