Rafah : « J’attends de l’État français qu’il dénonce ce génocide »

Environ 10 000 personnes se sont rassemblées dans la soirée du lundi 27 mai dans les rues de Paris, suite au bombardement d’un camp de déplacés à Rafah. D’autres manifestations en France ont eu lieu. La frappe israélienne, qui a eu lieu la veille au mépris du droit international, a tué au moins 45 réfugiés palestiniens.

Tristan Dereuddre  • 28 mai 2024 abonnés
Rafah : « J’attends de l’État français qu’il dénonce ce génocide »
Rassemblement à Paris, le 27 mai 2024, suite au bombardement d'un camp de déplacés palestiniens, par l'armée israélienne. Des manifestations de soutien ont aussi eu lieu à Toulouse, Lyon, Nantes, Pau...
© Maxime Sirvins

C’est dans un nuage de gaz lacrymogène que les derniers groupes de manifestants se dispersent, ce lundi 27 mai, à Paris, aux alentours de 22 h 30. À Opéra, Concorde, ou encore République, ils sont plusieurs centaines à subir la fumée étouffante des grenades. C’est pourtant loin de ces scènes de violence, sur une place Saint-Augustin noire de monde, que le rassemblement pour Rafah avait commencé quelques heures plus tôt, à 18 h 30.

(Photo : Maxime Sirvins.)

Selon la préfecture de police, ils sont plus de 10 000 à être venus ce lundi soir soutenir un peuple palestinien en proie à l’horreur : au moins 45 personnes sont mortes la veille dans un camp de réfugiés situé au nord ouest de Rafah, dans le sud de la bande de Gaza, suite à des tirs de missiles israéliens. Ce nouveau drame intervenait seulement 48 heures après que la Cour internationale de justice a sommé Benyamin Netanyahou d’« arrêter immédiatement son offensive militaire ». D’autres rassemblements avaient été organisés ce même soir dans de nombreuses villes françaises, comme à Toulouse, Montpellier, Strasbourg, Lyon, Nantes, Pau…

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« On vient d’atteindre le point de non-retour »

La masse des drapeaux palestiniens qui flottent au-dessus de la place Saint-Augustin ne parvient pas à cacher l’immense émotion qui se dégage du cortège. Malgré la tristesse et la colère, c’est bien de la détermination qui se lit sur le visage de Chaïmae, jeune manifestante de 25 ans. Pancarte à la main, elle affirme avec force la nécessité d’appuyer les soutiens au peuple palestinien. « Je pense qu’on vient d’atteindre le point de non-retour. Il faut sortir dénoncer les crimes commis par l’armée israélienne, et on doit le faire maintenant », dénonce-t-elle. « J’attends de l’État français qu’il condamne ces actes, mais aussi qu’il dénonce ce génocide. Stop à la langue de bois, il faut penser à l’humanité en prenant une position claire et nette sur le terme de génocide », poursuit la jeune juriste.

(Toutes photos : Maxime Sirvins.)
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Non loin de là, l’écharpe parlementaire de Clémentine Autain, se distingue au milieu de la masse. « Il faut dire stop à cette folie meurtrière. Il est temps pour le président de la République de reconnaître l’État de Palestine, et qu’il cesse de vendre des armes à Israël qui commet des crimes de guerre”, explique la députée de la Seine-Saint-Denis. Pour elle, le drame de la nuit du 26 au 27 mai marque un tournant dans le conflit : « On le voit dans les réactions, elles dépassent le cadre de ceux qui sont habituellement sensibles à la cause palestinienne. J’espère maintenant que la communauté internationale va se réveiller. »

J’espère maintenant que la communauté internationale va se réveiller.

C. Autain

Dans la foule plus que jamais compacte, impossible de se frayer un chemin. « Free Palestine ! », « Enfants de Gaza, enfants de Palestine ! C’est l’humanité, qu’on assassine ! », les slogans désormais connus depuis 7 mois sont portés par les fumées rouges, noires et vertes des fumigènes. Soudain, un homme d’une quarantaine d’années, cheveux bouclés et drapeau palestinien sur le dos, se saisit d’un mégaphone : « Il faut prendre nos responsabilités ! Face aux cadavres calcinés des enfants de Gaza, face à ce massacre, aujourd’hui on ferme l’ambassade d’Israël ! », s’exclame-t-il.

Rima Hassan accueillie en rockstar

Face aux CRS, plusieurs manifestants tentent alors de passer en force, recueillant gaz lacrymogènes et coups de matraque en retour. Pendant près d’une heure, ce jeu de chien et chat se tiendra aux quatre coins de la place Saint-Augustin, asphyxiée. Finalement, c’est par la rue de la Pépinière que le gigantesque cortège va trouver une issue : jusqu’à la gare Saint-Lazare, il s’étend à perte de vue. Acclamés par la foule, plusieurs manifestants montent sur les bâtiments pour inscrire sur leurs façades quelques tags en soutien aux Palestiniens.

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Rima Hassan, acclamée par les manifestants : « J’appelle au soulèvement, partout, jusqu’à ce qu’on obtienne justice pour le peuple palestinien. » (Photo : Maxime Sirvins.)

Les acclamations redoublent d’intensité lorsque Rima Hassan, en conférence à Paris-Dauphine un peu plus tôt, fait son entrée dans le rassemblement. « Emmanuel Macron comme d’autres chefs d’État avaient posé comme ligne rouge l’offensive sur Rafah. Notre rôle, notre responsabilité, c’est de dénoncer la passivité de ces gouvernements, qui se traduit par une complicité de ces États », nous glisse-t-elle au milieu d’une foule en liesse qui ne cesse de scander son prénom. « La ligne rouge a été franchie depuis un moment en réalité, ça a été posé en ces termes par la CIJ. Nous avons une responsabilité collective de descendre dans la rue. J’appelle au soulèvement, partout, jusqu’à ce qu’on obtienne justice pour le peuple palestinien. »

La ligne rouge a été franchie depuis un moment.

R. Hassan

De son côté, le secrétaire général de l’ONU, António Guterres, a condamné la frappe israélienne à Rafah, soulignant que « ces horreurs doivent cesser ». Le Conseil de sécurité doit se réunir ce mardi, à la demande de l’Algérie, membre non permanent.

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