Chômage, retraite… La tentation de la fuite en avant

Le duo exécutif ne renonce à aucun dossier parmi les plus conflictuels, réussissant à bâtir contre lui une unité syndicale totale.

Erwan Manac'h  • 7 juillet 2020 abonné·es
Chômage, retraite… La tentation de la fuite en avant
La ministre sortante Muriel Pénicaud flanquée de sa successeuse Élisabeth Borne et de la ministre déléguée à l'Insertion Brigitte Klinkert.
© GEOFFROY VAN DER HASSELT / AFP

Après une pause inévitable, l’exécutif compte bien relancer la réforme des retraites. Elle devra être réglée « à court terme » et sans « consensus mou », indique Jean Castex au JDD le 5 juillet. Emmanuel Macron a également annoncé qu’il faudrait travailler plus longtemps, évacuant ainsi l’hypothèse d’une réforme allégée des mesures d’économies, qui paraissent désormais aussi injustes que dérisoires au regard du choc financier que viennent de subir tous les comptes sociaux. Le duo exécutif aura ainsi réussi à bâtir contre lui une (éphémère) unité syndicale totale, qui recrute jusqu’au Medef, où la reprise des travaux sur la réforme des retraites est jugée inopportune dans le contexte actuel. FO et la CGT attendent d’en savoir plus sur le contenu des négociations, annoncées pour l’été, avant de décider d’y participer ou non. Et la CFDT se montre également réticente à se relancer dans un éprouvant jeu de poker menteur avec le gouvernement sur un dossier qu’elle soutient dans ses principes, mais tentait coûte que coûte de rendre moins brutal avant la crise du Covid.

Sur la réforme de l’assurance–chômage, l’autre gros sujet social du déconfinement, le gouvernement a au contraire décidé de jouer la montre. Le projet adopté il y a un an vise à abaisser drastiquement les allocations des plus précaires à partir du mois de septembre, après avoir durci les conditions d’ouverture des droits en novembre 2019. Le gouvernement devait réunir, fin juillet, les partenaires sociaux pour leur annoncer ses intentions. En attendant, des « concertations » sans fin se poursuivent au ministère du Travail pour évoquer l’emploi des jeunes, les travailleurs détachés et « le partage de la valeur ». En l’absence de la ministre Muriel Pénicaud, sur le départ, c’est son directeur de cabinet, Antoine Foucher, qui joue les gardes-chiourmes. « Ça n’a de concertation que le nom, peste Michel Beaugas, à Force ouvrière. Nous sommes invités à venir discuter, on fait des propositions, le ministère fait son marché, mais le discours tenu avant et après les échanges ne change pas d’une virgule. »

Le gouvernement s’est donné l’été pour élaborer son plan de relance de l’économie. Il doit dévoiler d’ici à la fin juillet un plan d’urgence pour l’emploi des jeunes, qui devrait se fonder sur des leviers déjà largement utilisés avec des résultats mitigés (aide à l’embauche pour les entreprises et baisse de cotisations sur les bas salaires), et la création d’une branche « dépendance » de la Sécurité sociale risque à son tour d’animer la fin du quinquennat. « Nous sommes encore dans l’attente d’éclaircissements, mais le monde d’après ressemble étrangement au monde d’avant, constate Denis Gravouil, à la CGT. Dans ces conditions, il y aura de toute façon des affrontements », présage-t-il, alors que le Conseil d’État vient une seconde fois de se ranger du côté de la liberté de manifestation en annulant le décret instaurant un régime d’autorisation préalable pour manifester.

Politique
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