Culture : il y a urgence et nous sommes prêt·e·s !
La démarche L’art est public porte l’urgence de la solidarité et de la diversité culturelle, en particulier celle des pratiques, professionnelles comme amateures. Cette tribune, qui se situe dans cette démarche, a été rédigée à l’initiative de l’Union fédérale d’intervention des structures culturelles (UFISC), qui représente 17 organisations professionnelles et, par subsidiarité, plus de 2500 structures citoyennes développant des projets artistiques et culturels dans toutes les disciplines.
Et si l’on prenait enfin la diversité culturelle à cœur et à bras le corps ?
Au moment où la peur de l’altérité et le repli gagnent les esprits, ce combat est étonnamment absent de la sphère publique. Nos organisations sociales, politiques et économiques changent profondément et la culture est au cœur de ces transformations. Le déploiement de nouveaux imaginaires est un défi collectif.
Nous, artistes, chercheur·euse·s, citoyen·ne·s, sommes engagé·e·s pour défendre une culture diverse, solidaire, libre et joyeuse inspirée par tous ceux et toutes celles qui font la France aujourd’hui. Nous avons besoin du soutien de nos élu·e·s pour mener ce combat. Nous avons besoin de programmes ambitieux qui imposent la culture comme enjeu sociétal essentiel. Il y a urgence.
Dans un pays qui s’est enorgueilli de porter le combat pour la diversité culturelle, comment expliquer la frilosité de la puissance publique face aux richesses d’expression que portent les personnes et les territoires ? Comment justifier cette défiance face aux expressions qui échappent aux cases du marché et de l’institution ?
La diversité culturelle est partout, pour peu qu’on veuille la regarder ! Elle s’incarne dans les dizaines de milliers d’associations et de coopératives (1) qui œuvrent au quotidien, partout sur les territoires. Ces structures représentent une force citoyenne et économique considérable. Elles ouvrent des espaces de liberté, fabriquent du lien, choisissent la coopération plutôt que la concurrence, l’organisation en réseaux plutôt que la verticalité. Pourtant ces structures, comme l’ensemble des initiatives citoyennes, ont pris de plein fouet un plan social quasi invisible mais d’une extrême violence : baisse des subventions, fin des emplois aidés, activité jugée « non essentielle » en raison des restrictions sanitaires.
Nous défendons une culture émancipatrice et respectueuse des droits humains, une économie culturelle sociale et solidaire fondée sur la recherche d’un mieux-être pour tou·te·s plutôt que des profits immédiats. Nous prenons au sérieux la singularité et la dignité des personnes et leur droit d’être des acteur·rice·s de la vie culturelle.
Nous inventons d’autres formes d’interventions culturelles que la diffusion d’œuvres à des « publics » : lieux ouverts à la diversité des expressions, interventions artistiques hors des sentiers tracés, partenariats tissés dans la durée sur un territoire, volonté de travailler avec les personnes dans leur diversité. Nous initions d’autres modes de dialogue démocratique, d’autres manières d’habiter les villes et campagnes ; nous contribuons à imaginer, ensemble, un futur vivable face aux effondrements partagés.
Les urgences démocratique, sociale, écologique, culturelle nous obligent. Nous en appelons à celles et ceux qui envisagent de siéger dans la prochaine Assemblée nationale : dialoguons !
Nous sommes porteur·euse·s de propositions pour une refonte des politiques culturelles, encore marquées aujourd’hui par une vision surplombante de l’accès des « publics » à « l’excellence artistique », ou prétendant soumettre les expressions aux lois de la rentabilité marchande. Face à la tentation de mettre la culture dans des cases, nous préconisons des politiques transversales ; face à la verticalité des décisions, nous demandons des espaces de concertations ; face aux visions à court terme, nous proposons l’accompagnement au long cours de démarches de transition.
C’est le sens de l’appel L’Art Est Public.
C’est un enjeu fondamental pour la démocratie au moment où elle est gravement menacée.
Il y a urgence et nous sommes prêt·e·s.
