Édouard Ferlet : Le clavier bien libéré
Édouard Ferlet publie Pianoïd, un album inclassable ouvrant des perspectives inouïes.
dans l’hebdo N° 1675 Acheter ce numéro
Développant son activité créatrice depuis le début des années 1990, après avoir étudié notamment à l’École normale de musique de Paris, le pianiste français Édouard Ferlet gravite pour l’essentiel entre jazz et musique (néo)classique. Dans sa production récente se détache un diptyque autour de Jean-Sébastien Bach – Think Bach (2012) et Think Bach op. 2 (2017) – accueilli de façon élogieuse par la critique. En cette rentrée automnale, prodigue en sorties musicales, il parvient aisément à s’extraire du (f)lot avec son splendide nouvel album solo, dont le titre – Pianoïd – souligne bien la singularité mutante.
Pour le concevoir, l’artiste a appliqué une méthodologie très particulière, élaborée avec l’ingénieur du son Joachim Olaya. La première impulsion a été donnée en 2015, dans le cadre du festival transgenre Beyond my piano (conçu par Olaya), puis le projet s’est affiné au fil des ans et des concerts. À l’arrivée, le dispositif relie quatre instruments : un piano (dont joue Ferlet), un ordinateur traitant les informations envoyées par le piano avec le logiciel Ableton Live, un contrôleur Midi – connecté à l’ordinateur – permettant de moduler de multiples paramètres, et un clavier automate restituant les notes transformées en cours de processus.
Afin de ne pas s’abîmer dans un gouffre infini de possibles, le musicien s’est attaché à épurer au maximum son écriture. Conjuguant improvisation et composition, sens de l’expérimentation et quête de l’émotion, le résultat s’avère magistral. Mû par une exaltante liberté de jeu, qui renverse allégrement les limites, Pianoïd délivre neuf imparables morceaux – quelque part entre néoclassique, musique contemporaine et électro organique – dont la vibrante densité n’a d’égale que l’éclatante fluidité.
Pianoïd, Édouard Ferlet, Mélisse/Outhere.