« 100 jours » après : 30 moments-clés (garantis sans apaisement)
Alors que le président de la République, au lendemain de la promulgation de la réforme des retraites, s’était donné « 100 jours » pour apaiser le pays et relancer son quinquennat, Politis a compilé trente épisodes qui démontrent l’échec cuisant de cet objectif. Recension non-exhaustive.
30. L’exfiltration de Pap Ndiaye à la Gare de Lyon
On commence ce top 30 doucement. Nous sommes au septième jour de l’apaisement. Depuis la promulgation de la très contestée réforme des retraites, les rassemblements spontanés s’enchaînent un peu partout en France. Souvent à grand renfort de casserolades et autres inventivités militantes. Ce 24 avril, le mot circule sur les réseaux sociaux : Pap Ndiaye, ministre de l’Education nationale, arrive en début de soirée à la Gare de Lyon, à Paris. Il revient d’un déplacement à Lyon où il s’est déjà fait chahuter par de nombreux manifestants. À l’arrivée de son train, des centaines de personnes l’attendent, casseroles en main. Pap Ndiaye refuse de sortir du train et se fait exfiltrer par les sous-sols de la gare parisienne. Apaisant, presque.
29. Les visites annulées de ministres
On n’a pas tous pu les compiler parce qu’on aurait éclaté notre top 30. Du coup, on a rassemblé les moins significatifs ici. Après la promulgation de la réforme des retraites, Emmanuel Macron avait demandé à ses ministres de retourner sur le terrain, notamment en région. On peut dire qu’il a eu du flair. À chaque déplacement, les ministres ont reçu des comités d’accueil faits de slogans anti-Macron, de casserolades ou de coupures d’électricité. Au point que certains d’entre eux ont renoncé à leur visite. Comme, par exemple, la ministre chargée de l’enseignement et de la formation professionnelle, Carole Grandjean, qui a annulé une visite à Toulouse, ou le ministre des Armées, Sébastien Lecornu, qui a renoncé à venir en Loire-Atlantique pour un déplacement chez Naval group Indret.
28. Confisquer les cartons rouges pour la finale de la Coupe de France
Apaisement, jour 12. Pour montrer sa grande ouverture à la critique, Emmanuel Macron, lancé dans un tour de France de la réconciliation, fait étape au Stade de France. Mais la finale de la Coupe de France, grand rassemblement populaire, tourne à son grand désarroi en nouvelle manifestation contre la réforme des retraites. Heureusement, pour éviter à tout prix de politiser le sport, l’action de la CGT est interdite et tous les cartons rouges distribués aux abords du stade en guise de protestation sont confisqués.
27. Narendra Modi invité d’honneur du 14 juillet
Quoi de mieux qu’accueillir un ami des droits de l’Homme pour célébrer la fête nationale ? Ce 14 juillet, pour fêter ces 100 jours d’apaisement rondement menés, Emmanuel Macron a choisi de mettre à l’honneur un invité de marque : Narendra Modi. Il faut dire que le Premier ministre ultranationaliste indien, qui mène depuis 2014 une politique autoritaire et raciste à l’encontre des minorités religieuses de son pays, est un modèle de démocratie. Une visite qui intervient quelques semaines seulement après la visite du non moins démocrate, Mohammed ben Salman (Arabie Saoudite).
26. « Vive la République, vive la police nationale »
Mardi 11 juillet, Gérald Darmanin a profité de l’occasion des questions au gouvernement pour rendre un vibrant hommage aux forces de l’ordre, face aux députés. « Vive la République et vive la police nationale ! », a-t-il conclu. De quoi bien éteindre les braises des révoltes qui ont suivi la mort du jeune Nahel, 17 ans, tué par un policier à Nanterre.
25. Le tacle sur l’autorité parentale dans les quartiers
Après les révoltes suite à la mort du jeune Nahel, tué par un tir de policier en plein cœur, le gouvernement a pointé du doigt un grand responsable : les parents des jeunes insurgés. Indigne et insultant, surtout lorsqu’on sait que les habitants des quartiers populaires sont souvent ceux qui font les métiers les plus pénibles de notre société. Les mêmes que le gouvernement félicitait pendant la crise sanitaire. Aussitôt passé, aussitôt oublié. Autre chose qu’Eric Dupond-Moretti a oublié en tenant son discours : son propre fils est mis en examen pour violences conjugales.
