Tropicalia : Cette serre qui ne sert à rien

Les opposants au projet Tropicalia, sur la Côte d’Opale, peinent à se faire entendre.

Vanina Delmas  • 22 janvier 2020 abonné·es
Tropicalia : Cette serre qui ne sert à rien
©Une simulation de Tropicalia, serre géante chauffée à 28 °C en plein Pas-de-Calais. OCTAV TIRZIU ATELIER

Tropicalia. 50 degrés nord sous les tropiques. Pour tous. Toute l’année. » Une communication invitant à l’évasion et à l’exotisme vante les mérites de la future « plus grande serre tropicale du monde », qui verra le jour… dans le Pas-de-Calais ! Sur 20 000 m2 de la ZAC du Champ-Gretz (à cheval sur les communes de Rang-du-Fliers et de Verton), un dôme de 35 mètres de haut et chauffé à 28 °C accueillera arbres géants, papillons, poissons d’Amazonie, reptiles, oiseaux…

Le cabinet Coldefy et associés, architectes urbanistes, et les porteurs du projet, Cédric Guérin et Nicolas Fourcroy, mettent en avant le rayonnement mondial et le développement économique local appuyé sur le tourisme : 500 0000 visites par an sont attendues. « Ce projet à plus de 50 millions d’euros est déconnecté de la réalité locale. Il n’est en harmonie ni avec notre patrimoine naturel ni avec notre conception du lien entre les humains et la nature. C’est du hors-sol ! » dénonce Mariette Vanbrugghe, présidente du Groupement de défense de l’environnement de l’arrondissement de Montreuil et du Pas-de-Calais (GDEAM 62).

Les opposant·es souhaitent informer sur les problèmes de circulation qui surviendront quand le lieu sera ouvert, la quantité d’eau nécessaire pour la serre ou encore la fragilité du sous-sol de la Côte d’Opale, connu pour ses nombreuses galeries et cavités. Et sur la captivité d’animaux. « C’est un zoo dans de la végétation, et les citoyens sont de plus en plus sensibilisés au bien-être animal », indique Mariette Vanbrugghe.

Le GDEAM 62, avec ses 350 adhérents, développe son engagement écologique depuis 1972 mais avoue des difficultés à mobiliser, cette fois, face à la force de frappe du porteur de projet. Dernière innovation marketing : vingt ambassadeurs bénévoles locaux chargés de diffuser la bonne parole dans leurs réseaux. « Tout s’est fait très vite ! Le temps qu’on se réunisse et qu’on adopte un mode d’action, le permis de construire avait été adopté », résume Marc Éverard, directeur du GDEAM 62, qui veut faire entendre un point de vue alternatif aux dizaines d’articles parus dans la presse locale. Avec le soutien de Notre affaire à tous, 26 associations ont déposé un recours gracieux le 19 décembre pour s’y opposer, avant de saisir éventuellement le tribunal administratif. Si les travaux débutent au printemps prochain comme prévu, la serre tropicale ouvrira en 2022…

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