Ceux qui agissent pour le climat / négaWatt : les voies désirables de la transition

Ce sont des mouvements citoyens, des collectivités locales, des experts, des gouvernements, des industriels… Leurs réalisations, contributions et engagements les placent en première ligne de la lutte climatique, à la hauteur des objectifs de l’accord de Paris, quand les négociations multilatérales onusiennes n’avancent qu’à petits pas. Et même si ces avancées ne sont pas toutes exemptes de faiblesses et de critiques, elles pèsent à des niveaux suffisamment significatifs pour être encourageantes. Florilège non exhaustif.

Patrick Piro  • 27 octobre 2021 abonné·es
Ceux qui agissent pour le climat / négaWatt : les voies désirables de la transition
© JENS SCHLUETER / GETTY IMAGES EUROPE / Getty Images via AFP

Le « négaWatt » nouveau est arrivé ! L’actualisation de ce scénario de transition énergétique est un petit événement, au regard de son influence dans le débat climatique français. Comme en 2006, 2011 et 2017, le millésime 2022 est publié en période de campagne présidentielle. Europe Écologie-Les Verts en fait une référence, La France insoumise également.

La notoriété de cette prospective a bondi en 2013, retenue dans le panel qui alimente le débat national sur la transition énergétique. Les expert·es de l’association négaWatt sont indépendant·es, quand les autres scénarios sont souvent issus d’organismes liés à l’État ou à des groupes d’intérêts. La vision négaWatt a laissé des traces dans la loi de transition énergétique de 2015, issue du débat national. La sobriété énergétique y est reconnue comme une nécessité première, et le concept de « transition » s’impose : toute projection doit s’appuyer sur la description d’une trajectoire pour y parvenir.

Le scénario se distingue par sa radicalité : c’est le seul qui trace un chemin vers la « neutralité carbone » en 2050 en visant 100 % de sources renouvelables sur l’ensemble des usages énergiques – énergie, transport, industrie, agriculture, etc. – quand les exercices se limitent souvent au seul secteur électrique. Exit donc les énergies fossiles, mais aussi le nucléaire, hypothèse jusqu’alors taboue dans les cercles conventionnels.

L’influence négaWatt ? Des scénarios « 100 % énergies renouvelables » ont depuis été osés par l’Agence de la transition écologique (Ademe) et même par RTE, gestionnaire du réseau de transport d’électricité, filiale d’EDF ! « Nous pouvons nous targuer d’avoir introduit la prospective énergétique en France. Certaines statistiques étaient inexistantes, nous avons dû les reconstituer », commente Marc Jedliczka, porte-parole de l’association. Sa démarche, fondée sur le triptyque énergétique sobriété-efficacité-renouvelables, induit une dynamisation de l’activité économique locale (et donc la création d’emplois) qui séduit les collectivités (villes, régions, etc.). Quelque 200 territoires (ruraux surtout) s’affichent « à énergie positive » (Tepos), ambition équivalant à devenir « compatibles négaWatt » d’ici à 2050.

La version 2022 du scénario (1) affine sa trajectoire vers 2050, traitant désormais les émissions « importées » (dues à la fabrication à l’étranger de biens vendus en France). Elle se fixe un objectif de relocalisation industrielle et présente un indicateur de sobriété dans l’utilisation des matériaux. Si l’exercice débouche sur une baisse annuelle de 76 % pour l’extraction de fer, c’est en revanche 54 % d’augmentation pour le lithium, composant clé des batteries, notamment pour les véhicules électriques, dont le scénario bride l’essor, à rebours des enthousiasmes actuels. Les réserves mondiales sont modestes et localisées dans une demi-douzaine de pays. « Il ne s’agit pas de préparer des guerres du lithium », explicite Marc Jedliczka.

L’association valorise aussi les bénéfices sociétaux de sa transition : 500 000 emplois créés en dix ans et une amélioration du bien-être de la population, par le recul des polluants, une alimentation moins carnée (liée au recul de l’élevage industriel), ainsi que le développement du vélo et de la marche, « évitant 10 000 décès par an entre 2035 et 2050 », calcule négaWatt. Sa version 2022 est aussi compatible avec l’objectif « - 55 % de gaz à effet de serre en 2030 » adopté par l’Union européenne. L’association indique travailler avec des partenaires à un scénario 2050 continental.

(1) negawatt.org

Écologie
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