Signataires :
Réseau Actes-If, lieux artistiques et indépendants en Île-de-France
ADDOC (Association des cinéastes documentaristes)
Jean-Christophe Aplincourt, co-président de la Fédélima (Fédération des lieux de musiques actuelles)
Mathieu Barreira, chargé de production au Théâtre Comédie Odéon
Philippe Berthelot, consultant culturel, président d’honneur de l’UFISC (Union fédérale d’intervention des structures culturelles)
Raphaël Besson, docteur en sciences du territoire, directeur de Villes Innovations
Christelle Blouët, coordinatrice du Réseau culture 21
Yves Bommenel, codirigeant Coopérative illusion & macadam / Halle Tropisme
Eric Boistard, directeur de Stéréolux (Nantes)
Stéphane Bossuet, directeur de la CAE Art en réel
Serge Calvier, co-président et délégué national de la FNAR (Fédération des Arts de la rue)
Luc Carton, philosophe
Jean-Pierre Chrétien-Goni, directeur du tiers-lieu Le Vent se lève
Le CITI (Centre International pour les Théâtres itinérants)
Laurent Decès, président du Syndicat des musiques actuelles et directeur de Petit Bain
Hervé Defalvard, économiste
Danièle Demoustier, socio-économiste
Julie Desmidt, présidente de l’UFISC
Jean Faucheur, président de la Fédération de l’Art Urbain
FRAAP (Fédération des associations et réseaux d’artistes plasticiens)
Laurent Fraisse, sociologue
Eric Fourreau, directeur des Éditions de l’Attribut
Philippe Henry, chercheur en socioéconomie de la culture
Ricet Gallet, co-président de la FAMDT (Fédération des Actrices et Acteurs des musiques et danses traditionnelles)
Laurent Gardin, sociologue
Vincent Guillon, co-directeur de l’Observatoire des politiques culturelles
Cécile Héraudeau, présidente de Zone Franche
Alexandre Herer, président de Grands formats
Naima Huber-Yahi, historienne, chercheure associée à l’URMIS / Université Côte d’Azur ; KOLET’ – Réseau d’acteurs culturels du spectacle vivant de La Réunion
Stéphane Krasniewski, vice-président du SMA et directeur du festival Les Suds à Arles; Bertrand Krill, co-président de l’Ufisc
Christian Lamy, coordinateur réseau des cafés culturels et cantines associatifs
Loredana Lanciano, co-présidente de la FNAR
Fanny Landais, co-présidente de la Fraca-Ma (Fédération Régionale des Acteurs Culturels et Associatifs des Musiques Actuelles)
Bernard Latarjet, président de l’ONDA
Guillaume Laurent, co-président de la FNAR
Christian Laval, sociologue
Jean-Louis Laville, titulaire de la chaire Économie Solidaire au Conservatoire des arts et métiers
Hervé Le Crosnier, éditeur
Joël Lécussan (Arts Factories/ AutrespArts, coordinateur de Mix’arts Myris)
Françoise Liot, sociologue de l’art et de la culture, Université de Bordeaux
Jean-Michel Lucas, Consultant en politique culturelle et expert en droits culturels
Marie-Claire Martel, présidente de la COFAC (Coordination des Fédérations et Associations de Culture et de Communication)
Magali Martinelli, co-présidente du RIF (Réseau des musiques actuelles en Ile -de-France)
Gustave Massiah, économiste
Lionel Maurel, Directeur adjoint InSHS/CNRS
Marc Mithouard, président de la Férarock
Sarah Montero, maîtresse de conférences en Géographie sociale, Université Bordeaux Montaigne
Cécile Offroy, sociologue, Université Sorbonne Paris-Nord ; Association OPALE
Judith Pavard, co-présidente de la FNAR
Gérard Peltre, président du collectif transfrontalier d’appui à la reprise de la grange théâtre rurale de Lachaussée (55)
Jean-Yves Pineau, directeur des Localos et auteur-compositeur-interprète
Nadia Ratsimandresy, présidente de Futurs Composés
Gilles Rouby, président du Collectif des Associations citoyennes
Christian Ruby, philosophe
Jérôme Saddier, président de ESS France
Nicolas Saelens, président de THEMAA (Association nationale des théâtres de marionnettes et Arts associés)
Jean-Louis Sagot-Duvauroux, dramaturge et directeur de théâtre
Louis-Albert Serrut, auteur-réalisateur
Stanislas Souedet, co-président de la Fraca-Ma
Frédéric Sultan, coordinateur du collectif Remix The Commons
Syndicat des cirques et compagnie de création (SCC)
Philippe Teillet, maître de conférences à Sciences Po Grenoble
Emilie Toutain, co-présidente de la Fédélima
Emmanuel Vergès, codirecteur de l’Observatoire des politiques culturelles
Daniel Véron, président du centre de culture scientifique F93
Patrick Viveret, philosophe
Joëlle Zask, philosophe, maître de conférence à l’Université Aix-Marseille
Michèle Zwang-Graillot, présidente de la Ligue de l’Enseignement.
Des contributions pour alimenter le débat, au sein de la gauche ou plus largement, et pour donner de l’écho à des mobilisations. Ces textes ne reflètent pas nécessairement la position de la rédaction.
Chaque jour, Politis donne une voix à celles et ceux qui ne l’ont pas, pour favoriser des prises de conscience politiques et le débat d’idées, par ses enquêtes, reportages et analyses. Parce que chez Politis, on pense que l’émancipation de chacun·e et la vitalité de notre démocratie dépendent (aussi) d’une information libre et indépendante.
Faire Un Don