Barrage : ces candidats macronistes et de droite, marchepieds de l’extrême droite

Maintien ou désistement ? Politis a recensé tous les candidats Ensemble ou Les Républicains arrivés en troisième position, mais qui ont fait le choix de maintenir leur candidature au second tour. Une décision qui favorise toujours l’extrême droite.

Politis  • 1 juillet 2024
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Barrage : ces candidats macronistes et de droite, marchepieds de l’extrême droite
Rassemblement de la gauche, place de la République, le 30 juin 2024.
© Maxime Sirvins

Par Pierre Jequier-Zalc, Pauline Migevant, Hugo Boursier, Tristan Dereuddre, Maxime Sirvins et Lucas Sarafian.

Note : cet article est mis à jour en fonction de l’actualité.

Une main tendue à l’extrême droite. Selon notre recensement, 28 candidats Ensemble ou Les Républicains (LR) ont annoncé se maintenir au second tour des législatives alors qu’ils étaient arrivés en troisième position au premier tour. En renonçant au barrage républicain, que la gauche s’est pourtant résignée à faire sur une centaine de circonscriptions, ces candidats favorisent mécaniquement le Rassemblement national. D’autres n’ont pas encore pris position : à quelques heures du dépôt des candidatures pour le second tour, il est encore un seul à s’être murés dans le silence depuis les résultats de dimanche soir sur 106 candidats concernés, à l’heure où nous écrivons ces lignes.

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Alors que toutes les composantes du Nouveau Front populaire ont annoncé un désistement systématique de leurs candidats s’ils arrivaient en troisième position, les candidats Ensemble, Les Républicains ou Horizons commencent, petit à petit, à prendre leur responsabilité en ne participant pas au second tour. Malgré tout, il reste encore plusieurs dizaines de réfractaires.

Ces attitudes sont aussi la conséquence des consignes particulièrement floues des représentants de ces trois partis. Dans une courte allocution au cours de la soirée électorale, le Premier ministre, Gabriel Attal, a appelé au désistement des candidats Ensemble au profit « de candidats qui défendent les valeurs de la République ». Celui qui n’a pas su l’emporter dès le premier tour dans la 10e circonscription des Hauts-de-Seine n’a même pas le courage de nommer explicitement La France insoumise, qu’il renvoie dos à dos avec le Rassemblement national.

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Édouard Philippe nage dans la même indécence : « Pas une voix pour le RN, pas une voix pour LFI. » La direction des Républicains a, elle, oublié tout propos clair contre l’extrême droite en ne donnant aucune « consigne nationale ». « Nous laissons les Français s’exprimer en conscience », a-t-elle affirmé dans un communiqué.


Ces candidats qui ont annoncé se maintenir

2e circonscription de l’Allier

Le candidat LR, Romain Lefebvre (19,67 %), a choisi de se maintenir face à Jorys Bovet, candidat RN (34,33 %) et Louise Héritier, candidate LFI-NFP (24,06 %). Cité par La Montagne, il a déclaré : « On voit que l’on est aujourd’hui en capacité de se maintenir pour le second tour. Avec Didier Lindron (son suppléant), on aura plaisir à maintenir cette candidature pour rester logique dans notre démarche et de proposer cette alternative républicaine. »

3e circonscription de l’Ardèche

Fabrice Brun (ex-LR, DVD) arrive troisième avec 26 % des voix, derrière Florence Pallot (LFI-NFP, 28 %) et Cyrille Grangier (RN, 32 %). Fabrice Brun a annoncé se maintenir pour le second tour.

1re circonscription des Alpes-Maritimes

Le député sortant LR Eric Ciotti, qui s’est allié avec le RN, est arrivé en tête avec 41,04 % des voix. Il arrive devant le candidat NFP-LFI Olivier Salerno (26,62 %) et le candidat de l’ancienne majorité présidentielle Graig Monetti (22,79 %). Ce dernier a annoncé sur X (ex Twitter) maintenir sa candidature, estimant être « le plus à même de rassembler ». « Face à la trahison et à la honte faite à Nice et aux Niçois, battre Eric Ciotti et le RN est à portée de mains », a-t-il poursuivi.

14e circonscription des Bouches-du-Rhône

Anne-Laurence Petel (28,91 %), la députée sortante du camp macroniste, refuse de se désister face à Gérault Verny (RN, 31,65 %), en tête, et Jean-David Ciot (PS-NFP, 29,48 %). Elle justifie ce choix par « le barrage contre les extrêmes ». « Nous ne sommes pas garantis que laisser au second tour les deux blocs RN et NFP tout seuls ne fassent pas passer le RN », argumente Anne-Laurence Petel.

1re circonscription de Corrèze

Francis Dubois, candidat LR (28,64 %), est devancé par la candidate RN Maïtey Pouget (30,89 %) et l’ex-président socialiste et désormais candidat NFP, François Hollande (37,63 %). Dubois a annoncé ne pas vouloir se désister, car « nous sommes la seule droite capable de battre François Hollande, le candidat du Nouveau Front populaire » tout en estimant que le RN « peine à conserver son score des européennes avec une candidate incapable de défendre vos intérêts ».

