Macron nous prend pour des…
Emmanuel Macron excelle toujours dans le boniment et dans l’art de dissimuler ses intentions – et pratiques – véritables.
dans l’hebdo N° 1697 Acheter ce numéro
Le 3 mars 2022, Emmanuel Macron, président de la République française, a adressé à ses administré·es, par voie de presse (régionale) et de réseaux sociaux (1), une lettre officialisant enfin, 38 jours avant son premier tour, sa candidature à l’élection présidentielle où il briguera un second (et dernier) mandat. Ce courrier en fait foi : il excelle toujours dans le boniment et dans l’art de dissimuler ses intentions – et pratiques – véritables.
Quand il écrit par exemple, dans cette déclaration qui a donc été publiée 38 jours avant le premier tour de la présidentielle, qu’il ne pourra « pas mener campagne comme » il l’aurait « souhaité en raison du contexte » (marqué principalement par la guerre en Ukraine), c’est bien évidemment une contre-vérité. Car bien sûr, dans la vraie vie, il ne tenait qu’à lui de se déclarer beaucoup plus tôt. Comme l’ont fait tou·tes ses concurrent·es. Et de mener, donc, une véritable campagne dont il n’a, en réalité, pas voulu assumer le risque.
Lorsqu’il décrète dans cette même lettre, sur le ton de l’évidence et en usant d’une formulation volontairement contournée, qu’« il nous faudra travailler plus et poursuivre la baisse des impôts pesant sur le travail et la production », cela signifie, une fois traduit en français courant, qu’il continuera à prendre aux pauvres pour donner aux riches. Et plus précisément : à prendre aux salarié·es (auxquel·les il promet donc un surcroît de travail) pour donner au patronat (qui se voit, quant à lui, promettre plutôt, après cinq années de gratifications, un surcroît de cadeaux fiscaux).
Dernier exemple : quand il s’engage, pris de lyrisme, à « défendre », s’il est réélu, « nos valeurs que les dérèglements du monde menacent » et promet de « promouvoir une certaine manière d’être au monde », le chef de l’État sortant se garde, évidemment, de dire plus précisément de quoi il parle. Mais nous savons ce que sont ses « valeurs ». Et nous savons ce qu’est son rapport à un monde dont il feint de déplorer les « dérèglements », alors qu’il vient, pendant cinq ans, de contribuer activement à son délabrement – par des atteintes répétées à la biodiversité, ou en se faisant une gloire commerciale de vendre des armes à certains des pires criminels de la planète, qui les utilisent notamment au Yémen, dans une guerre qui a provoqué, selon l’ONU, « la pire catastrophe humanitaire depuis la Seconde Guerre mondiale ».
Mais pourra-t-il légitimement faire valoir que le pouvoir ne l’a pas changé ? Après cinq ans de mandat, il est encore si gonflé d’arrogance et si bouffi de mépris qu’il semble même s’être convaincu que nous ne voyons plus qu’il nous prend toujours pour des demeuré·es.
(1) Choix par lui-même extrêmement révélateur, puisqu’il excluait, de fait, tou·tes celles et ceux qui, pour une raison ou une autre – économique, notamment –, n’ont accès ni aux journaux ni à l’Internet.
Sébastien Fontenelle est un garçon plein d’entrain, adepte de la nuance et du compromis. Enfin ça, c’est les jours pairs.
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