Covid-19 : Les postiers se retirent

Face au manque de sécurité dans les bureaux de Poste et centres de tri, une partie des postiers refuse de reprendre le travail.

Nadia Sweeny  • 19 mars 2020
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Covid-19 : Les postiers se retirent
© Photo : JOEL SAGET / AFP

Dans les Hauts-de-Seine, entre 350 et 400 postières et postiers font valoir leur droit de retrait, ce jeudi 19 mars. « La mobilisation est très importante sur Asnières, Levallois, Clichy, Gennevilliers : mêmes les intérimaires sont en retrait, c’est dire ! », lance Xavier Chiarelli, syndicaliste chez SUD PTT92. D’autres ont fait de même à Marseille, en Isère, à Paris, en Gironde ou encore en Normandie… En cause : les conditions de travail jugées dangereuses face à la pandémie de Covid-19. Une crainte amplifiée par l’apparition de plusieurs cas avérés ou suspectés dans les bureaux de postes et de tri du territoire : notamment au super-centre de tri de Bois-d’Arcy qui alimente tous les centres de distribution des Hauts-de-Seine, des Yvelines et de l’Eure-et-Loir (28), ou dans les centres de Neuilly et de la Garenne Colombes. En Gironde, plusieurs bureaux ont été évacués et le reste du personnel placé en maintien à domicile. D’après les syndicats, les postes de travail des personnes infectées n’ont été ni nettoyés, ni désinfectés.

Interdiction du port de masque

Dans cette tourmente, la direction qui insiste sur le maintien du « service public de la Poste », semble multiplier les couacs. D’après plusieurs syndicalistes, en Gironde, Dordogne, Lot-et-Garonne, le port du masque chirurgical est interdit aux salariés à l’intérieur des sites, car « trop anxiogène ». Une directive contredite par une autre, à quelques kilomètres. D’autant que, malgré les communications des dirigeants faisant état de l’inutilité dudit masque, les agents sont obligés de les mettre lors de leurs visites aux personnes âgées, dans le cadre du service payant « veiller sur mes parents ».

« On ne comprend rien ! Et puis malgré les nombreux cas dans nos bureaux de postes et de tri, on continue d’aller voir les personnes âgées : c’est criminel ! », lance Willy Dhellemmes, représentant du personnel au CHSCT et représentant syndical SUD PTT Gironde. À Bordeaux Mériadeck, les flacons de gel hydroalcoolique ont aussi été retirés : la bonne centaine d’agents présents est tenue de se laver les mains au lavabo des WC… à l’autre bout du bâtiment. À Nanterre, le gel hydroalcoolique est mis dans des bouteilles de jus d’orange. « On n’a pas d’essuie mains à usage unique, les éléments de sécurité arrivent au compte-goutte dans les endroits où le rapport de force avec la direction est le plus fort : là où les salariés font valoir leur droit de retrait, affirme Xavier Chiarelli, de Sud PTT 92. On doit se défendre pour obtenir gain de cause. »

Dans un courrier envoyé aux postiers du Calvados, le groupe estime pourtant avoir « mis en œuvre l’ensemble des mesures recommandées » et que, par conséquent le « droit de retrait n’est pas justifié ». Même si, seul un juge peut réellement définir si le droit de retrait est justifié ou non, là encore, la réaction diffère avec celle dans les Hauts-de-Seine où la direction a reconnu la légitimité du droit de retrait des factrices et facteurs lundi et mardi à Asnières, Levallois, Clichy, Villeneuve-La-Garenne, Gennevilliers… « mais elle ne le reconnaît plus aujourd’hui, alors que rien n’a changé ! s’agaceXavier Chiarelli. Ils nous cachent des cas : vendredi, un collègue a eu des symptômes, ils ne l’ont pas renvoyé tout de suite disant que l’ARS estimait qu’il n’y avait aucun problème, on a appris que sa fille était avérée, on a été voir le document de l’ARS qui en fait, estimait qu’il était « à risque ». Notre direction nous ment pour qu’on aille bosser ! »

Le ministre de l’Économie et des finances peut bien « rendre hommage aux salariés, aux postiers » à la sortie du conseil des ministres (mercredi 18 mars), clamer que « nous avons besoin d’eux », notamment « pour maintenir la sécurité économique du pays », et insister sur la « nécessité de leur offrir une sécurité optimale ». Sur le terrain, c’est encore loin d’être le cas.

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