24. Bruno Le Maire sur la prétendue fraude sociale renvoyée au Maghreb
A J+2 du début de l’apaisement, quoi de mieux qu’un peu de racisme anti-arabe pour arrêter de parler de la réforme des retraites dans laquelle le gouvernement est empêtré ? C’est en tout cas la (crasseuse) idée de Bruno Le Maire, qui déclare ainsi : « Nos compatriotes en ont ras le bol de la fraude [sociale]. Ils n’ont aucune envie de voir que des personnes peuvent bénéficier d’aides, les renvoyer au Maghreb ou ailleurs, alors qu’ils n’y ont pas droit. Ce n’est pas fait pour ça, le modèle social. » Plus révoltant qu’apaisant.
23. Recenser les élèves absents le jour de l’Aïd
Le 26 avril et le 11 mai derniers, des centaines d’établissements scolaires des banlieues toulousaines et montpelliéraines ont reçu une drôle de missive. La demande ? Un recensement du taux d’absentéisme pendant le Ramadan et particulièrement le 21 avril, jour de l’Aïd-el-Fitr, dans le cadre de l’opération “Enquête sur l’impact du Ramadan à l’école”. La demande vient bien de la place Beauvau, mais il n’y aurait pas lieu de s’inquiéter : le fichage n’est pas nominatif. Normal, c’est interdit. Mais l’autorisation du recensement seul se fait au cas par cas. Pour y être autorisé, il faut saisir la CNIS ou le CNIL. À l’heure actuelle, rien ne dit que ces organismes ont été contactés. Est-ce pour cela qu’après l’envoi des mails, les rectorats se sont rétractés, sentant le scandale arriver ? Trop tard pour l’apaisement.
22. Réprimer la mobilisation devant l’AG de Total
Gazer, matraquer et gazer encore. Les participants aux manifestations de ces derniers mois connaissent le refrain. Les militants écologistes, qui ont tenté d’empêcher la tenue de l’assemblée générale de Total à Paris le 26 mai dernier, n’y ont pas échappé. Escortés par la police, les actionnaires du groupe ont pu se rendre à leur réunion et y voter – entre autres bonnes résolutions – l’augmentation de 10 % du salaire de leur PDG Patrick Pouyanné.
21. La baisse de la note de Fitch
Pendant des mois, le gouvernement a rabâché l’absolue nécessité économique de la réforme des retraites, négligeant toutes formes de contestations sociales. Pourtant, c’est pour ces mois de grèves et de casserolades que la France est passée de la note AA à AA- pour l’agence de notation financière Fitch. Pour elle, le mouvement social “pourrait créer des pressions en faveur d’une politique budgétaire plus expansionniste ou d’un renversement des réformes précédentes”. Cette dernière a décrété que le recours au 49.3 était une décision qui « renforcera probablement les forces radicales et anti-establishment [dans le pays] ». Même Fitch croit à la révolution ! Pris à son propre piège, le gouvernement a réussi à décevoir le peuple et les économistes.
20. Des bains de foule dans le calme
C’est une scène qui, finalement, aura donné aux opposants à Emmanuel Macron une micro-forme d’apaisement. C’est moins certain, en revanche, qu’elle montre un pays serein et heureux. Pour son premier déplacement après la promulgation de la réforme des retraites, Emmanuel Macron décide de se rendre à Sélestat, en Alsace. Au cours de son déplacement, sûr de sa force, il tente un bain de foule. Raté. La scène fait le tour des réseaux sociaux. En guise d’accueil, une bronca, des slogans anti-Macron et un vieil homme qui lui assène, droit dans les yeux, « trou du cul ». Illustration d’un pays dilaté comme jamais.
19. Se déplacer avec un groupe électrogène
« Bvvvvrrrrrrrrr. » Ce doux ronronnement est celui d’un gros groupe électrogène à gazole sur camion qui suit sagement Emmanuel Macron. Observé lors d’un déplacement du président dans le Loir-et-Cher le 25 avril 2023, il prouve la sérénité du gouvernement dans ces 100 jours d’apaisement. Si Emmanuel Macron a décidé d’emporter cet appareil avec lui, ce n’est pas pour rester droit dans ses bottes de militant écologiste, mais pour faire face aux syndicalistes. « Il va faire tout noir. » Lors de ses précédents déplacements, le président s’est en effet retrouvé dans la pénombre plusieurs fois après des actions ciblées de la CGT. Plutôt que d’écouter un énième discours, le syndicat a tout simplement préféré couper le courant. « Bonne nuit les petits. »
18. Menotter des octogénaires
Samedi 8 juillet, la venue d’Olivier Dussopt à Tournon-sur-Rhône en Ardèche aurait pu virer au drame. Un homme de 83 ans a été menotté par les gendarmes et conduit au commissariat pour un interrogatoire, après avoir perturbé la visite du ministre du Travail. Le dangereux activiste aurait simplement refusé de serrer la main au ministre et expliqué son geste en public, en mettant en cause sa « politique répressive, anti-services publics ».
