Ma grève de la faim, pour la dignité de chacun

Vendeur au Castorama de Lampertheim, près de Strasbourg, Xavier Gaspard a fait une grève de la faim pendant douze jours en mars. Il témoigne.

Politis  • 5 avril 2023
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Ma grève de la faim, pour la dignité de chacun
© Stanislav Vlasov / Unsplash.

Vendeur au Castorama de Lampertheim, près de Strasbourg, Xavier Gaspard a fait une grève de la faim pendant douze jours en mars pour protester contre les bas salaires des employés de l’enseigne, et attirer le regard sur leur situation de précarité grandissante. Des employés du magasin avaient, en février, occupé leur lieu de travail une nuit pour réclamer des hausses de salaire.


Dans un contexte économique difficile, où les inégalités sont de plus en plus criantes, les travailleurs sont souvent les premiers à en subir les conséquences. Dans cette société où la précarité grandit de jour en jour, certains de mes collègues ne mangent plus à leur faim, ils doivent sauter des repas ou prendre des crédits pour remplir leur frigo, voire vivre dans leur voiture faute de moyens pour se loger. J’ai voulu dénoncer cette situation et mettre en lumière la réalité vécue par certains salariés, rendre visible l’invisible.

Moi, Xavier Gaspard, vendeur peinture et délégué syndical CGT Castorama Strasbourg, j’ai décidé, le lundi 13 mars 2023, de faire une grève de la faim et de dormir chaque nuit dans ma voiture sur le parking de mon magasin afin de mettre en lumière cette précarisation de plus en plus importante. De nos jours, les travailleurs ne devraient pas avoir à vivre dans la pauvreté, avoir du mal à payer leurs factures, avoir à se priver de nourriture !

Le choix de la grève de la faim est un acte radical qui montre l’urgence sociale et salariale.

Avec 1 400 euros net de salaire pour treize ans d’ancienneté, je n’arrive moi-même pas à subvenir à mes besoins les plus élémentaires. Cette situation n’est pas isolée, et de nombreux travailleurs en France ont des difficultés à joindre les deux bouts, à se nourrir convenablement et à se loger décemment. Le choix de la grève de la faim est un acte radical qui montre l’urgence sociale et salariale. J’ai voulu, par cette action symbolique, que la direction arrête de détourner le regard et prenne conscience de la détresse de ses salariés.

Ma grève de la faim est un cri du cœur pour la dignité de chacun. J’ai su, pendant les 12 jours et 11 nuits de mon action, attirer l’attention sur une situation qui est souvent négligée ou ignorée par la société. Rendre visible l’invisible, un message, mon message, repris par tous les médias, à la radio, et surtout par le bouche-à-oreille des travailleurs, sur le fait qu’un salarié de Castorama a décidé de faire entendre sa voix pour ceux qui ont du mal à vivre avec un salaire insuffisant. Un acte fort face à une situation qui ne cesse, avec cette inflation folle, de se dégrader.

Au bout de 12 jours de grève de la faim, j’ai reçu par mail un retour de la direction générale de Castorama, une réunion pour le lundi suivant qui, en fin de compte, n’aura rien donné. Mais je suis fier de ce que j’ai accompli, même si cela a été très difficile.

Pendant 12 jours et 11 nuits, j’ai été soutenu par des collègues, des clients, des militants, et j’ai su attirer l’attention sur la situation des travailleurs de toutes branches qui peinent à vivre avec un salaire insuffisant. Mon message, au départ ciblé sur les salariés de Castorama, est devenu au fil des jours un message universel. J’ai reçu de très nombreux témoignages et soutiens de toute la France. Et cela m’a donné la force de tenir bon.

Cette action contribuera à faire avancer la cause des travailleurs précaires.

Je suis heureux d’avoir réussi à faire passer mon message, d’avoir rendu visible l’invisible et suscité l’empathie et la solidarité de tant de personnes. Je suis convaincu que cette action aura des retombées positives et qu’elle contribuera à faire avancer la cause des travailleurs précaires.

Nous devons tous nous engager pour faire entendre notre voix, pour dénoncer les injustices et pour défendre la dignité de chacun. Je suis fier d’avoir fait partie de cette lutte inédite et je continuerai à me battre pour les travailleurs de Castorama et pour tous ceux qui sont victimes de la précarité.

Ensemble, nous pouvons changer les choses et construire un monde plus juste et plus solidaire. 

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Publié dans
Carte blanche

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