« Live in Cuxhaven 1976 » de Can : un peu court
Dans la lignée de deux lives de 1975 sortis l’an dernier paraît un nouvel extrait inédit des archives de Can, avec un enregistrement scénique de 1976.
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Live in Cuxhaven 1976 / Can / (Spoon Records, Mute).
Can s’est séparé en 1979 pour ne se reformer que très brièvement dans la seconde moitié des années 1980. Trois des quatre membres de ce groupe exceptionnel sont aujourd’hui disparus. Mais des albums d’inédits paraissent régulièrement à l’initiative du seul survivant, Irmin Schmidt, qui tenait les claviers. Ce sont en général des bandes de concert passionnantes.
Le dernier en date, Live in Cuxhaven 1976, a été enregistré au début d’une année qui, pour Can, est celle de la parution de l’album Flow Motion, particulièrement déconcertant, pour ne pas dire décevant par rapport à ce qui avait précédé. Celui aussi qui marque l’entrée du groupe dans la dernière période de son existence, beaucoup moins créative.
Néanmoins, on sait également qu’il n’était pas dans l’esprit d’un groupe très porté sur l’improvisation de reproduire sur scène ce qu’il enregistrait sur disque. Ce que confirment les quatre compositions figurant ici, dont l’absence de titres symbolise à elle seule la démarche.
Masse de son
Étrangement, l’enregistrement semble avoir été lancé alors que le concert était déjà commencé. On est directement happé par cette masse sonore convulsive, lourde, compacte et furieuse, créée par une batterie brutale et hypnotique et une basse noire comme du charbon, que percutent les zébrures métalliques de l’orgue et les flashs criants de la guitare.
On entend un groupe encore capable par moments de s’élever à son plus haut niveau, ce qu’illustre au mieux la troisième pièce, qui semble jeter un pont entre un passé psychédélique et un futur industriel. Mais on entend aussi, en creux, la dimension vocale qui manque à Can depuis le départ, en 1973, du chanteur Kenji « Damo » Suzuki. N’ayant jamais réussi à le remplacer, Can a été amené à privilégier les compositions instrumentales ou à confier les vocaux, plus rares, au guitariste Michael Karoli, sans jamais parvenir à combler le vide.
Sans nier l’intérêt d’un document qui rappelle ce que Can produisait sur scène, on reste sur sa faim à cause de sa brièveté (à peine 30 minutes). D’autant plus qu’il s’agit d’un groupe dont on sait l’importance de la durée sur sa musique. Le choix de publier un concert tronqué d’au moins ses deux tiers plutôt qu’une prestation complète est on ne peut plus étonnant.