L’appel de Jadot ne fait pas l’unanimité
Le député européen réclame un rassemblement des écologistes et de la gauche, obligeant les politiques à se positionner.
dans l’hebdo N° 1648 Acheter ce numéro
Yannick Jadot a donc été le premier à dégainer un appel formel à une réunion des représentants politiques écologistes et des gauches. D’autres y pensaient depuis quelque temps ; certains, comme Jean-Luc Mélenchon, l’avaient même formulé de manière moins expansive. Jadot, lui, en a fait son cheval de bataille, voire un axe de communication. Dans la presse, le député européen se pose en rassembleur autour de l’urgence écologique et sociale, et n’hésite pas à dessiner les contours d’une candidature commune dès l’automne « autour de l’écologie » – pour ne pas dire autour de lui –en évoquant même à demi-mot la nécessité d’une primaire dépassant les seuls verts. « Les écolos ne pourront pas imposer leur candidature aux autres », dit-il. Une façon d’enjamber la primaire du pôle écologiste prévue en septembre. « Elle aura lieu », assure Julien Bayou, imperturbable. Le secrétaire national d’EELV, candidat pour les régionales en Île-de-France, ira au rendez-vous prévu d’ici une quinzaine de jours, mais rappelle que « c’est un simple appel à discuter » et que « chaque parti garde son timing ».
Delphine Batho, députée Génération écologie, n’ira pas. « Je ne partage pas le défaitisme de Yannick Jadot, a-t-elle déclaré à Jean-Jacques Bourdin le 5 avril. On ne peut pas dire que tout est fichu dans l’écologie et qu’on n’a plus qu’à se réfugier dans les jupes de la gauche. Il faut un candidat écologiste à la présidentielle. » D’autres sont moins radicaux. « On a voté pour une primaire écolo : il faut la faire. Mais je vais aller à ce rendez-vous, car il y a une grande attente populaire pour le rassemblement, même si je m’interroge sur le calendrier, lance Sandrine Rousseau, candidate déclarée à la primaire. On grille les étapes. Comment expliquer que nous discutions de rassemblement et qu’aux régionales ça se passe autrement ? »
Personne n’est effectivement dupe du caractère opportuniste de l’initiative,mais, comme un cadeau empoisonné, chacun doit se positionner. Sauf stratégie politique contraire (tel Arnaud Montebourg, qui préfère l’union des souverainistes), les urgences écologiques, sociales et démocratiques sont telles qu’elles obligent les leaders politiques. Benoît Hamon salue l’initiative et semble laisser les rancœurs de 2017 derrière lui pour se poser en garant d’un espace de discussion du pôle écolo avec Jean-Luc Mélenchon. Ce dernier devrait d’ailleurs se rendre au rendez-vous, même si La France insoumise pose, comme une sorte de préalable, la participation à sa réunion du 7 avril. Aux côtés de Génération·s, du NPA, d’Ensemble ! et d’autres, LFI organise une rencontre à son siège pour défendre les libertés publiques face « à la dérive autoritaire du gouvernement ». En ligne de mire : la chasse aux sorcières de Frédérique Vidal contre l’« islamo-gauchisme » ou encore la prise à partie du syndicat Unef. « Si on n’est pas capable d’avoir une unité d’action contre l’extrême-droitisation des idées, comment se rassembler ? » demande Éric Coquerel, député LFI. Chacun sait que ces questions sont explosives. Pour Aurélien Taché,c’est cependant un point nodal qu’il ne faudra pas éluder. « Si je suis le bienvenu à la réunion de LFI, j’irai et j’espère que tout le monde viendra »,clame l’ancien député LREM, qui répondra aussi favorablement à l’appel de Jadot. À EELV, on discute de l’initiative de LFI au moment où nous bouclons ces lignes. « Le problème, c’est que la présidentielle pollue les discussions », regrette Bayou. En même temps, c’est bien de l’horizon présidentiel qu’il s’agit.