Des responsables de La Poste à Lisieux mis en demeure par l’inspection du travail
Il leur est reproché de n’avoir pas pris de mesures adéquates pour protéger leurs salarié·és du Covid-19. Des syndicalistes avaient déjà alerté leur direction en mars sur les risques encourus.
Carton rouge pour La Poste à Lisieux, dans le Calvados. Après les salarié·es et syndicats, c’est le ministère du Travail qui a assené un coup aux responsables de la plateforme de distribution, en considérant que leurs obligations de protéger et de mettre en sécurité les agents n’étaient pas remplies. Mardi 14 avril, après une visite de l’inspection du travail, la direction du centre de tri a en effet reçu une mise en demeure de la part de la Direccte, lui demandant expressément d’appliquer une série de mesures pour mieux protéger les agents du risque sanitaire.
« C’est une très bonne nouvelle », se réjouit Christophe Musslé, secrétaire du CHSCT de La Poste de Lisieux et militant CGT. Avec un collègue salarié de la plateforme de distribution, le syndicaliste avait déjà alerté sa hiérarchie le 12 mars concernant le danger grave et imminent que couraient les agents du centre de tri face à l’épidémie et à l’insuffisance des mesures prises par la direction.
On nous faisait travailler dans des conditions dangereuses pour notre santé et notre sécurité. Jusqu’à la semaine dernière, nous n’avions pas de masques. Aujourd’hui, ils sont entreposés dans un local fermé à clé, il faut demander à notre hiérarchie pour y avoir accès. Nous avions très peu de gel, et celui que nous avions était coupé à l’eau. Nous n’avions et n’avons toujours pas de gants.
Des conditions inacceptables dans une plateforme regroupant au total 60 salariés, considère le syndicaliste, qui peine à masquer ses craintes. « Chaque jour, des collègues présentent des symptômes. Ce n’est peut-être pas systématiquement le Covid, mais on s’inquiète grandement. »
Leurs appréhensions ont été corroborées par la visite d’un inspecteur du travail la semaine dernière, le 9 avril. Celui-ci a constaté que les mesures de distanciation sociale, de désinfection des locaux et de mise à disposition d’équipements de protection n’étaient pas prises, ou n’étaient pas effectives. L’information diffusée par la direction n’était pas non plus suffisante pour garantir la sécurité des postiers et postières, a-t-il jugé.
« Des salariés se retrouvent à travailler à deux sur un même casier, à moins d’un mètre de distance. Les équipements de manutention ne sont jamais désinfectés alors qu’ils sont manipulés par plusieurs salariés au cours d’une même vacation. L’employeur ne prévoit pas de mettre à disposition des salariés des gants en vinyle ou latex jetables », note l’inspecteur du travail dans le courrier de mise en demeure que nous avons pu consulter.
« Rien n’est fait pour changer la situation »
Si la direction de l’établissement, dit sa mise en demeure, a cinq jours pour se mettre en conformité avec les demandes de la Direccte, Christophe Musslé regrette qu’aucune mesure n’ait été prise depuis la réception du courrier. « À ma connaissance, rien n’est fait pour changer la situation, à part une tentative pour maintenir une distanciation sociale dans le centre de tri, ce qui me semble impossible, puisqu’on doit trier énormément de colis ces derniers temps, plus qu’à Noël. On nous a simplement dit qu’une société de nettoyage avait été contactée pour un nettoyage approfondi, mais c’est différent d’une désinfection. »
Si des mesures à l’échelle de la plateforme sont indispensables, le salarié précise que la santé des agents ne sera garantie que si seule la livraison de colis de première nécessité est maintenue. « Distribuer des vêtements ou des packs d’eau en pleine épidémie, comme j’ai pu voir, c’est mettre en danger les postiers pour rien. »
Contactée par Politis, La Poste a assuré que « suite aux retours de la Direccte, les responsables de l’établissement ont pris des mesures afin de renforcer l’information et la communication – rappel des mesures barrières lors du brief, affichage en salle de pause – et la bonne utilisation des différents équipements de protection ». Conformément à leur mise en demeure, les responsables de la plateforme de distribution de Lisieux devront envoyer des preuves des mesures prises pour se mettre en conformité au ministère du Travail. En cas d’absence de réponse, la direction pourrait être déférée devant la justice.
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