En grève, des salariés de Vertbaudet violemment réprimés

Dans le Nord, une centaine de salariés de Vertbaudet entament leur 9e semaine de grève. À leurs demandes d’augmentation de salaire, l’entreprise oppose la violence.

Rose-Amélie Bécel  • 17 mai 2023
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En grève, des salariés de Vertbaudet violemment réprimés
Des employés de la marque de vêtements Vertbaudet dégagent l'accès à leur entrepôt de Marquette-lez-Lille, le 16 mai 2023.
© DENIS CHARLET / AFP.

Depuis presque deux mois, 80 salariés de Vertbaudet – entreprise de vente de vêtements en ligne pour enfants –, sont en grève devant l’entrepôt logistique de l’entreprise à Marquette-Lez-Lille, dans le Nord, pour réclamer une hausse de salaire de 20 %. « Les salariés de l’entreprise, des femmes pour une écrasante majorité, sont payés au SMIC et sont souvent à temps partiel. À la fin du mois, ça fait une fiche de paye à seulement trois chiffres », explique Sylvie Vachoux, secrétaire fédérale à la CGT commerce et services.

Alors que les interventions policières se multiplient pour évacuer le piquet de grève, une nouvelle étape dans l’intimidation des grévistes a été franchie mardi soir. Selon un communiqué de la CGT Vertbaudet, un de leurs délégués syndicaux a été interpellé à son domicile et agressé par des policiers en civil : « Ils l’ont copieusement gazé, frappé, et lui ont craché à la figure. » Embarqué dans un véhicule banalisé, il a finalement été relâché dans une autre commune, sans son portefeuille.

À ce stade, impossible de savoir si les agresseurs étaient de véritables policiers. Mais ce nouvel épisode de violence ne surprend pas les syndicalistes mobilisés sur place. « Ça fait deux mois que les salariés mobilisés subissent des humiliations quotidiennes. La direction refuse l’augmentation des salariés et envoie la police », dénonce Sylvie Vachoux.

Contacté, l’homme, encore sous le choc, indique ne pas vouloir porter plainte. « Je ne crois plus en la justice », confie-t-il. La CGT, de son côté devrait le faire, selon nos informations.

Arrestations violentes

Lundi 15 mai, deux syndicalistes de l’union locale de la CGT de Tourcoing ont été arrêtés et placés en garde à vue, alors que la police évacuait le blocage de l’accès aux camions sur le site de l’entrepôt. L’union départementale du syndicat a annoncé porter plainte pour des faits de violence. Selon Streetpress, l’arrestation d’un des deux hommes aurait été filmée : sur la vidéo, on le verrait chuter et subir un placage ventral.

Ça fait deux mois que les salariés mobilisés subissent des humiliations quotidiennes.

Dans le même article de Streetpress, une gréviste annonce également son intention de porter plainte. Mardi 16 mai, lors d’une nouvelle évacuation policière, elle raconte avoir été attrapée par le cou et soulevée du sol par un CRS. Transportée aux urgences, les médecins lui ont prescrit quatre jours d’ITT.

Au micro de France Inter ce mercredi matin, la secrétaire générale de la CGT Sophie Binet a assuré qu’elle relayerait la parole des grévistes de Vertbaudet auprès d’Élisabeth Borne : « Je vais lui demander immédiatement de cesser toutes les poursuites contre les grévistes et d’ouvrir une médiation. »

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