Macron, sans pression
Selon Le Monde, le président, en faisant expulser 44 rescapés du navire humanitaire Ocean Viking, afficherait, sous pression des droites réactionnaires, sa fermeté… Ce qui ferait de lui, « en même temps » un héros de la lutte contre l’extrême-droite. Magique !
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La semaine dernière, Le Monde, quotidien vespéral dit« de référence », a mis en ligne sur son site un article dont le titre était : « Immigration : sous pression de la droite et de l’extrême droite, Macron veut afficher sa fermeté ».
Selon les auteures de ce dense papier, le chef de l’État français et « le gouvernement » se trouvaient alors « sur la défensive », car les droites réactionnaires (unies encore une fois dans la xénophobie) leur faisaient reproche de s’être enfin décidés à accueillir l’Ocean Viking – ce bateau, chargé de 234 migrant·es secouru·es par l’ONG SOS Méditerranée, qui avait erré en mer pendant trois semaines avant d’être finalement autorisé, le 11 novembre, à accoster à Toulon.
Nous savons comment Emmanuel Macronet ses affidé·es se sont sorti·es de ce mauvais pas : quelques jours après qu’Olivier Véran, porte-parole du gouvernement, avait déclaré avec des trémolos dans la voix que « la France » s’était grandie en accueillant ces migrant·es – car, avait-il expliqué, « nous ne pouvions pas mettre en danger des femmes, des hommes et leurs enfants » –, Gérald Darmanin, ministre de l’Intérieur, s’est quant à lui fait une gloire de trompeter devant l’Assemblée nationale, et dans un premier temps, que 44 rescapés de l’Ocean Viking allaient être promptement expulsés du territoire français.
Puis, dans un second temps, ses services ont fièrement proclamé que, « sur les 234 migrants rescapés, 123 font l’objet d’un refus d’entrée sur le territoire en France ».
Dans la vraie vie, quand Macron gouverne à l’extrême droite, c’est parce qu’il le veut bien. Parce que ça lui plaît.
C’est ce que Le Monde appelle « afficher sa fermeté sous la pression de la droite et de l’extrême droite ». Car, comme l’explique Gérard Collomb, ancien ministre « « « socialiste (1) » » » de l’Intérieur, complaisamment cité par le journal du soir : si Macron « n’a pas une ligne ferme maintenant, Marine Le Pen passera la prochaine fois ! ».
Abracadabra ! Par la magie de ces mots écœurants, Emmanuel Macron, qui a bien sûr avalisé l’expulsion de plus de la moitié des migrant·es dont Olivier Véran déclamait quelques jours plus tôt que la France ne pouvait bien sûr pas les « mettre en danger », devient un héros de la résistance à l’extrême droite : si ce pauvre président a dû se résoudre à ce triste dénouement, c’est pour l’excellente raison qu’il souhaite empêcher qu’une Pen soit élue en 2027.
Si ce pauvre président cède à la pression de la droite et de l’extrême droite, c’est bien évidemment pour les contrer – what else ?
Dans la vraie vie, bien sûr, quand Macron gouverne à l’extrême droite, c’est parce qu’il le veut bien. Parce que ça lui plaît.
D’ailleurs – l’as-tu remarqué ? –, jamais la pression de la gauche et de l’extrême gauche ne l’a fait renoncer à l’une des révoltantes « réformes » antisociales par lesquelles il prend aux pauvres pour donner aux riches – et si ça se trouve, même Le Monde finira par s’en apercevoir.
(1) Je l’écris volontairement avec beaucoup de guillemets.
Sébastien Fontenelle est un garçon plein d’entrain, adepte de la nuance et du compromis. Enfin ça, c’est les jours pairs.
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