Charles Lloyd : le saxo de la paix
Deux albums aux ambiances très différentes mais emplies de sérénité viennent clore le triptyque publié cette année par le saxophoniste et flûtiste.
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Ocean et The Sacred Thread / Charles Lloyd / Blue Note/I See Colors.
Particulièrement actif à 84 ans, le saxophoniste et flûtiste Charles Lloyd aura fait paraître en quelques mois trois albums enregistrés avec trois trios distincts. En juin dernier, c’était Chapel, enregistré dans une chapelle au Texas avec le guitariste Bill Frisell et le batteur Thomas Morgan. Les deux autres arrivent tout juste, dans des registres très différents.
Ocean, qui réunit Charles Lloyd, le guitariste Anthony Wilson et le pianiste Gerald Clayton, porte bien son titre. La musique, nimbée d’une douce lumière, coule d’un piano romantique aux notes scintillantes et d’un saxophone ténor dont on reconnaît le lyrisme chaleureux.
C’est aussi un art de l’effleurement, spécialement dans les trois plus réussies des quatre longues compositions. De la mélodie également, qu’elle jaillisse du saxophone ou de la flûte. De la délicatesse enfin, même dans les passages où le trait est un peu plus forcé. Il se termine sur une courte phrase de saxophone susurrée alors que s’éteignent les dernières notes de piano comme des bougies arrivées au terme de la nuit.
Paix intérieure
Sacred Thread apporte une tout autre ambiance. Enregistré avec le joueur de tabla Zakir Hussain, connu notamment pour avoir participé avec Ravi Shankar et John McLaughlin à l’aventure de Shakti, et le guitariste Julian Lage, il propose une musique qui joue sur les temps pour s’approcher du silence.
Musique méditative qui rappelle l’intérêt de Charles Lloyd pour la méditation transcendantale, qu’il a découverte dans les années 1970 par l’intermédiaire de ses amis des Beach Boys, Al Jardine et Mike Love. Le titre de l’album renvoie à la religion hindoue et plusieurs compositions évoquent des figures mythiques comme la déesse Saraswati ou le poète et philosophe Rûmî.
Zakir Hussain, aux tablas et au chant, dans un registre situé entre la plainte et l’appel à la prière, est la figure centrale du disque. Les autres instruments, la guitare, la flûte nuageuse et le saxophone de Charles Lloyd, sont au diapason d’une démarche qui se rapproche moins de l’aspiration à l’élévation du spiritual jazz que de la recherche d’une paix intérieure.