Au nom de la guerre en Ukraine, ne ressortons pas tous les projets gaziers enterrés !
Plus de 70 associations et collectifs adressent une lettre ouverte à Emmanuel Macron, Elisabeth Borne, Agnès Pannier-Runacher et Christophe Béchu leur demandant de ne pas céder face aux entreprises prêtes à relancer des projets gaziers d’un autre temps.
Profitant de la guerre en Ukraine et des tensions énergétiques, des entreprises gazières tentent de relancer leurs activités en faisant miroiter l’indépendance ou des réserves mirifiques – en réalité inexploitables -, et en avançant des arguments fallacieux pour tenter de faire reculer le gouvernement sur ses engagements climatiques (1).
En Lorraine, l’entreprise « La Française de l’Énergie » surfe sur les débats actuels sur la dépendance de l’Europe au gaz russe pour relancer sa campagne de communication dans le but d’obtenir une autorisation pour extraire du gaz de couche de charbon. En réalité, une très faible part de ces réserves est réellement récupérable. (2)
L’obtention du permis « Bleue Lorraine », impliquerait le forage de 400 puits sur 191 km2 et mettrait en péril la ressource en eau potable, détruirait des terres agricoles, et libérerait d’importantes quantités de méthane, puissant gaz à effet de serre.
Collectifs, associations, citoyens et même élus ont alerté depuis plusieurs années sur les risques de ce projet, et demandé au gouvernement français de rejeter cette demande de concession. Ils s’inquiètent aujourd’hui de l’opportunisme de cette entreprise spéculative qui espère tirer profit de la situation géopolitique pour faire entrer les réserves de gaz dans les actifs de l’entreprise.
Ces pressions de l’industrie gazière ne sont pas isolées. En Catalogne, l’Espagne propose de relancer la construction du gazoduc MidCat – 120 km entre la Catalogne et les Pyrénées orientales- afin d’y faire transiter du gaz de schiste nord-américain, livré en Espagne sous forme liquéfiée (GNL).
La Commission européenne est sollicitée pour réactiver cette interconnexion, cette fois en changeant de sens le flux gazier : en 2017, il était prévu d’y faire passer du gaz russe dans le sens France-Espagne et aujourd’hui ce serait du gaz de schiste nord-américain dans le sens Espagne-France. Ce projet ne peut répondre au problème d’approvisionnement actuel : il faudrait plusieurs années pour que ces infrastructures soient opérationnelles.
Ces fausses solutions ne feraient que nous enfermer davantage dans notre dépendance aux énergies fossiles et repousser le problème.
Certains en profitent même pour tenter de remettre sur la table des études sur le gaz de schiste et des terminaux gaziers, projets qui avaient été interdits ou abandonnés. Rappelons que peu importe la provenance et la méthode de production, il faut s’attendre à l’avenir à des tensions récurrentes sur le prix des énergies fossiles.
Le piège serait d’autoriser des projets, en réaction immédiate à l’actualité, et de se retrouver face à des conséquences catastrophiques dans les prochaines années. Pourtant il existe des rapports qui nous montrent comment se passer des importations russes sans nouvelles infrastructures et sans nouvelles exploitations fossiles.
Le nouveau gouvernement sera-t-il aveuglé par la crise énergétique au point de perdre de vue la menace climatique ? Sortir des énergies fossiles est une urgence absolue reconnue par l’ensemble de la communauté scientifique. Il serait aberrant qu’après l’énième alarme du GIEC, la France contribue encore au développement des énergies fossiles. Deux choix opposés s’offrent à vous : allez-vous vous engager vers de vraies solutions d’avenir ou tomber dans le piège qui consiste à reculer pour soi-disant mieux sauter ?
La France – et l’ensemble des pays européens – doivent dire halte aux fausses solutions ! Le chemin à suivre est celui d’une vraie transition énergétique, de la sobriété, de la modification de nos modes de consommation et de transport. La crise internationale actuelle nous invite à cesser sans délai la course en avant dans le domaine des énergies, quelle qu’en soit la source – et à rompre notre dépendance aux énergies fossiles d’où qu’elles proviennent.
Nous exigeons du nouveau gouvernement et de nos députées et députés qu’ils démontrent leur capacité à être à la hauteur des enjeux climatiques.
Ni fossiles, ni fissiles, ni ici ni ailleurs.
(1) La France s’était engagée à sortir progressivement du pétrole et du gaz, et à ne plus délivrer de permis d’exploration d’hydrocarbures sur le sol Français.
(2) Le gaz de couche se trouve dans les veines de charbon non exploitées et est difficilement accessible. Son extraction nécessite l’utilisation de techniques non conventionnelles.
Signataires :
350.org ; Greenpeace France ; Les Amis de la Terre France ; Les Amis de la Terre Pays-Viganais 30 ; Les Amis de la Terre 57 ; Fédération Lorraine Nature Environnement ; Fédération Flore 54 ; Vosges Nature Environnement ; La Voix de l’Arbre France ; Fondation Danielle Mitterrand (France Libertés) ; Aitec ; Attac France ; Attac Paris ; Attac Moselle ; Attac Romans ; Attac Mâcon ; Attac Périgueux ; Attac Alès Cévennes ; Attac 93 sud ; Attac Uzège (30) ; Attac 45 ; Attac 2 ; Attac 74 ; Alternatiba Nord Franche-Comté ; Alternatiba Rennes ; Lorraine Association Nature ; Vigilance Hydrocarbures France ; EDA Lille ; Eau Secours 62 ; GDEAM 62 ; Solidaires Moselle ; CRI-AC ! – Collectif Relais d’Informations et Actions Citoyennes 38 ; Association de préservation de l’environnement local 57 ; Non au gaz de schiste 74 Pays de Savoies et de l’Ain ; AMPER – Association pour la promotion des énergies renouvelables ; Collectif BASTAGAZ’ALES ; Consom’acteurs ; Association HIRRUS ; MAN Moselle ; Metz Marche pour le climat ; ADPSE – Association de défense contre la pollution Sarreguemines et environs ; Association l’Inventerre du pré vert-Dieuze-57 ; Association Quand On sème ; Collectif du lien et du bien ; GECNAL – Groupement d’Etude et de Conservation de la Nature en Lorraine ; Collectif nonaugazde schiste 91 ; Collectifs Stop au gaz de schiste en Rhône-Alpes ; Collectif de défense des bassins miniers Lorrains ; DenosMAINs ; Collectif Houille-ouille-ouille 59/62 ; Association La rêverie ; Association Le repère ; Sortons du nucléaire Moselle ; Comité mosellan de soutien à Bure ; A.L.M.E.C. ; Les Amis de la Confédération paysanne d’Alsace ; Collectif Alsace des luttes paysannes et citoyennes ; Air Vigilance ; Metz à Vélo ; Association STOP KNAUF ILLANGE-57 ; Comité de soutien Bure-Longwy ; Association Ginkgo Mon Amour ; Metz en Transition ; Stop Fessenheim ; Hêtre Vit Vent ; Ecologie & Démocratie ; Association de Défense de l’Environnement de Petite-Rosselle et Alentours ; Vervillages ; Association oiseaux-nature ; Entente pour la Défense de l’Environnement Nancéien ; ccarra National ; ccarra Lorraine ; collectif la Heide
Des contributions pour alimenter le débat, au sein de la gauche ou plus largement, et pour donner de l’écho à des mobilisations. Ces textes ne reflètent pas nécessairement la position de la rédaction.
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