IVG : La longue marche des féministes latinas

Malgré la victoire historique des Argentines, l’immense majorité des femmes d’Amérique latine n’ont droit qu’à un régime d’avortement toléré, voire interdit.

Patrick Piro  • 6 janvier 2021
Partager :
IVG : La longue marche des féministes latinas
Manifestation à Bogota, en Colombie, le 28 septembre 2020.
© LEONARDO MUNOZ / AFP

La ténacité des militantes argentines peut laisser croire que le pays vient enfin d’effacer un retard dans le monde latino. Il n’en est rien. Il vient seulement de rejoindre Cuba (depuis 1965), l’Uruguay, le Guyana, les États mexicains de Oaxaca et de Mexico, où l’interruption volontaire de grossesse (IVG) est devenue un droit des femmes. Si les pays radicalement « anti-IVG » restent tout aussi minoritaires (Salvador, Haïti, Honduras, Nicaragua, République dominicaine), l’immense majorité des femmes latinas n’ont droit qu’à un régime d’avortement toléré sous des conditions qui le leur rendent souvent inaccessible. Au Brésil, au Mexique (en presque totalité), en Colombie… elles doivent démontrer un risque pour leur vie ou leur santé, l’existence d’un viol ou d’une malformation fœtale. Faute de moyens pour avorter dans un pays qui l’autorise, elles en sont réduites aux risques d’une intervention clandestine. L’interdiction de l’IVG sanctionne avant tout les pauvres.

La victoire des Argentines est cependant historique. Car elle donne l’espoir de faire basculer à terme un monde latino pavé des mêmes obstacles (patriarcat exacerbé, conservatisme parlementaire, poids des Églises), qui abrite aussi les mouvements féministes parmi les plus combatifs de la planète. La mobilisation des femmes a été au cœur d’une révolution citoyenne au Chili, il y a un an, dont le souffle a dépassé les frontières du pays. À Bolsonaro, affirmant qu’il n’autoriserait jamais l’avortement au Brésil, la députée argentine Ofelia Fernández a rétorqué : « Méfie-toi, la force féministe latino-américaine au Brésil s’ajoute à la rage pour Marielle Franco », l’emblématique militante assassinée en 2018.

Lire > Argentine : Une victoire historique pour les femmes

Monde
Temps de lecture : 2 minutes
Soutenez Politis, faites un don.

Chaque jour, Politis donne une voix à celles et ceux qui ne l’ont pas, pour favoriser des prises de conscience politiques et le débat d’idées, par ses enquêtes, reportages et analyses. Parce que chez Politis, on pense que l’émancipation de chacun·e et la vitalité de notre démocratie dépendent (aussi) d’une information libre et indépendante.

Faire Un Don

Pour aller plus loin…

La Brigade rouge : un poing c’est tout !
Portfolio 20 novembre 2024 abonné·es

La Brigade rouge : un poing c’est tout !

Pour pallier les carences et manquements de l’État indien, l’ONG la Brigade rouge s’est donné pour mission de protéger et d’accompagner les femmes qui ont été victimes de viol ou de violences sexistes et sexuelles. Reportage photo.
Par Franck Renoir
À Koupiansk, en Ukraine, « il ne reste que les vieux et les fous »
Reportage 20 novembre 2024 abonné·es

À Koupiansk, en Ukraine, « il ne reste que les vieux et les fous »

Avec les rapides avancées russes sur le front, la ville de Koupiansk, occupée en 2022, est désormais à 2,5 km du front. Les habitants ont été invités à évacuer depuis la mi-octobre. Malgré les bombardements, certains ne souhaitent pas partir, ou ne s’y résolvent pas encore.
Par Pauline Migevant
À Valence, un désastre climatique et politique
Reportage 20 novembre 2024 abonné·es

À Valence, un désastre climatique et politique

Après les terribles inondations qui ont frappé la région valencienne, les réactions tardives du gouvernement de Carlos Mazón ont suscité la colère des habitants et des réactions opportunistes de l’extrême droite. Pour se relever, la population mise sur la solidarité.
Par Pablo Castaño
Pourquoi les Démocrates ont perdu l’élection présidentielle
Analyse 13 novembre 2024 abonné·es

Pourquoi les Démocrates ont perdu l’élection présidentielle

Après la défaite de Kamala Harris, les voix critiques de son parti pointent son « progressisme », l’absence de considération des classes populaires et le coût de la vie aux États-Unis. Les positions centristes de la candidate pour convaincre les électeurs indécis n’ont pas suffi.
Par Edward Maille