Souvent Finkie varie

Dans le même temps qu’il milite ainsi pour la pudeur des collégien·nes, l’essayiste donne son avis sur l’« affaire Polanski ».

Sébastien Fontenelle  • 15 janvier 2020 abonnés
Souvent Finkie varie
© LEONARDO CENDAMO / Leemage / AFP

L’essayiste Alain Finkielkraut, que la presse et les médias mainstream tiennent pour un commentateur de valeur (1), se montre tout à fait catégorique (et parfois même un peu rigide) quand il évoque certains sujets, comme l’immigration, ou l’islam, ou les migrant·es, ou les musulman·es. Mais il arrive aussi que ce personnage, lorsqu’il traite d’autres thématiques, soit moins ferme dans ses avis. (Et que certaines fois, même : ses retournements donnent le tournis.)

Au mois d’octobre 2009, par exemple : il s’emporte, dans l’hebdomadaire Marianne, contre « certains enseignants » qui ont, affirme-t-il, trop oublié que seul « l’enfant qui a le sens de la pudeur écoute ce qu’on lui dit ». « Cette intériorisation du regard des adultes a de moins en moins cours », à cause de ces mauvais profs, assure-t-il. Et de produire, au soutien de cette rigoureuse démonstration, cette preuve qui ne l’est pas moins (2) : « La présence et l’utilisation des portables dans les salles de classe en font foi. »

Mais dans le même temps qu’il milite ainsi pour la nécessaire revalorisation de la pudeur des collégien·nes, l’essayiste donne également (3) son avis sur l’« affaire Polanski » – du nom du réalisateur poursuivi pour viol sur mineure par la justice américaine. Et là, surprise : Finkielkraut soutient que « la plaignante », à 13 ans (et à la différence, donc, des collégien·nes d’ici), « n’était » selon lui « pas une enfant ». De sorte que l’aimable cinéaste contre qui se déchaîne une « fureur de la persécution » n’est « pas pédophile ».

Puis, quelques années passent, au terme desquelles, de nouveau, l’essayiste se ravise et fait en septembre 2019 (4) cette déclaration : « Je trouve lamentable que des adultes s’inclinent aujourd’hui devant Greta Thunberg. Je crois que l’écologie mérite mieux, et il est clair qu’une enfant de 16 ans, quel que soit le symptôme dont elle souffre, est évidemment malléable et influençable. » Pour lui, donc : l’enfance, dont il assurait dix ans plus tôt, pour mieux secourir Polanski, qu’elle finissait avant 13 ans, dure finalement jusqu’à 16 ans. De sorte que ce ne sont plus seulement les collégien·nes, mais également les lycéen·nes, qui doivent désormais, de son point de vue, être regardé·es comme des enfants.

Est-ce son ultime volte-face ? Va-t-il se tenir à cet avis ? Rester ferme dans cette conviction ? Que nenni ! Le 7 janvier 2020, Finkielkraut se ravise encore et parle pour Matzneff, qui a notamment abusé d’une enfant de 14 ans, exactement comme il avait dix ans plus tôt plaidé pour Polanski : « Le cas Vanessa Springora n’est pas un cas de pédophilie. Une adolescente et un enfant, ce n’est pas la même chose. Ça n’a rien à voir avec la pédophilie. »

Mais pourquoi se gênerait-il, puisque jamais – au grand jamais – la presse et les médias n’envisagent pour ce qu’elles sont ses obscènes acrobaties ?

(1) Le Monde, notamment, aime lui construire des tribunes.

(2) Ne ris pas, s’il te plaît.

(3) Sur France Inter.

(4) Sur France Inter encore.

Publié dans
De bonne humeur

Sébastien Fontenelle est un garçon plein d’entrain, adepte de la nuance et du compromis. Enfin ça, c’est les jours pairs.

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