« Rien à foutre » : Sourdes turbulences
Dans Rien à foutre, Emmanuel Marre et Julie Lecoustre mettent en scène une hôtesse de l’air faussement insouciante.
dans l’hebdo N° 1695 Acheter ce numéro
Cassandre est hôtesse de l’air pour une compagnie aérienne à bas coût. Un métier convenant bien à cette jeune femme sans attache. Elle peut prendre du jour au lendemain un vol pour Tokyo ou Dubaï. Son existence est celle d’une nomade, allant de capitales touristiques en villes de carte postale sans avoir le temps de les visiter elle-même.
Pour leur premier long-métrage, dont le titre, Rien à foutre, est une fausse piste, Emmanuel Marre et Julie Lecoustre opèrent un choix pertinent : mettre en scène un personnage lisse en apparence mais portant une faille intérieure, qui n’a littéralement pas le temps de se poser tout en étant souterrainement minée par une perte. Cassandre, interprétée de façon très convaincante par Adèle Exarchopoulos, pourrait être la caricature d’une jeune femme d’aujourd’hui sans aspérité, presque dénuée de sentiments, qui avancerait dans la vie en (se) répétant : « Rien à foutre ! » Mais son apparent détachement est un leurre. La preuve : un coup de fil anodin avec l’opérateur de son téléphone portable déclenche en elle une émotion forte parce qu’il la ramène subrepticement à la disparition de sa mère.
Cassandre passera finalement quelques jours avec sa sœur chez son père, nouvellement veuf. Ces retrouvailles familiales lui permettent de se mettre enfin à l’écoute de son chagrin. Rien à foutre, malgré son titre, est un film délicat.