Où vont les profits du CAC 40 ?

Les responsables politiques et les médias n’ont pas tari d’éloges sur les brillantes performances de nos champions du CAC 40. Avec plus de 80 milliards d’euros de profits au premier semestre 2023, cet indice boursier est bien parti pour pulvériser son record historique de 2021, qui s’élevait à 156 milliards. Point important : ces profits sont réalisés principalement à l’étranger. Selon le cabinet Ernst & Young, les entreprises du CAC 40 ont réalisé 82 % de leur chiffre d’affaires en dehors de l’Hexagone en 2022, un pourcentage supérieur de 10 points à celui de 2012.

À tout seigneur, tout honneur, c’est LVMH, première capitalisation de la place de Paris, qui profite le plus de ses ventes à l’étranger. Le groupe de Bernard Arnault, qui concurrence Elon Musk pour le titre d’homme le plus riche du monde, n’a réalisé que 8 % de ses ventes en France, pour un montant de 8 milliards d’euros. La performance de notre multimilliardaire est exceptionnelle, car il n’a acquitté que 3 milliards d’euros d’impôts avec ses 73 milliards d’euros de chiffre d’affaires à l’étranger, comme il l’a lui-même indiqué, soit à peine plus que ce qu’a perçu le fisc français pour un chiffre d’affaires douze fois inférieur sur notre sol. Chapeau au champion de l’évasion fiscale !

Un autre cas emblématique est celui de TotalEnergies, au premier rang du CAC 40 par son chiffre d’affaires, réalisé à 80 % hors des frontières nationales. Une activité à l’étranger extrêmement rentable, qui a généré 19 milliards d’euros de bénéfices après impôts. Champion de l’extraction des énergies fossiles et de la dévastation de la planète, ainsi que l’illustrent ses forages destructeurs des parcs nationaux en Ouganda, Total n’hésite pas à pactiser avec les dictateurs étrangers, ce qui explique la forte implantation du groupe dans la Russie de Vladimir Poutine. Emmanuel Macron n’a pas hésité à élever Patrick Pouyanné, PDG de TotalEnergies, au rang de grand-croix de la Légion d’honneur à l’occasion du 14 Juillet dernier, pour services rendus à la nation.

L’ancienne régie Renault, devenue le groupe Renault-Nissan, illustre également ce glissement des grandes entreprises publiques vers un capitalisme apatride. Le groupe a vendu 2 millions de voitures à l’étranger, ce qui représente les trois quarts de son activité. Sans compter les 526 millions de dividendes versés par Nissan, sa filiale à 43 %.

Au total, selon la Banque de France, 42,5 % du capital des entreprises du CAC 40 est détenu par des actionnaires étrangers, ceux-ci étant majoritaires dans un tiers de ces « fleurons » du capitalisme français. Ces entreprises ont versé 27,5 milliards de dividendes en 2022 à leurs actionnaires étrangers, soit plus de 40 % des 67,5 milliards de dividendes distribués, selon les estimations de l’Observatoire des multinationales. Nos champions nationaux du CAC 40 sont une bonne affaire pour le capitalisme étranger (1) !