« Talitakum » : boules de nerfs

S’étant constitué au sein de l’effervescente scène alternative bruxelloise, Avalanche Kaito a récemment déboulé dans le paysage musical avec un très bon premier album (Avalanche Kaito, 2022), salué notamment par Politis. D’emblée, le groupe a affirmé une vive singularité à travers une musique intense, farouchement inclassable, quelque part entre post-punk, spiritual jazz et afro-beat.

La musique dans Talitakum n’a rien de bêlant et se révèle au contraire bien brûlante.

Arrive maintenant, très attendu, son deuxième album, Talitakum. Dans l’intervalle, l’alchimie interne et la musique d’Avalanche Kaito ont sensiblement évolué. Cela tient d’abord à un changement : rejoignant le chanteur-griot et multi-instrumentiste burkinabé Kaito Winse et le batteur français Benjamin Chaval, le guitariste belge Nico Gitto a remplacé son compatriote bassiste Arnaud Paquotte. Cela résulte ensuite du processus naturel de construction et de consolidation du trio – un processus qui s’est opéré en particulier en live, dans le feu de l’action.

« Nous avions environ 70 concerts derrière nous quand nous avons enregistré Talitakum, précise Benjamin Chaval. La cohésion du groupe s’est clairement renforcée. » Sur disque comme sur scène, où il exprime la musique par tout son corps, Kaito Winse apparaît comme l’élément central du projet, auquel il donne son prénom. C’est lui qui apporte les textes, en partie inspirés par des contes traditionnels de son pays natal, et souvent aussi des idées de mélodies ou de rythmes. 

Le nouvel album a été conçu entre le printemps et l’été 2023, en cultivant une spontanéité maximale. Après deux sessions préparatoires, sur une dizaine de jours, au Volta, un grand centre musical à Bruxelles, le groupe a investi durant une semaine le Gam Studio, dans les Ardennes, pour enregistrer. « Ça s’est fait de manière rapide, avec une part importante d’improvisation », commente Nico Gitto. Assurant la production en dialogue étroit avec ses deux acolytes, Benjamin Chaval s’est ensuite chargé de structurer et de peaufiner le matériau encore assez brut.

Puissance redoutable

Au niveau des textes, (dé)clamés ou chantés dans différentes langues du Burkina Faso, Kaito Winse nous dit vouloir avant tout « faire passer un message de paix ». La musique contenue dans Talitakum n’a pourtant rien de bêlant mais se révèle au contraire bien brûlante. Tendue, électrique, convulsive, exaltée, elle évoque globalement une sorte d’afro-noise et transmet une énergie de groupe à la puissance redoutable – en particulier sur le torrentueux « Borgo » (en ouverture), le strident « Shoya », l’incantatoire « Viima », le fulminant « Lago » et le bruitiste « Machine (The Mill) » (en conclusion, parfaite).