Les moindres gestes

Il y a toujours à faire dans une maison. Cet adage populaire semble prendre sa pleine résonance à l’intérieur d’une grande demeure baptisée Tentative et située à Saint-Hippolyte-du-Fort, au sud des Cévennes. Là vivent plusieurs jeunes adultes autistes. Une équipe éducative, dont les membres se relaient, les accompagne au quotidien. Diverses tâches récurrentes (toilette, préparation des repas, nettoyage, linge…) scandent les journées.

Ouverte en 2004, la structure a pour instigateur Thierry Bazzana, ancien compagnon de route de Fernand Deligny, (p)artisan majeur de formes alternatives d’éducation, qui a créé dans les Cévennes, à partir des années 1960, plusieurs lieux accueillant des enfants autistes hors du cadre médico-psychiatrique ordinaire. Fruit d’une recherche cinématographique approfondie autour de l’autisme menée de 2016 à 2019 par Judith Auffray, le documentaire Une maison – son premier long métrage – nous emmène au cœur de cette Tentative collective.

Ayant passé beaucoup de temps sur place, la réalisatrice a su trouver la juste distance, si cruciale ici. À la fois aux aguets et discrète, jamais intrusive, elle observe avec une sensibilité attentive la petite communauté hors normes qui évolue autour d’elle. Sans commentaire ni texte informatif, le film restitue le réel à l’état brut. Ponctués d’éclats saisissants, les deux premiers tiers livrent une vue d’ensemble du fonctionnement du lieu tandis que la dernière partie, extrêmement touchante, s’attarde sur cinq des pensionnaires, les témoignages de leurs mères respectives se joignant en voix off aux images de chacun et chacune d’eux. Quelques extraits de lettres écrites par Deligny apportent encore une autre mise en perspective. Une phrase en particulier se détache : « Une fois qu’on est né, il faut bien faire avec. »