4e circonscription de la Drôme

Le candidat du RN, Thibaut Monnier, est arrivé en tête avec 38 % des voix, devant Isabelle Pagani, PS-NFP (26,27 %). La députée sortante, Emmanuelle Anthoine (LR), arrivée en 3e position (23,98 %), appelle au désistement d’Isabelle Pagani. « Avec la gauche, c'est dans un mouchoir de poche. Je suis la seule à pouvoir faire en sorte que le Rassemblement national ne l'emporte pas sur notre circonscription. J'appelle Madame Pagani à se désister face à moi, les électeurs qui m'ont fait confiance ne voteront jamais pour la candidate du Nouveau Front populaire. On a encore dans ce pays des sociaux-démocrates qui tiennent à nos valeurs et pour qui je peux être un remède face à la situation que nous connaissons. »

2e circonscription du Finistère

Le député sortant, Jean-Charles Larsonneur (Divers centre), qualifié de justesse (18,5 %), a décidé de maintenir sa candidature face à Pierre-Yves Cadalen (LFI-NFP), arrivé en tête (35,28 %) devant le Rassemblement national (22,6 %). « Je serai le candidat rassembleur », fait-il valoir, donnant, selon lui, « une possibilité de voter pour autre chose que pour la France insoumise ou le Rassemblement national ».

9e circonscription de Haute-Garonne

Le candidat de la majorité présidentielle, Florian Delrieu, qui est arrivé en troisième position en ayant obtenu 22,36 % des voix a décidé de se maintenir. Christine Arrighi, la députée écologiste candidate pour le Nouveau Front populaire, est arrivée en tête avec 47,5 % des voix. Elle devance la candidate du RN Caroline Beout (24,8 %). Florian Delrieu a déclaré sur X (anciennement Twitter) : « La circonscription ne présentant pas de risque RN, je maintiens ma candidature afin de continuer à défendre nos valeurs et notre démocratie. Jusqu’au 7 juillet, ne laissons rien aux extrêmes. »

2e circonscription de Loire

Andrée Taurinya, candidate LFI-NFP arrive en tête avec 43,09 %. En deuxième position arrive le candidat du RN, 27,13 %. Eric Le Jaouen, de l’UDI, fait 23,08 % et a annoncé sur Facebook le maintien de sa candidature : « Seule notre liste peut faire barrage au communautarisme, aux idées et postures anti-républicaines. »

2e circonscription du Lot

La candidate Renaissance Huguette Tiegna (26,96 %) se place en troisième position, derrière le candidat RN Gérard Raymond Blanchet (30,38 %) et Christophe Proença, du PS-NFP (38,22 %). Elle a annoncé maintenir sa candidature, dans un communiqué cité par La Dépêche du Midi : « L’implosion de la droite républicaine, les divisions internes du PS, les purges de l’année du côté des insoumis et les graves contradictions et insuffisances du RN ont révélé qu’aucun d’entre eux n’était en mesure de relever les défis du moment et de conduire la destinée de notre pays. »

1re circonscription du Puy-de-Dôme

Hervé Prononce (Horizons-Ensemble), arrivé en troisième position (24,08 % des voix), a confirmé qu’il serait candidat au second tour face à la députée insoumise sortante Marianne Maximi (Nouveau Front populaire, 38,14 % au premier tour) et Louis Clément (Rassemblement national, 27,49 %). « On se maintient, explique Hervé Prononce, cité dans La Montagne, on a eu une réunion avec les instances du parti Horizons et on est dans la ligne tracée par Édouard Philippe, qui a dit qu'il ne fallait pas d'extrêmes, ni LFI, ni RN. S'il y avait eu un candidat de l'arc républicain, par exemple un socialiste, on se serait retiré. Mais là, on a une mélenchoniste, Marianne Maximi, que je trouve de plus en plus dure. »

4e circonscription des Pyrénées-Atlantiques

Le candidat du Nouveau Front populaire, Iñaki Echaniz, arrive en tête, avec 38,01 % des votes. En seconde position, Sylviane Lopez (Rassemblement national) remporte 25,62 % des voix. En troisième place, Jean Lassalle (Résistons !) a emporté 18,05 % des voix. Il a annoncé se maintenir, « peu importe ce qu’il se passera au second tour ».

7e circonscription de l'Oise

« En cette heure grave pour notre pays, je suis plus que jamais déterminé à porter nos valeurs face à la montée des extrêmes. Dans notre 7ème circonscription de l’Oise, je suis effectivement le seul à pouvoir faire barrage au RN », a annoncé ce lundi, le candidat LR et député sortant Maxime Minot. Il arrive pourtant en troisième position, avec seulement 21,5% des suffrages, loin derrière Loïc Pen (PCF-NFP) qui récolte 27,2% des suffrages et le candidat du RN qui passe la barre des 40%.

