Bouger avec The Movers

Contribuant notablement au bonheur des mélomanes depuis une quinzaine d’années, le label allemand Analog Africa exhume des joyaux musicaux rares ou inconnus, de préférence bien groovy, sortis durant les années 1960, 1970 ou 1980. Reflet des voyages fureteurs de son fondateur, Samy Ben Redjeb, le label n’a pas d’oreilles que pour l’Afrique mais butine aussi du côté de l’Amérique du Sud – en témoigne récemment par exemple Trujillo, Perú 1971-1974, compilation dédiée à Manzanita, grand manitou de la variante péruvienne de la cumbia.

Mise en circulation au cœur de l’été, la nouvelle production maison met à l’honneur The Movers. Impulsé à la fin des années 1960 par deux frères, le guitariste Oupa Hlongwane et le bassiste Norman Hlongwane, rejoints ensuite par d’autres musiciens, ce groupe sud-africain a remporté pendant la décennie suivante un succès considérable dans son pays, alors encore sous le joug de l’apartheid, jusqu’à conquérir les radios écoutées par la population blanche – une grande première pour une formation noire. Si le mbaqanga et le marabi, deux styles voisins ayant émergé en Afrique du Sud dans les années 1950-1960, irriguent en profondeur leur crépitante musique, celle-ci révèle aussi l’influence du rhythm’n’blues, du jazz ou du reggae.

Riche de quatorze morceaux, l’épatante sélection réalisée par Analog Africa se concentre sur la période 1970-1976 (considérée comme la plus féconde du groupe) et amène vite à constater que The Movers, fort bien nommés, ont une capacité redoutable à faire bouger qui les écoute. Côté instrumentaux se détachent notamment le carillonnant « Oupa is Back » et le fougueux « 2nd Avenue ». Côté chansons, « Balele », « Ku-Ku-Chi » et « Soweto Inn », hymne des révoltes anti-apartheid survenues à Soweto en juin 1976.

The Movers Vol. 1, 1970-1976, Analog Africa.