États-Unis : Maus retiré d’un programme scolaire
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dans l’hebdo N° 1691 Acheter ce numéro
« Vulgaire et inapproprié ». Tel est le jugement du conseil d’école du comté de McMinn, dans le Tennessee, aux États-Unis, sur Maus, le roman graphique d’Art Spiegelman, consacré à la Shoah. Un ouvrage extraordinaire, publié sous forme de série dans la revue Raw de 1980 à 1991, récompensé par le prix Pulitzer en 1992, traduit en une vingtaine de langues, relatant l’Holocauste à partir des souvenirs du père de l’auteur, lui-même rescapé des camps, et dans lequel les juifs sont représentés par des souris et les nazis par des chats. Le conseil scolaire de ce comté a retiré de son programme destiné aux enfants de 13 ans cette bande dessinée (en attendant une autre œuvre sur la Shoah, mais pour quand ?) pointant une poignée « d’utilisations inutiles de mots grossiers », sa description de violences et des suicides, et l’image d’une femme nue. Il n’en faut pas plus pour corriger ou minorer l’histoire à ce conseil scolaire au cœur d’un État très conservateur.
Un peu sidéré, voire consterné, Art Spiegelman a reconnu dans la foulée avoir été plongé dans une « confusion totale », avant « d’essayer d’être tolérant avec ces gens qui pourraient ne pas être des nazis », mais « qui se sont concentrés sur quelques mots grossiers ». C’est quoi, un mot grossier quand il s’agit de l’Holocauste ? Ce retrait de Maus n’est pas anodin ni très original. Il intervient dans un contexte de remise en question de l’enseignement dans plusieurs États américains conservateurs, qui s’attaquent aux œuvres articulées autour du racisme, jusqu’à l’identité du genre. Autant d’œuvres qui inciteraient les enfants blancs à se voir comme des oppresseurs des minorités.
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