Plan « Logement d’abord 2 » : des « miettes » selon les associations
Il y a une semaine, le ministre du Logement Olivier Klein a présenté aux acteurs de la solidarité le plan « Logement d’abord 2 » qui prévoit de lutter contre le sans-abrisme. Un plan à court terme, pas à la hauteur selon les associations.
Alors que mardi 13 juin se déroulait l’hommage aux 611 morts de la rue en 2022, le deuil aurait pu s’accompagner d’une lueur d’espoir. Mardi 20 juin, le ministre du Logement Olivier Klein a présenté aux acteurs de la solidarité le plan « Logement d’abord 2 » qui prévoit une augmentation de 160 millions d’euros du plan « Logement d’abord 1 ». Soit, jusqu’en 2027, 516 millions d’euros alloués à la réinsertion des personnes sans domicile. Ce budget est planifié sur l’ensemble du quinquennat avec, d’ici à la fin de l’année, 44 millions d’euros de budget en plus suivi par des augmentations annuelles de 29 millions d’euros.
Le « Plan quinquennal pour le logement d’abord et la lutte contre le sans-abrisme », aujourd’hui appelé « Logement d’abord 1 », crée en septembre 2017, était déjà loin d’avoir fait l’unanimité sur le terrain. Un bilan qui n’est pas à la hauteur de ses engagements : 7 200 places ont été créées en pension de famille sur les 10 000 prévues et 122 300 logements pour des ménages sans domicile ont été attribués. Son objectif était, d’après le ministre actuel, de « changer de paradigme. Stopper cette boucle infernale qu’est la rue, l’hébergement d’urgence, puis le retour à la rue. » En écoutant Olivier Klein s’enorgueillir d’avoir sorti 440 000 personnes du mal-logement durant le précédent quinquennat, les acteurs associatifs lèvent les yeux au ciel. Ils savent que derrière des premières mesures « utiles et nécessaires », se cache une insuffisance. Manuel Domergue, directeur des études de la fondation Abbé-Pierre, admet que « nous soutenons les mesures qui veulent faire avancer les choses. Et avec le plan “Logement d’abord 1”, nous voyons quelques améliorations. » Les associations de solidarité peuvent en citer notamment deux : « l’augmentation du nombre d’attributions HLM aux personnes sans domicile et une relance de la production de pensions de famille et d’intermédiation locative ». Pourtant Manuel Domergue soupire : « La situation s’est gravement détériorée ».
Douche froide et colère
Aujourd’hui, on compte 2,4 millions de ménages en attente de logement social, 6 000 demandes non pourvues chaque soir au 115 et 330 000 personnes sans domicile. Au lancement du plan « Logement d’abord 1 » en 2017, ils étaient 147 000. Une augmentation du sans-abrisme causée par plusieurs facteurs : inflation et problème d’accueil des personnes exilées en priorité. Ces dernières, souvent en situation irrégulière, se retrouvent dans l’impossibilité d’être éligibles à des hébergements d’urgence et encore moins pérennes. En 2012, 53 % des sans-abri n’étaient pas de nationalité française. Une situation ayant pour conséquence le refuge des exilés dans des squats, comme celui de la rue Erlanger à Paris. « La société se précarise et ce n’est pas pris en compte », explique Manuel Domergue. C’est donc avec beaucoup d’attentes et une situation sur le terrain très tendue que les acteurs de la solidarité ont découvert le plan d’Olivier Klein. Premières impressions ? Pour Manuel Domergue, « Logement d’abord 2 » est fait « de contradictions » et « de zones de flous ».
Bien que l’objectif des plans « Logement d’abord » soit de sortir « de cette boucle du logement à la rue », la priorité du gouvernement est mise sur les hébergements d’urgence, sans penser au long terme. « Un point crucial » qui « inquiète » Manuel Domergue. Car même si le second plan prévoit l’ouverture de 10 000 places en plus dans les pensions de famille et la mise en place du projet « un chez soi d’abord » qui se veut être un accès direct au logement depuis la rue, c’est « insuffisant ». D’après une étude de l’Observatoire de l’immobilier neuf, 449 298 logements doivent sortir de terre chaque année pour répondre aux besoins. Au cours des douze derniers mois, 359 200 chantiers de nouveaux logements ont été commencés. Une baisse de 8 % par rapport à la période 2021-2022. En tout, le plan « Logement d’abord 2 », prévoit la création de 100 000 logements « très sociaux », (PLAI) dans le quinquennat, loin des 40 000 par an annoncés et « très loin » des précautions demandées par les associations.
Ce plan ne remplacera jamais une vraie politique du logement.
Sur le plan financier, c’est aussi la douche froide. « Ils nous proposent des sommes ridicules » confie Manuel Domergue, qui poursuit : « “Logement d’abord 2” nous aidera à couvrir l’inflation, mais nous n’aurons pas de marge, pas de fonds supplémentaire. C’est le minimum. » Dans leur communiqué de presse, les associations présentes à la réunion mettent en garde contre le risque « d’une dégradation de l’accompagnement social » à cause du « manque de moyens des associations » dû à l’inflation. Rempli d’inquiétudes, il s’empresse de dresser ses remarques au ministre : « Moins 4 milliards d’aide aux APL, des baisses de productions de logements sociaux et une loi anti-squat qui va faciliter les expulsions locatives, c’est aussi ça votre politique du logement ! ». Il restera sans réponse. Alors qu’Olivier Klein voulait lutter contre une « bombe sociale », il allume une mèche et attise la colère des acteurs du secteur associatif. En repartant du ministère, ils se disent déçus de « récupérer des miettes » sachant « que ce plan ne remplacera jamais une vraie politique du logement. »
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