17. « Je fais le tour du Vieux-Port ce soir avec vous, je suis sûr qu’il y a 10 offres d’emploi »
Sous le soleil marseillais, Emmanuel Macron n’a pas pu s’empêcher de se servir un bon verre de pastiche, le 26 juin. Après son fameux “je traverse la rue et je vous en trouve” [du travail, NDLR] et très inspiré par… lui-même, le président créé la version marseillaise de l’apocryphe en répondant à une mère de famille qui l’interpellait sur la situation de son fils au RSA. De quoi adoucir l’ensemble des chômeurs de France.
16. Le silence face au communiqué d’Alliance et Unsa Police
« Face à ces hordes sauvages, demander le calme ne suffit plus, il faut l’imposer ! », lancent Alliance et UNSA Police dans un communiqué, après les débordements suite à la mort de Nahel. Comme si ça ne suffisait pas, le groupe syndical appelle « au combat contre ces « nuisibles » ». Violents et choquants, ses propos ont même fait réagir Laurent Escure, le secrétaire général de l’UNSA qui affirme « se désolidariser du communiqué de presse ». Mais, face à cette envolée lyrique haineuse de la part de policiers, ni Gérald Darmanin, ni Emmanuel Macron n’ont exprimé le moindre mot. Qui ne dit mot consent ?
15. S’opposer à un « ISF climatique »
Dans son rapport remis au gouvernement le 22 mai, Jean Pisani-Ferry préconise de taxer le patrimoine des plus riches pour financer la transition écologique. Produit par l’économiste en chef de la macronie et commandé par la Première ministre elle-même, les conclusions du texte ont tout de même été balayées dès sa réception. Olivier Véran, porte-parole du gouvernement, a affirmé dès le 23 mai au micro de France Inter : « Il faut faire contribuer davantage ceux qui le peuvent. Est-ce que ça passe par la fiscalité ? Je ne crois pas. On peut y arriver sans. » Par quoi passera la contribution des riches pollueurs ? Le mystère reste entier.
14. Juger « totalement infondée » l’accusation de l’ONU sur le racisme des forces de l’ordre
Le Comité pour l’élimination de la discrimination raciale de l’ONU s’est dit, le 7 juillet, « préoccupé par la discrimination structurelle au sein des forces de l’ordre, en particulier dans la police, et les disparités raciales à l’encontre des personnes d’origine africaine et arabe. » La réponse du gouvernement français ? Ouin ouin. « La France conteste des propos qu’elle juge excessifs », et juge « infondées » ces accusations. Pourtant, bon nombre de politiques, d’associations, d’ONG, de militants, d’institutions, de chercheurs, d’artistes, de sociologues, de victimes et bien plus dénoncent régulièrement le racisme dans la pla police
olice. Le gouvernement s’entête. Pour preuve, condamné en janvier 2022 pour « injure publique à caractère racial », un agent a été autorisé à passer le concours d’officier et l’a même réussi. Étonnant.
13. Refuser une minute de silence après la mort de 81 exilés en Méditerranée
Il n’est pas question de superstition mais il faut se mouiller la nuque pour ce top 13, tout droit venu de notre présidente de l’Assemblée nationale : « On ne fait pas n’importe quoi dans l’Hémicycle. » Qu’entend par-là Yaël Braun-Pivet ? Adopter un texte qui va accroître les disparités sociales en accélérant son vote peut-être ? Hé… non. Que de surprises nous réservent les macronistes. Dans un entretien donné au Parisien, elle a tant regretté la “tenue débraillée” de certains députés que le “buzz”, qu’ont, selon elle, voulu créer les Insoumis en se levant pour honorer la mémoire de 81 femmes et hommes exilés et morts en mer Méditerranée. Sur un élan du député LFI Aymeric Caron, les élus Nupes s’étaient tous levés pour observer une minute de silence. Moment d’émotion coupé net par Yaël Braun-Pivet : « Mes chers collègues, effectivement cette idée est formidable, mais (…) on ne fait pas de minute de silence de cette façon-là. »
12. Refuser de condamner explicitement la cagnotte pour le tueur de Nahel
Alors que sur Twitter les internautes s’indignent de la cagnotte du polémiste d’extrême droite Jean Messiha, qui a récolté plus de 1,6 millions d’euros pour le policier ayant tiré à bout portant sur Nahel, du côté du gouvernement, c’est silence radio. Première ministre et ministre de l’Intérieur estiment que c’est à la justice de se prononcer sur la légalité d’une telle collecte. À moins qu’Elisabeth Borne trouve encore des mots rassurants ? « Le fait qu’effectivement ce soit une personne proche de l’extrême droite qui a lancé cette cagnotte ne contribue pas, sans doute, à apporter l’apaisement. » Non, sans blague ?
