Démission du maire de Saint-Brevin : à qui la faute ?
Yannick Morez a annoncé qu’il démissionnait de ses fonctions et déménageait, suite aux attaques de l’extrême droite. Il y a deux mois, l’incendie de sa maison aurait pu lui coûter la vie. L’exécutif n’a jamais daigné le soutenir.
Des attaques « indignes ». C’est le terme choisi par Emmanuel Macron ce jeudi en fin de matinée dans un tweet aussi tiède que tardif, suite à la démission du maire de Saint-Brevin-les-Pins, victime d’attaques de l’extrême-droite suite au projet de déplacement d’un centre pour demandeurs d’asile. Alors que le pays découvrait au réveil l’information, le chef de l’État et son gouvernement se réveillaient, eux, timidement d’une longue léthargie.
Souvenez-vous : dans la nuit du 22 au 23 mars dernier, le domicile et les véhicules de Yannick Morez avait été les cibles d’un cocktail Molotov. L’édile et son épouse s’en étaient sortis indemnes. De justesse. Un mois et demi après, Yannick Morez a non seulement choisi de démissionner, mais a également annoncé vouloir déménager hors de la petite ville de Loire-Atlantique, dans laquelle il vit depuis 32 ans.
À qui la faute ? Dans ses réactions ce matin, la Macronie, embarrassée, tourne autour du pot et noie le poison dans la trouble soupe des « violences contre les élus ». Ainsi, selon Aurore Bergé, présidente du groupe Renaissance à l’Assemblée, invitée sur France Inter, la décision du maire pose « plus largement la question de la protection des élus et de l’habitude qui a été prise de cette forme de violence, de ces insultes et menaces que malheureusement la quasi-totalité des élus de la République reçoive ».
Alors que, place Beauvau, du côté de Gérald Darmanin – sans doute trop occupé à peaufiner sa loi immigration présentée d’ici à juillet – le silence se fait (toujours) lourd, le président de la République comme la Première ministre ont condamné les « attaques » subies par le maire, mais sans réussir toutefois à en nommer l’origine.
Depuis l’île de La Réunion, Élisabeth Borne s’est même fendue d’un glaçant relativisme moral en dénonçant seulement la « montée de l’extrémisme dans notre pays ». « L’extrémisme, il vaut des deux côtés », a-t-elle précisé. Nul ne peut toutefois croire que le gouvernement ignore que la municipalité de Saint-Brevin est devenue en quelques mois, comme Callac, une des cibles choyées par l’extrême droite, jusqu’au 29 avril dernier encore.
Élisabeth Borne s’est fendue d’un glaçant relativisme moral.
Depuis le projet de déplacement d’un centre d’accueil pour demandeurs d’asile (Cada) près d’une école, les groupuscules identitaires, aidés de militants de Reconquête et du Rassemblement national, sèment la terreur dans cette ville en majorité favorable au projet. Et pourtant, jusque-là, pas un seul mot de soutien de l’exécutif n’a été prononcé pour soutenir les collectifs locaux et Yannick Morez.
Alors, après ce terrible symbole, le président de la République s’est-il empressé de décrocher son téléphone, comme il l’avait fait lorsque Eric Zemmour avait été insulté dans la rue ou quand le restaurant la Rotonde – qu’il aime tant – a vu sa devanture être brûlée ? Non. Mais rassurez-vous : Élisabeth Borne a demandé à la ministre chargée des Collectivités territoriales, Dominique Faure, de « contacter le maire » pour montrer la « volonté [du gouvernement] de mieux protéger des maires ». Ouf, on aurait presque pu croire à de l’indifférence !
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