Vassilis Alexakis : Un romancier des mots
Vassilis Alexakis, disparu le 11 janvier, enchantait aussi bien en grec qu’en français.
dans l’hebdo N° 1638 Acheter ce numéro
Même si sa mort remonte à deux semaines, le 11 janvier, il n’est pas trop tard pour rendre hommage à ce merveilleux écrivain qu’était Vassilis Alexakis. Né à Athènes en 1943, il quitte la Grèce au début des années 1960 pour suivre les cours de l’école supérieure de journalisme de Lille. Ce sera le début d’un incessant va-et-vient entre son pays de naissance et sa terre d’élection, mais surtout entre deux langues : la grecque et la française. « En voyageant ainsi d’un pays à l’autre, d’une langue à l’autre, d’un moi à l’autre, j’ai cru trouver un certain équilibre », écrit-il dans Paris-Athènes (Seuil, 1989). Puis vint un temps où ces deux langues ne lui suffirent plus : il apprit le sango, langue de Centrafrique, pour écrire Les Mots étrangers (Stock, 2002).
La mort est souvent présente dans les livres de Vassilis Alexakis, sous différentes formes : réelle, celle de ses parents ou de son éditeur et ami de quarante ans, Jean-Marc Roberts, disparu en 2013 ; mais aussi métaphorique, comme dans ce beau roman à la limite du fantastique, Avant (Seuil, 1992). Néanmoins, son univers, teinté de mélancolie, est toujours marqué par la fantaisie. Le romancier aurait pu reprendre ce que dit l’un des personnages de La Langue maternelle (Fayard, 1995) : « Je n’aime pas le malheur ! Ce n’est pas mon genre ! »
L’énigme des mots animait cet amateur de jeux littéraires, qui a longtemps participé aux « Papous dans la tête », sur France Culture. Tandis que le sort de la Grèce l’inquiétait, comme le montre son dernier roman, La Clarinette (Seuil, 2015). -Vassilis Alexakis n’aura eu aussi de cesse de s’interroger sur lui-même. Sans narcissisme et avec humour, à la manière de cette citation prise dans La Langue maternelle : « J’ai certainement des secrets, ai-je pensé, seulement je ne les connais pas. »