Laissez les personnes non-blanches faire de la politique !

Kaoutar Harchi souligne la place centrale des militants des quartiers populaires au sein de la gauche, dont certains ont pu accéder aux bancs de l’Assemblée nationale. Et qui laissent espérer pour ce pays un autre avenir que celui qui semblait, le 7 juillet, scellé.

Kaoutar Harchi  • 11 juillet 2024
Partager :
Laissez les personnes non-blanches faire de la politique !
Rassemblement place de la République, à Paris, le 7 juillet 2024, au soir des résultats du second tout des élections législatives anticipées.
© Maxime Sirvins

Le fait que le RN n’ait pas obtenu la majorité à l’Assemblée nationale, le 7 juillet, nous rappelle qu’aussi fort que soit le sentiment d’une histoire qui se répète, rien n’est jamais joué d’avance. Il est toujours possible de déjouer le cours des choses, d’inverser les courbes des sondages, de faire advenir un autre réel. Cela n’a pourtant été possible qu’au regard d’un intense travail des militant·es des quartiers populaires qui ont réalisé, en un temps très court, et dans des conditions difficiles, un insensé travail de conviction auprès des populations issues de l’immigration postcoloniale, les poussant à aller voter et à participer à la vie politique française.

L’une des caractéristiques de la condition non-blanche est d’être tenu pour un être gouverné et non qui gouverne.

En France, être perçu comme « arabe », « noir », « musulman », « asiatique », « rrom », prôner l’antiracisme politique, et vouloir faire de la politique en empruntant le chemin de l’élection nationale relève de l’impossible. En effet, l’une des caractéristiques de la condition non-blanche est d’être tenu pour un être gouverné et non qui gouverne.

Sur le même sujet : Dans l’Oise, la difficile persuasion des électeurs du Rassemblement national

En ce sens, que des hommes et des femmes – je pense à Amal Bentounsi, Adel Amara, Amadou Ka, Abdelkader Lahmar, Lyes Louffok, Aly Diouara, Sabrina Ali Benali, Mohamed Awad – investis par le Nouveau Front populaire, aient pu affirmer haut et fort leur volonté de participer au gouvernement de la Cité en plaçant au cœur de leur discours la justice raciale est un pas important.

Sur le même sujet : Abdelkader Lahmar, l’enfant de Vaulx-en-Velin qui vise l’Assemblée nationale

Certes, tous et toutes n’ont pas été élu·es. Tous et toutes ont pourtant fait des scores plus qu’honorables. Je veux croire que c’est un début qui augure l’apparition, au sein de l’arène politique française, non seulement de visages, non seulement de corps, mais plus que jamais d’idées révolutionnaires qui donneront à la France, je l’espère, un autre avenir que celui qui semblait, le 7 juillet, scellé.

Recevez Politis chez vous chaque semaine !
Abonnez-vous
Soutenez Politis, faites un don.

Chaque jour, Politis donne une voix à celles et ceux qui ne l’ont pas, pour favoriser des prises de conscience politiques et le débat d’idées, par ses enquêtes, reportages et analyses. Parce que chez Politis, on pense que l’émancipation de chacun·e et la vitalité de notre démocratie dépendent (aussi) d’une information libre et indépendante.

Faire Un Don

Pour aller plus loin…

Renouer avec l’émancipation !
Essai 19 février 2025 abonné·es

Renouer avec l’émancipation !

L’historienne Michèle Riot-Sarcey s’interroge, dans un ouvrage ambitieux et innovant, sur les transformations des luttes pour l’émancipation des individus, des classes sociales et des minorités.
Par Olivier Doubre
Judith Davis : « Ce que vous vivez dans votre salon est un problème politique »
Entretien 19 février 2025 abonné·es

Judith Davis : « Ce que vous vivez dans votre salon est un problème politique »

Son cinéma a peu d’équivalent : drôle et politique, direct et inventif dans sa forme. Bonjour l’asile en est la parfaite incarnation. Son deuxième long métrage s’éloigne de notre monde de fous pour constituer un abri et rêver à un antidote. La cinéaste explique ici ce qui a présidé à sa réalisation.
Par Christophe Kantcheff
Des expulsions en série comme mode de vie politique
Intersections 18 février 2025

Des expulsions en série comme mode de vie politique

La philosophe Fabienne Brugère, revient sur la brutalité de l’expulsion, une dynamique fondamentale de la mondialisation étudiée par la sociologue et économiste, Saskia Sassen, dans un livre de 2016, prochainement traduit aux éditions Gallimard.
Par Fabienne Brugère
François Purseigle : « La gauche paysanne doit toucher ceux qui ne partagent pas toutes ses revendications »
Entretien 12 février 2025 abonné·es

François Purseigle : « La gauche paysanne doit toucher ceux qui ne partagent pas toutes ses revendications »

Les élections des chambres d’agriculture ont eu lieu fin janvier et vont bouleverser le paysage syndical pour six ans. Spécialiste des mondes agricoles depuis vingt ans, le sociologue livre une analyse rigoureuse des résultats de ce scrutin.
Par Vanina Delmas