« Les gens ne veulent pas déranger, alors que les cabinets sont vides ! »
Aujourd’hui, dans #LesDéconfinés, Sophia*, interne en médecine générale dans un cabinet situé en milieu rural dans le Finistère, raconte comment le confinement altère le rapport aux soins médicaux.
Au début du confinement, on a réorganisé nos créneaux de consultations au cabinet. Le matin, on reçoit le tout-venant des patients de médecine générale, qui viennent pour toutes sortes de pathologies mais non infectieux. Globalement, ce sont des patients chroniques qui viennent régulièrement au cabinet et ont besoin d’un suivi rapproché. L’après-midi, après les visites à domicile, nous voyons les patients « suspects Covid ». Cela permet d’éviter la contamination de gens « sains ». Mais avec le confinement, on a une baisse des consultations.
Lire > Les craintes d’une « bombe à retardement » sanitaire
On voit aussi plus de décompensations psychiques, des patients qui déclenchent des dépressions ou encore des angoisses, et ça, c’est dû au confinement, à l’ambiance, au fait de pas pouvoir sortir, les infos anxiogènes… On a des gens qui viennent en pleurs parce qu’ils n’en peuvent plus, et les angoissés de base qui le géraient plus ou moins bien n’y arrivent plus. On prescrit plus d’anxiolytiques. Et je pense pourtant qu’on est plutôt protégés, ici il y a peu de gens contaminés et le cadre de vie reste plus agréable que dans les grandes villes.
Quant au Covid, on a eu plusieurs cas suspects, mais des cas avérés, très peu. Puis le test de diagnostic est à prendre avec des pincettes, s’il est positif, c’est qu’on a le virus, s’il est négatif, il faut se méfier, car il y a 30% de faux négatifs, ce qui veut dire que 30% des gens testés négativement sont quand même malades.
J’espère qu’avec le déconfinement les gens vont revenir au cabinet car ce qui risque de tuer certains, à terme, ce sont les urgences non traitées et leurs conséquences… Dans tous les cas, il faudrait que tout le monde soit masqué lorsqu’on prend les transports en commun et lorsqu’on va dans des lieux publics fermés, comme les supermarchés, pour éviter la contamination du milieu extérieur par des gouttelettes contenant le virus. Si tout le monde a un masque, on diminuera forcément le risque de transmission. Concernant le dépistage, il faut dépister massivement, se confiner si symptômes et maladie avérée, respecter les gestes barrières, sinon tous nos efforts durant le confinement n’auront pas servi à grand-chose et nous devrons faire face à une seconde vague, probablement plus violente.
Lire aussi > « Nos dirigeants ont fait le choix de ne pas tester, alors qu’il faut dépister, isoler et traiter »
* Le prénom a été changé.
Chaque jour, Politis donne une voix à celles et ceux qui ne l’ont pas, pour favoriser des prises de conscience politiques et le débat d’idées, par ses enquêtes, reportages et analyses. Parce que chez Politis, on pense que l’émancipation de chacun·e et la vitalité de notre démocratie dépendent (aussi) d’une information libre et indépendante.
Faire Un Don