Nitrites : Yuka gagne une bataille contre l’industrie charcutière

La cour d’appel d’Aix-en-Provence estime que l’application de classement des produits alimentaires exerce un « droit d’alerte légitime en matière de risque sanitaire ».

Zoé Neboit  • 13 décembre 2022
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Nitrites : Yuka gagne une bataille contre l’industrie charcutière
L’enjeu est de parvenir à une interdiction pure et simple des nitrates, pour Yuka, la Ligue contre le cancer et l’ONG Foodwatch.
© Yuka

C’est une première victoire judiciaire dans la guerre des nitrites, et pas des moindres. L’application Yuka, qui classe les produits alimentaires en fonction de leur impact sur la santé, a gagné le 8 décembre l’un de ses procès en appel contre l’industrie charcutière.En 2021, la Fict (Fédération des industriels charcutiers-traiteurs) et deux entreprises – ABC Industries et Le Mont de la Coste – attaquaient Yuka en justice dans trois tribunaux différents pour pratiques commerciales trompeuses et dénigrement.

L’opinion de Yuka sur les produits de charcuterie relève d’un débat d’intérêt général.

En cause : la mention « cancérogène » associée aux viandes nitritées, c’est-à-dire celles comprenant les additifs E249, E250, E251 et E252 utilisés comme des conservateurs, colorants et antiseptiques. Et malgré la densité de la littérature scientifique pointant ce danger, Yuka est condamnée à chaque fois à verser plusieurs dizaines de milliers d’euro d’amende et changer son système de notation. La décision de la cour d’appel d’Aix-en-Provence annonce toutefois un changement de donne. Elle reconnaît que « l’opinion de Yuka sur les produits de charcuterie relève d’un débat d’intérêt général » et qu’elle « exerce son droit d’alerte en matière de risque sanitaire ».

Lien entre nitrites et cancer

Comment expliquer ce retournement de situation ? L’application a été jugée en première instance dans des tribunaux de commerces, autrement dit des tribunaux consulaires. « On n’a pas forcément été jugés par les bonnes personnes », ironise Julie Chapon sa cofondatrice. Parmi les magistrats, on trouvait par exemple Roland Cuni, administrateur jusqu’en 2016 de Desialis… spécialisé dans l’alimentation des porcs d’élevage, ou Patrick Anselmo, ancien directeur chez Carrefour.

Avec cette décision en appel le lobby charcutier, qui est parvenu à maintenir le doute sur la dangerosité de ces additifs des décennies durant, voit son pouvoir s’affaiblir. En juillet, l’ANSES, l’agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail, a confirmé dans un rapport le lien entre ingestion de viande nitrée et cancer. Pourtant, ces produits sont encore en vente dans tous les supermarchés. L’enjeu maintenant est donc de parvenir à une interdiction pure et simple, rappellent Yuka, la Ligue contre le cancer et l’ONG Foodwatch dans un communiqué commun.

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Santé
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