Après la défaite sur les retraites, une mobilisation pour maintenir la pression

Plusieurs dizaines de milliers de personnes ont manifesté partout dans le pays ce vendredi 13 octobre pour les salaires, l’égalité hommes-femmes et contre l’austérité. Une journée de mobilisation pour maintenir la pression de l’unité syndicale sur le gouvernement.

Pierre Jequier-Zalc  • 13 octobre 2023
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Après la défaite sur les retraites, une mobilisation pour maintenir la pression
Le cortège de tête syndical, à Paris, le 13 octobre 2023. Au centre, Sophie Binet, secrétaire générale de la CGT.
© Maxime Sirvins

Il faudra désormais s’y habituer. Dans les cortèges qui ont défilé partout dans le pays, les drapeaux orange de la CFDT côtoient les rouges de la CGT. Habituel, maintenant, après six mois de lutte contre la réforme des retraites au printemps dernier. Une grande nouveauté, toutefois. Cela faisait bien longtemps que nous n’avions pas vu, en dehors d’un mouvement social en opposition à une réforme précise, l’ensemble des organisations syndicales défiler ensemble, derrière la même bannière.

Cette intersyndicale est notre plus grande victoire.

Benoît Teste, FSU

« Cette intersyndicale est notre plus grande victoire, confiait Benoît Teste, secrétaire général de la FSU, en juin dernier. Elle a été révélatrice d’un monde du travail qui se cherche une représentation. Si on arrive à faire perdurer ça, ce sera très bien pour la société. » L’été est passé, et l’intersyndicale a tenu. « Elle est toujours solide et unie », assure Sophie Binet, secrétaire générale de la CGT avant que s’élance la manifestation parisienne. « Qui aurait dit que dix mois après la première mobilisation contre les retraites, il y aurait encore une manifestation à l’appel de toutes les organisations syndicales à la fois françaises, mais aussi européennes ? On a une unité qui s’étend aujourd’hui. »

Plus que de simplement tenir, cette intersyndicale a réussi à se trouver des mots d’ordre communs. « On est très inquiets sur le plan social et économique car il y a de plus en plus de travailleurs et de travailleuses qui ne peuvent pas boucler leurs fins de mois et cette situation pose d’importantes difficultés. Augmenter les salaires c’est une mesure de justice sociale, mais c’est aussi nécessaire d’un point de vue économique », poursuit la leader de la CGT.

Les salaires, ou comment essayer de se mobiliser en positif, en luttant pour une amélioration et non plus contre des réformes rognant une à une les acquis sociaux, méthodiquement. La première échéance est très proche : la conférence sociale sur les salaires et les déroulements de carrière, organisée par le gouvernement, se tiendra lundi. Si tous les partenaires sociaux y participeront, il n’est pas certain que les organisations syndicales réussissent à obtenir de grandes avancées. Lors de rencontres bilatérales préparatoires, Élisabeth Borne, la Première ministre, a d’ores et déjà annoncé que l’indexation des salaires sur l’inflation – mesure défendue par plusieurs centrales –, ne serait pas une des options retenues.

Nouveau rapport de force

A minima, les syndicats espèrent une revalorisation des branches dont les salaires minimums se situent en dessous du niveau du SMIC. Un grand chantier, en revanche, fait l’unanimité côté représentants des travailleurs : la conditionnalité des aides aux entreprises en fonction de certains critères. Une mesure toujours refusée par le gouvernement. Mais cette fois, ce n’est pas une, mais huit organisations syndicales soudées qu’il aura face à lui. Cette conférence sociale sera donc l’occasion de tester in situ ce nouveau rapport de force.

Augmenter les salaires c’est une mesure de justice sociale, mais c’est aussi nécessaire d’un point de vue économique.

Sophie Binet, CGT

« Pendant que nos concitoyens souffrent de l’inflation et appréhendent difficilement la rentrée, une part infime d’entre eux profite de dividendes records (augmentation de 32,7 % au deuxième trimestre, un niveau supérieur à la moyenne européenne). La conférence sociale sur les bas salaires esquissée hier par le président de la République n’aura de sens que si elle met un terme à cet insupportable paradoxe ! », a, par exemple, écrit sur X (ex Twitter), Cyril Chabanier, président de la CFTC.

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Cette mobilisation du 13 octobre tombait donc à pic pour continuer à mettre la pression sur le gouvernement. Le printemps dernier a montré que les syndicats étaient toujours les meilleurs représentants des travailleurs, au grand dam d’Emmanuel Macron qui n’a cessé de les « corneriser » depuis son arrivée au pouvoir. Dans un contexte international très tendu, qui a relégué au second plan les questions nationales, les cortèges n’ont pas forcément fait le plein espéré.

Prochain rendez-vous le 13 décembre

Malgré tout, plusieurs dizaines de milliers de personnes ont battu le pavé, partout dans le pays. Il faut aussi dire que le risque de démobilisation est grand. Quatorze journées de mobilisation historique à l’hiver et au printemps dernier, avec, parfois, plusieurs millions de personnes dans la rue, n’auront pas réussi à faire reculer un gouvernement inflexible. « On ne se mobilise pas seulement lorsqu’on partage les revendications, mais quand on pense que la victoire est possible », expliquait Baptiste Giraud, maître de conférences en science politique (université d’Aix-Marseille), cette semaine dans Mediapart. Comment alors, réussir à continuer à croire en l’efficacité de ce genre de journées épisodiques, forcément peu suivies ?

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Malgré tout, plusieurs secteurs ont été perturbés par des grèves, comme dans les airs, sur les rails, ou dans les écoles. Une piqûre de rappel pour le gouvernement dont le passage en force sur la réforme des retraites – entrée en vigueur le 1er septembre – n’a toujours pas été encaissé par la population. D’autant que la situation économique des plus précaires ne s’arrange pas, leur quotidien étant toujours plus difficile avec une inflation galopante sur les produits alimentaires (+18 % en deux ans). Pour maintenir ce rapport de force, et essayer d’obtenir quelques avancées sociales, les organisations syndicales ont déjà appelé à une nouvelle journée de mobilisation nationale, le 13 décembre.

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