11. Interdire la mobilisation contre le Lyon-Turin
Le 17 juin, des milliers de personnes se sont rassemblées pour s’opposer au chantier de liaison ferroviaire Lyon-Turin et ses 57 kilomètres de tunnel dans la montagne. Le préfet de Savoie avait interdit tout rassemblement dans les 9 communes proches du chantier deux jours plus tôt, trop tard pour laisser le temps aux organisateurs de la mobilisation de faire appel. Le 15 juin, les partisans du Lyon-Turin avaient pourtant organisé leur propre manifestation sans aucun problème.
10. Interdire la marche en mémoire d’Adama Traoré
Interdire la convergence des colères par peur. Peur que les quartiers se réveillent à nouveau. Le 8 juillet dernier, la marche annuelle en mémoire à Adama Traoré a été interdite à Beaumont-sur-Oise. Alors, le collectif s’est rabattu en dernière minute sur la place de la République à Paris, lieu de démocratie et d’expression. Rebelote : elle est interdite aussi. En sept ans de marche, cette dernière a toujours été pacifique. Mais, portés par les insurrections des banlieues, les manifestants ont réussi à maintenir le rassemblement, et cela, sans aucune tension. Malgré tout, les forces de l’ordre et de l’apaisement ont réussi à montrer une des images les plus choquantes de ces 100 derniers jours : Yssoufou Traoré menotté en placage ventral, dans la même position qui a tué son frère.
9. Utiliser l’arsenal antiterroriste pour arrêter des militants écologistes
Interdictions administratives de territoire, mobilisation de la sous direction antiterroriste, gardes à vue de quatre jours : autant de dispositifs réservés à la répression du terrorisme, utilisés à l’encontre de militants écologistes ces dernières semaines. Pour avoir mené une action de sabotage d’une cimenterie Lafarge en décembre dernier, ils sont une trentaine à avoir été interpellés dans toute la France, deux militants ont été mis en examen le 11 juillet pour « association de malfaiteurs ». De quoi bien apaiser la révolte des mouvements écologistes.
8. Autoriser une manifestation de néo-nazis
Attention. Cette pirouette a été opérée par une cascadeuse professionnelle, n’essayez pas de la reproduire chez vous. En effet, c’est la cheffe d’un gouvernement qui devient professionnelle dans l’art d’interdire, parfois à la dernière minute, les manifestations et autres rassemblements qui a déclaré cela : « C’est aussi notre démocratie de garantir le droit à manifester« . De quoi faire rire ? Pas vraiment. Élisabeth Borne a prononcé cette phrase pour justifier l’autorisation donnée par le Préfet de Paris à une manifestation de groupuscules néo-nazis, cagoulés, en plein milieu de la capitale. Pour apaiser, quoi de mieux que se rappeler qu’Emmanuel Macron ne doit son deuxième mandat qu’au barrage des électeurs de gauche pour éviter, justement, l’arrivée au pouvoir de l’extrême droite.
7. Réprimer les nuits de révolte qui ont suivi la mort de Nahel
Après avoir fait une fixette sur le mouvement écologiste, l’actualité a dramatiquement offert au gouvernement une autre cible de sa répression. Après la mort du jeune Nahel M, tué à bout portant par un policier, l’Hexagone a été le théâtre de plusieurs nuits de violentes révoltes, témoignant d’une colère sociale évidente. Les deux principales réponses à celle-ci ? La répression policière, déjà, avec l’envoi des unités d’élite (RAID, BRI, GIGN) dans de nombreuses villes de France. Des unités, plus habituées au grand banditisme ou au contre-terrorisme. Mais peu importe, tant qu’il s’agit de mater la jeunesse des quartiers populaires. Résultat terrible de cette répression violente : la mort de Mohammed, un homme de 27 ans à Marseille, probablement du fait d’un tir de LBD, et le placement en coma d’un autre jeune homme de 25 ans, à Mont-Saint-Martin, touché par un « bean-bag » tiré par le RAID. Puis, la répression judiciaire : fortement mis sous pression par le ministre de la Justice, les tribunaux ont envoyé par pelletées des jeunes en prison à la suite de comparutions immédiates expéditives, pour des faits plus ou moins documentés. En Macronie, apaiser et réprimer sont synonymes.
