Encore de l’antisémitisme
Après avoir exprimé un « soutien inconditionnel » à Israël, alors que les bombes ravagent Gaza, la présidente de l’Assemblée nationale Yaël Braun-Pivet s’est rendue dans ce pays, flanquée de députés bien peu fréquentables. Ce qui n’a pas empêché les macronistes d’intenter un nouveau procès à Mélenchon.
dans l’hebdo N° 1781 Acheter ce numéro
Adoncques, onze jours après qu’elle avait une première fois exprimé, le 10 octobre, après l’attaque meurtrière lancée 72 heures plus tôt par le Hamas, le « soutien inconditionnel » de la France à Israël, Yaël Braun-Pivet, présidente macroniste de l’Assemblée nationale, est partie samedi 21 octobre pour Tel-Aviv, avec trois très (très) droitiers députés de droite, à la fin de redire cet appui.
Ce déplacement n’a pas été du goût de Jean-Luc Mélenchon, qui a posté le lendemain, dimanche 22 octobre, sur X (ex-Twitter), un message constatant que, pendant que plusieurs dizaines de milliers de manifestant·es se rassemblaient ce jour-là à Paris pour dire leur soutien au peuple palestinien, « Mme Braun-Pivet », prétendant toujours s’exprimer au nom de l’ensemble des Français·es, « camp[ait] à Tel-Aviv pour encourager le massacre (1) » en cours à Gaza – où les représailles israéliennes ont déjà tué plusieurs milliers de civil·es palestinien·nes, dont plusieurs centaines d’enfants.
On comprend l’indignation, mais pourquoi choisir ce mot, « camper », si malvenu – pour le dire gentiment ?
La présidente de l’Assemblée nationale, parlant toujours au nom de la France, faisait à ce moment-là, depuis la capitale israélienne, cette déclaration abjecte, qui doit être citée un peu longuement : « Ce qui est important, c’est que les populations civiles qui sont aujourd’hui à Gaza soient évidemment le moins possible victimes de ce conflit, mais on sait aujourd’hui qu’elles servent souvent de bouclier humain, et qu’il faut les préserver, bien sûr, mais que rien ne doit empêcher Israël de se défendre. »
Par conséquent : au moment précis où une immense foule disait à Paris son refus de cette abominable tuerie, Braun-Pivet, en soutenant que « rien » ne devait « empêcher Israël de se défendre », semblait justifier depuis Tel-Aviv le massacre en cours à Gaza. Mais c’est Mélenchon qui a aussitôt été vilipendé, et traité notamment d’« antisémite » par des macronistes qui ne semblent plus avoir aucune limite.
Les mêmes, curieusement, ont cependant négligé l’intéressant détail que l’un des trois députés de droite qui accompagnaient la présidente de l’Assemblée en Israël – Éric Ciotti, président du parti Les Républicains (LR) – s’était dit prêt, il y a deux ans, à voter, au second tour de l’élection présidentielle, pour un candidat poursuivi pour contestation des crimes antisémites (notamment) de Vichy. Et qu’un autre de ses très (très) droitiers accompagnateurs – Meyer Habib (LR) – s’est tout récemment illustré en proclamant que le Rassemblement national, parti cofondé notamment par un ex-milicien et un ancien Waffen SS, était « rentré dans le camp républicain ».
Trop occupé·es sans doute à intenter un nouveau procès en antisémitisme contre Mélenchon, les macronistes n’ont rien trouvé à redire à ces divers propos : on ne saurait trop leur suggérer d’essayer tout de même de trouver le temps de se demander si l’instrumentalisation du combat contre l’antisémitisme ne serait pas encore de l’antisémitisme…
Sébastien Fontenelle est un garçon plein d’entrain, adepte de la nuance et du compromis. Enfin ça, c’est les jours pairs.
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