« Le combat de Julian Assange est celui du droit à l’information »
Un rassemblement avait lieu mardi 20 février à Paris pour demander la libération de du fondateur de WikiLeaks, qui risque l’extradition par le Royaume-Uni et 175 ans de prison aux États-Unis. Reportage.
“Libérez Julian Assange ! » Le slogan résonne place de la République, à Paris, en cette soirée du 20 février. Dans ce rassemblement d’environ 200 personnes, parmi lesquels des militants de la France insoumise, des communistes et des écologistes, un seul mot d’ordre : la libération du journaliste australien, qui plaide sa cause une ultime fois devant de la Haute Cour de justice de Londres, les 20 et 21 février.
Le fondateur de WikiLeaks risque de finir ses jours derrière les barreaux en cas d’extradition aux États-Unis. “Pourquoi son combat est aussi le nôtre” s’interroge un tract, distribué par des militants à la sortie du métro. Le ton du rassemblement, organisé par le comité de soutien Assange et en présence du syndicat national des journalistes (SNJ), est donné. Les visages d’Assange se mêlent aux drapeaux de la Palestine ou de l’Équateur, pays dont l’ambassade à Londres avait un temps accueilli Assange.
L’affaire Julian Assange aux États-Unis remonte à 2010. L’homme est poursuivi pour avoir révélé plus de dix millions de données qui documentent les crimes de guerre en Irak et en Afghanistan, les actes de torture à Guantánamo, l’espionnage de chefs d’État par la CIA ou encore les pratiques discutables de multinationales et de grandes banques.
« Le symbole d’une liberté entravée »
Dans la foule, une retraitée, qui souhaite rester anonyme, se dit « lassée de la non-action de la communauté internationale » sur le sort du journaliste et lanceur d’alerte. Une consultante en communication, anonyme elle aussi, est présente pour défendre « le symbole d’une liberté entravée ». Elle enrage de voir la situation de Julian Assange « ne pas s’améliorer » et se montre pessimiste devant la capacité de ces rassemblements à faire bouger les lignes. Elle en veut aussi aux médias de ne « pas se sentir concernés » et ne pas en faire suffisamment.
Christina, écrivaine et activiste, tient une pancarte : « Si Assange est extradé, aucun journaliste n’est à l’abri de la réclusion à perpétuité », peut-on lire. La phrase est signée de Daniel Ellsberg, le lanceur d’alerte des Pentagon Papers. Elle est présente au rassemblement pour exiger la libération immédiate d’Assange, « qu’on laisse mourir de façon silencieuse », s’indigne-t-elle. Christina fait référence aux 12 années de détention au Royaume-Uni, dont cinq passées dans la prison de haute sécurité de Belmarsh.
Emmanuel Macron peut décider l’asile politique dès ce soir.
T. Portes
En 2019, le rapporteur des Nations unies, Nils Melzer, avait d’ailleurs qualifié les conditions de sa détention de « torture psychologique ». Christina insiste sur « l’importance de défendre le droit d’informer et de révéler les crimes de guerre dans nos démocraties », notamment dans le contexte de Gaza, où les journalistes sont censurés lorsqu’ils dénoncent les crimes du gouvernement israélien.
Le brouhaha empêche les participants d’entendre les discours des officiels, élus et représentants d’associations. Le représentant du SNJ va néanmoins se faire entendre : « Une démocratie consiste à renvoyer les gouvernements face à leurs responsabilités. Recueillir des informations constitue le travail de journaliste au quotidien. Informer n’est pas un crime, libérez Julian Assange », lance-t-il, très applaudi.
Les insoumis sont également venus en nombre. Leur engagement en faveur de Julian Assange n’est pas récent. Jean-Luc Mélenchon, présent au rassemblement, s’en fait très souvent l’écho. Pour Thomas Portes, député insoumis de la Seine-Saint-Denis, il faut que “le combat de Julian Assange soit celui de la liberté de la presse et le droit à l’information”. Il dénonce un “silence assourdissant” de la part des autres pays qui devraient lui offrir l’asile politique. Et pousse pour que la France le fasse : « Emmanuel Macron peut le décider dès ce soir, c’est une décision politique et il a les moyens de le faire : il faut le faire.«
La demande d’asile avait déjà été déposée en septembre dernier mais celle-ci a été rejetée par le tribunal de Créteil. Ce 21 février, en sortie de conseil des ministres, la porte-parole du gouvernement Prisca Thevenot s’est contentée de ces mots : “Il y a une procédure judiciaire qui est en cours. Et donc nous devons laisser cette procédure judiciaire se faire comme toutes les autres procédures judiciaires.” Le verdict britannique devrait être rendu, au plus tôt, le 5 mars.
Chaque jour, Politis donne une voix à celles et ceux qui ne l’ont pas, pour favoriser des prises de conscience politiques et le débat d’idées, par ses enquêtes, reportages et analyses. Parce que chez Politis, on pense que l’émancipation de chacun·e et la vitalité de notre démocratie dépendent (aussi) d’une information libre et indépendante.
Faire Un Don