Info Politis : l’exécutif veut déployer le SNU dans les lycées
Dès septembre prochain, tous les enseignants au lycée pourront déposer une candidature pour que leur classe réalise un séjour de cohésion de 12 jours, en uniforme et sur temps scolaire.
Nouveau chapitre dans la longue histoire controversée du service national universel. Après l’obligation promise par Emmanuel Macron dans Le Parisien, fin avril, puis les nuances apportées par la secrétaire d’État chargée du SNU, Sarah El Haïry, quelques jours plus tard, c’est un projet inédit que le gouvernement vend aux syndicats depuis le début de la semaine.
D’après nos informations, afin d’aller progressivement vers la généralisation du SNU, l’exécutif souhaite lancer une forme de « volontariat collectif » avec la création de « classes d’engagement » thématiques dans les lycées. Ce dispositif s’ajoutera à la forme actuelle du SNU, basée sur le « volontariat individuel » des jeunes.
Traduction : tous les enseignants ou chefs d’établissement des lycées pourront répondre à un appel à projet, dès septembre prochain, pour obtenir ce label sur la base d’un programme pédagogique qu’ils auront préparé. Ce projet devra être présenté en conseil d’administration de l’établissement concerné.
Douze jours sur le temps scolaire
Une fois ce label reçu, les élèves de seconde d’une ou de plusieurs classes du lycée réaliseront les douze jours de séjour de cohésion sur le temps scolaire. Les professeurs à l’initiative de cette classe « d’engagement » seront, eux, récompensés financièrement grâce au « Pacte » que le chef de l’État annonçait le 20 avril. Ils pourront aussi accompagner leur classe pendant une partie du séjour de cohésion.
À ce stade, le gouvernement songe à la possibilité, pour les jeunes, de refuser de participer à ces séjours de cohésion. Ceux qui acceptent cette option seront, eux, récompensés sur Parcoursup. « On sent que l’Élysée a dit à ses équipes : ‘gardez le SNU coûte que coûte, mais en gommant ce qui est le plus critiqué, à savoir l’obligation », explique une source proche du dossier. « Le tout, pour que le SNU puisse être développé plus tard, sans faire de vague ». Contacté, le cabinet de Sarah El Haïry n’a pas répondu à nos sollicitations à l’heure où nous publions.
Les séjours de cohésion fonctionneront sous le même modèle que le SNU actuel : un encadrement partagé entre des personnels de l’Éducation nationale, de l’Éducation populaire et des anciens militaires. Le maintien de gradés dans le dispositif interroge, alors que l’attitude de certains d’entre eux est dénoncée par de nombreux syndicats et des politiques, notamment suite à nos révélations sur des cas de violences sexistes et sexuelles.
Militarisation du lycée
Lors de ce SNU 2.0, les élèves continueront de porter l’uniforme. Ils participeront à la levée des couleurs et chanteront La Marseillaise chaque matin. Tous les frais engagés par le séjour (transport, séjour, projet pédagogique) seront pris en charge par l’Éducation nationale et non par l’établissement. « Quand on pense que les enseignants galèrent des semaines à financer leurs voyages scolaires… », grince-t-on du côté des professeurs, outrés que cette « lubie du président » soit prioritaire par rapport aux autres programmes pédagogiques.
En revanche, contrairement aux séjours de cohésion actuels, les cohortes de jeunes ne seront pas éclatées sur tout le territoire. Dans cette nouvelle version, ce sont les classes entières qui seront concernées par ces douze jours d’engagement. Une nouveauté qui remet en question la promesse de mixité sociale rabâchée par Sarah El Haïry pour vanter les qualités du SNU.
Cette nouvelle étape sur la voie de la généralisation impose un grand défi logistique. Une problématique qui sera la charge notamment des services départementaux à la jeunesse, à l’engagement et aux sports. Ce sont ces services qui gèrent le moindre imprévu technique avec les centres SNU. En avril, des horaires de trains décalés et des bus qui ne sont jamais venus ont contraint des dizaines de mineurs de la zone B à trouver, dans l’urgence, une solution de repli. Ces difficultés vont-elles se multiplier avec ces nouvelles « classes d’engagement » ?
Au-delà de l’organisation, c’est l’influence de l’armée dans les établissements scolaires qui inquiète une syndicaliste reçue par Sarah El Haïry, cette semaine. Elle regrette une « militarisation du lycée ». « C’est moins l’Éducation nationale qui entre dans l’armée que la discipline militaire et sa symbolique qui s’immiscent dans l’Éducation nationale », conclut-elle.
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