1re circonscription de Seine-et-Marne

La candidate Modem Aude Luquet (29,04 %), arrive derrière le candidat de l’alliance entre le Rassemblement national et Eric Ciotti, Théo Michel (32,95 %), et le candidat LFI-NFP Arnaud Saint-Martin (33,31 %). Auprès de La République Seine-et-Marne, elle a annoncé se maintenir : « Il y a peut-être des consignes de la majorité, mais nous avons aussi nos échanges au sein du Mouvement démocrate (Modem). Quand on regarde les scores, rien n’est gagné et rien n’est perdu, l’écart ne représente même pas 2 000 voix. »

2e circonscription de la Somme

Hubert de Jenlis, candidat Ensemble, arrive troisième (25,23 %). Zahia Hamdane (29,5 %), candidate LFI-NFP, arrive en tête devant le candidat RN (27,46 %). Sur Twitter, le candidat du camp présidentiel a annoncé se maintenir, assurant que « grâce au report de voix, la victoire est à portée de main au second tour, face aux extrêmes LFI et RN ».

1re circonscription de la Vienne

Séverine Saint-Pé (Horizons), arrivée en troisième position (28,85%) a annoncé ce lundi maintenir sa candidature. Juste devant elle, pourtant, la candidate RN (28,93%) talonne Lisa Belluco (EELV-NFP) qui a recueilli plus de 33% des suffrages.

1re circonscription de la Haute-Vienne

C’est le député sortant, Damien Maudet, LFI-NFP (37 %), qui arrive en tête devant le candidat d’extrême-droite (32,8 %). L’alliance divers centre, représentée par Isabelle Négrier, arrive bien plus loin en troisième position (27 %). Celle-ci n’a pas communiqué, mais, selon la presse locale, elle devrait se maintenir au second tour. Le président des Républicains en Haute-Vienne, qui fait partie de cette alliance du centre et de la droite, a annoncé que ces candidats ne se retireraient pas.

2e circonscription de la Haute-Vienne

La candidate RN devance de 19 voix seulement Stéphane Delautrette, candidat PS-NFP ! Loin derrière, la candidate du centre se qualifie pour le second tour avec 24,4% des suffrages. Celle-ci n’a pas encore annoncé officiellement sa position mais la presse locale assure qu’elle devrait se maintenir. Le président des Républicains en Haute-Vienne, qui fait partie de cette alliance du centre et de la droite, a annoncé que ces candidats ne se retireraient pas.

3e circonscription de la Haute-Vienne

Manon Meunier, députée sortante LFI-NFP, arrive en tête de seulement 180 voix devant le RN (35,18 % contre 34,85 %). Le troisième, un candidat divers centre, Gilles Toulza, arrive bien plus loin avec 26,65 % des suffrages. Celui-ci n’a, à ce jour, pas communiqué sa position officielle. Cependant, la presse locale assure qu’il se maintiendra « probablement ». Le président des Républicains en Haute-Vienne, qui fait partie de cette alliance du centre et de la droite, a annoncé que ces candidats ne se retireraient pas. Dans un post sur Facebook avant le premier tour, Gilles Toulza renvoyait dos à dos les « extrêmes ».

3e circonscription du Val-de-Marne

Loïc Signor, candidat Renaissance, est en troisième position (23,77 %), derrière Arnaud Barbotin, le candidat d’alliance entre Eric Ciotti et Jordan Bardella (27,31 %), et le député sortant insoumis Louis Boyard (42,17 %). Dans un communiqué, Loïc Signor a indiqué se maintenir, car « face aux extrêmes, je porte la candidature des forces qui veulent bâtir une majorité parlementaire républicaine, d’apaisement et de progrès pour notre pays ».

1re circonscription du Val d’Oise

Le candidat LFI-NFP, Maximilien Jules-Arthur (30,8 %), n’a que trois points à rattraper sur la candidate du RN (33,65 %), arrivée en tête à l’issue du premier tour. Emilie Chandler, la macroniste, est bien plus loin derrière (25,46 %), à plus de huit points du Rassemblement national. Pourtant, dans un post sur Instagram, celle-ci a annoncé se maintenir pour le second tour. « Votre confiance m’oblige. J’ai besoin de vous pour bâtir le rempart républicain contre le RN et LFI », a-t-elle écrit sur le réseau social.

7e circonscription du Val d’Oise

Dominique Da Silva, le député sortant (Ensemble), est arrivé en troisième position (23,13 %). C’est un candidat du PS-NFP, Romain Eskenazi qui est arrivé en tête (37,94 %), devant le RN (27,25 %). Malgré cela, le candidat macroniste a annoncé se maintenir. « Je ne peux pas choisir entre un Nouveau Front populaire qui profite du programme de LFI et le Rassemblement national. Je reste le candidat du bloc central. Le programme de la gauche est ruineux pour le pays. Je combats de la même manière les deux extrêmes », a-t-il déclaré dans la presse locale.


Ceux qui n’ont toujours pas rendu publique leur décision

Pierre Morel-A-L’Huissier (Divers Droite), dans la 1re circonscription de Lozère

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