6. La réforme du RSA
Pour apaiser, quoi de mieux que d’en remettre une couche sur les plus précaires de notre société ? C’est en tout cas la brillante idée du gouvernement qui, au lendemain de la dernière mobilisation interprofessionnelle contre la réforme des retraites, a décidé d’embrayer sur la loi dite « plein-emploi ». Dedans, on y retrouve notamment un « contrat d’engagement réciproque » pour les bénéficiaires du revenu de solidarité active (RSA) qui les obligera à suivre un « accompagnement ». Autrement dit, des heures en entreprise, ou de formation pour bénéficier d’à peine 600 euros. Du travail gratuit, pour beaucoup.
5. Refuser d’examiner la proposition d’abrogation de la réforme des retraites
« Chemin démocratique ». Combien de fois le gouvernement a martelé cette expression dans le cadre de la réforme des retraites ? On ne les compte plus. Pourtant, pour faire passer sa très contestée réforme, l’exécutif a usé de tous les artifices constitutionnels pour éviter tout vote des représentants de la nation sur ce sujet. Après le recours à l’article 47-1, puis 49.3 de la Constitution, la majorité présidentielle a vidé de sens, en commission, la proposition de loi du groupe Liotqui souhaitait abroger cette réforme. Le but ? Éviter à tout prix un vote. Un beau chemin d’apaisement démocratique.
4. Le rapport de la commission d’enquête sénatoriale sur le fonds Marianne
En macronie, on peut laisser passer des accusations d’agressions sexuelles sur certains de ses ministres, sans broncher. Ça passe crème. Mais n’allez pas croire qu’on ne sait pas pour autant hausser le ton : comme quand la Première ministre herself recadre son ministre de l’Éducation nationale pour avoir osé dire que Cnews était d’extrême droite. En revanche, motus s’agissant du Fonds Marianne dont la ministre Schiappa est elle-même accusée, par les sénateurs-rapporteurs, d’avoir conduit le dispositif de lutte contre la radicalisation, à un « fiasco ». Les rapporteurs parlent même de « dérive d’un coup politique ». La corruption, c’est oui. Les violences sexuelles, c’est oui. Mais lutter contre l’extrême droite : c’est non !
3. L’opération Wuambushu
« Restaurer la paix républicaine.» Il semble que l’objectif de Gérald Darmanin ait été parfaitement accompli. Après trois semaines de démêlés judiciaires pour expulser les immigrés de Mayotte vers les Comores, les bulldozers ont pu joyeusement s’activer pour broyer les bangas (habitations précaires), avec le soutien de 1 800 policiers et gendarmes, bravant fièrement la solide et dangereuse opposition de la population locale. Une opération tranquille, portée par un dessein plus que louable, la lutte contre l’habitat indigne. Le ministre de l’Intérieur a peut-être seulement oublié de penser que cela ne passait pas par la destruction des logements… Sinon, il n’y en a plus.
2. Dissoudre les Soulèvements de la Terre
Mercredi 21 juin, le conseil des ministres a acté la dissolution du mouvement écologiste qui revendique plus de 140 000 soutiens et 150 comités locaux. Leur tort ? Avoir, à l’occasion de nombreuses mobilisations, fâché agro-industriels et multinationales qui bétonnent les terres et s’accaparent les ressources en eau du pays. Depuis l’organisation fin novembre d’une première manifestation d’ampleur contre les mégabassines à Sainte-Soline, Gérald Darmanin rêve de la disparition du collectif « écoterroriste ». Grâce à la force de conviction de la FNSEA, c’est désormais chose faite.
1. La mort de Nahel
Passage François-Arago, Nanterre, Hauts-de-Seine, mardi 27 juin au matin. Une Mercedes jaune est à l’arrêt. Sur sa gauche, côté conducteur, deux policiers motards. On assiste, visiblement, à un contrôle routier. Les deux policiers ont leur pistolet dégainé. La voiture commence à avancer, légèrement. Un des deux policiers tire. Une seule balle, à bout portant, en plein cœur. Il se situait alors sur la gauche du véhicule. Le jeune conducteur, Nahel, un mineur de 17 ans, meurt sur le coup, sa voiture allant s’encastrer dans un poteau quelques mètres plus loin. Une version que l’on connaît aujourd’hui grâce à une vidéo amateure. Avant ça, les médias avaient déjà déroulé le tapis rouge à la version préfectorale faisant de Nahel un grand délinquant ayant voulu tuer des policiers. Une énième preuve d’un racisme ambiant qui, depuis, ne cesse de croître dans les discours politiques. Notamment en Macronie. De quoi donner la rage. Et la nausée. Pas de s’apaiser.
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