Geneviève Azam : « Toulouse, la ville grise »
L’économiste et figure d’Attac partage sa tristesse après la défaite d’Archipel citoyen dans la Ville rose.
dans l’hebdo N° 1610 Acheter ce numéro
La tristesse était grande dimanche soir à Toulouse du côté d’Archipel citoyen, qui a perdu de peu après une campagne autour d’un vrai projet de ville, inventive, respectueuse, déterminée. Cette liste était singulière, issue d’une initiative citoyenne pour faire face à la faillite démocratique, à la métropolisation, au jeu des pouvoirs installés et aux défis actuels inédits. Dirigée par Antoine Maurice (EELV), intégrant une part de candidat·es tiré·es au sort, elle a été soutenue par de nombreux mouvements sociaux et ralliée par Europe Écologie-Les Verts, des dissidents du PS, La France insoumise, et au second tour par quasiment tout l’arc de la gauche. Alors pourquoi la défaite quand la ville pouvait basculer ? Il est tôt pour en tirer toutes les leçons, y compris pour Archipel.
Pour le reste, il y a bien sûr la violente campagne de la droite, une campagne à la Trump alliant clientélisme, haine, mensonges, calomnies, ignorance, homophobie. Bref, une droite menacée en campagne. La ville était à son image hier soir : une ville vide, comme honteuse, avec un camp qui ne peut même pas fêter sa victoire.
Tout n’est pas là cependant. Archipel n’a pas pu en finir avec certains jeux de pouvoirs locaux et régionaux. La liste PS, dirigée par Nadia Pellefigue, arrivée en troisième position, a rallié Archipel au second tour, mais sans sa tête de liste qui a refusé de soutenir et avec le soutien déclaré à la droite de son numéro deux. Pas étonnant qu’il manque des voix ! Incompréhensible ? Non, si on retient l’engagement commun et affiché de la présidente PS de région, Carole Delga, et de Jean-Luc Moudenc, maire LR de Toulouse, notamment pour une ligne LGV, point de rupture affiché entre Nadia Pellefigue et Archipel. La vision « modernisatrice », celle des années 1980 et 1990, attractivité, compétitivité, start-up city, smart city, est partagée en grande partie. L’écologie ne s’arrête pas aux cantines bio et aux pistes cyclables. Plus que jamais, face aux menaces et aux défis, aux incertitudes, l’écologie politique, c’est l’anticipation lucide et la discussion démocratique des projets qui structurent ou déstructurent des territoires de vie et creusent les inégalités.
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