GUD, le retour d’une légende brune
Longtemps en sommeil, le Groupe union défense (GUD) a fait un retour symbolique la semaine dernière. Le réveil de l’organisation néofasciste arrive en pleine période de tentatives d’union à l’extrême droite radicale.
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Deux photos et un message laconique sur les réseaux sociaux : « GUD is back ». Pas besoin de développer plus pour le canal Telegram GUD Paris ou le compte Instagram associé : déjà, tous les groupuscules d’extrême droite radicale repartagent en masse l’information, historique pour ce milieu.
Le GUD, groupuscule d’extrême droite connu pour ses actions violentes, mais aussi pour son important rôle d’école de formation politique et idéologique dans cette frange de l’échiquier politique, vient de se reformer.
S’étant mis en sommeil en 2017 au profit du Bastion social, le GUD fait figure de quasi-légende pour les nationalistes et les identitaires de tout poil, tant il a été important pour ces mouvements durant près d’un demi-siècle. Et sa réactivation est plus que symbolique dans la dynamique qui se développe depuis quelques années dans les milieux néofascistes.
Né en 1968 à l’université Paris-II Panthéon-Assas, le GUD reprend la place laissée vide par la dissolution d’Occident, qui avait multiplié les actions violentes dans le Quartier latin à Paris au cours des années 1960.
Le groupe rassemble, et se positionne rapidement comme une des forces militantes majeures de l’extrême droite dès les années 1970, échappant à l’interdiction, contrairement à l’autre successeur d’Occident, Ordre nouveau, dissous en 1973 – le même jour que la Ligue communiste d’Alain Krivine, les deux groupes s’étant affrontés violemment autour de la salle de la Mutualité, à Paris, où les néofascistes tenaient alors meeting. Le GUD tente de se distancier du Front national de Jean-Marie Le Pen à ses débuts – le parti est fondé en 1972 –, mais cela ne dure guère.
Dans les années 1980, le GUD finit par s’en rapprocher étroitement, donnant naissance à ce qu’on appelle aujourd’hui la « GUD connexion » : de nombreux militants ou proches du RN y ont fait leurs premières armes, et son nouveau président, Jordan Bardella, en est proche.
Organe de radicalisation
En sommeil au début des années 2000, le GUD fait un premier retour en 2010, distribuant des tracts portant déjà le slogan « GUD is back » à Assas. Dans cette nouvelle génération de « gudards », on trouve quelques figures notables, comme Loïk Le Priol, mis en examen cette année pour l’assassinat en pleine rue à Paris du rugbyman Federico Martín Arramburú, mais aussi Logan Djian et Romain Bouvier, condamné avec Le Priol pour le passage à tabac de l’ancien président du GUD en 2015, Édouard Klein. Le GUD sert à nouveau d’organe de radicalisation et de formation à de nombreux militants néofascistes.
En 2017, en perte de vitesse, en particulier à cause du tabassage d’Édouard Klein, il se remet en sommeil, au profit du Bastion social, cette fois dans de nombreuses villes – à commencer par Lyon. À Paris, son héritier est un groupuscule ultraviolent qui abandonne toute velléité de façade légale, au contraire du GUD historique qui se présentait notamment aux élections étudiantes : les Zouaves Paris (ZVP). Depuis, le Bastion social et les Zouaves ont été dissous, respectivement en 2019 et en 2022.
Actuellement, les groupuscules d’extrême droite radicale se multiplient très rapidement en France, malgré des vagues d’interdictions qui se révèlent assez inopérantes : le Bastion social et Génération identitaire (dissous en 2021) sont tous deux revenus sous d’autres noms et faux nez. Les ZVP se sont faits plus discrets : quelques posts mettant en avant un « Loutre gang » sur les réseaux néofascistes semblent présenter ce groupe comme la relève des ZVP.
Confirmant l’inefficacité des dissolutions, la dynamique est au recrutement et à l’expansion pour l’extrême droite radicale, portée aussi par les victoires politiques du RN et l’arrivée de Reconquête sur l’échiquier politique. Avec un mouvement très porteur : la Cocarde étudiante, qui recrute et se radicalise, tout en fournissant cadres « jeunesse », candidats et assistants parlementaires au Rassemblement national. De nombreux dirigeants de la Cocarde ont d’ailleurs célébré, sur les réseaux sociaux, l’annonce du retour du GUD.
Coagulation
Au sein de ce néo-GUD, qui ne compterait à ce jour qu’une trentaine de membres, on peut déjà identifier plusieurs archétypes, à commencer par les anciens des ZVP : Marc de Cacqueray-Valmenier, leader des Zouaves Paris, fait partie des tout premiers abonnés du compte Instagram du néo-GUD, déjà condamné à de multiples reprises pour violences.
À ses côtés, des nationalistes issus des Zouaves, d’autres membres de Luminis et Auctorum – des rejetons du Bastion social –, des identitaires, mais aussi, selon plusieurs sources bien renseignées, des proches de l’organisation royaliste Action française, dont Marc de Cacqueray-Valmenier a fait partie dans les années 2010.
Si, pour le moment, ce néo-GUD a uniquement déployé une banderole de soutien aux nazis grecs d’Aube dorée et peint une fresque en hommage à un fasciste madrilène ayant tué un antifasciste en 2007, ce retour est éminemment symbolique dans le contexte actuel : c’est celui d’une organisation d’extrême droite non seulement ultraviolente, mais aussi transversale, qui pourrait faire office de coagulant, alors que les liens politiques de groupes autrefois très distants sont de plus en plus resserrés.