La République, c’est le barrage

Depuis la dissolution, l’ennemi médiatique et politique était LFI, voire le Nouveau Front populaire, pendant que l’extrême droite était épargnée. Il était temps que le sursaut intervienne. La République, ce sont celles et ceux qui, par-delà les désaccords politiques font barrage à l’extrême droite.

Pierre Jacquemain  • 2 juillet 2024
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La République, c’est le barrage
Rassemblement place de la République à Paris, dimanche 30 juin, au soir du premier tour des législatives anticipées.
© Maxime Sirvins

Depuis la dissolution et la campagne de premier tour des législatives, l’ennemi médiatique et politique était La France insoumise quand ça n’était pas entièrement le Nouveau Front populaire. On a passé des semaines et des semaines à dénoncer le supposé antisémitisme de Jean-Luc Mélenchon et de ses petits camarades. Sans nuance aucune. Ils sont hautement critiquables à bien des égards. Certains ont joué avec le feu et c’est moralement condamnable tant ils ont fait du mal, hier aux partenaires de gauche, aujourd’hui à la nouvelle coalition, notamment à travers l’omniprésence de l’indésirable.

Comme si le RN n’avait pas d’histoire, pas de passé, pas d’héritage.

Mais il y a quelque chose d’insupportable dans ce que nous avons vécu et dont nous retrouvons encore des traces aujourd’hui, alors que s’ouvre une semaine décisive. Pendant que la gauche était accusée d’antisémitisme, l’extrême droite était lavée de tout soupçon. Comme si le RN n’avait pas d’histoire, pas de passé, pas d’héritage. Comme si le RN n’avait pas, parmi ses candidats, des libraires négationnistes qui nient l’existence de la Shoah ou d’autres qui jugent « que Hitler n’en a peut-être pas assez tué », en parlant des gens du voyage. Sans parler de ceux qui veulent « brûler les PD » ou lancent du « bougnoules » aux Arabes. Comme si certains au RN ne considéraient pas que « l’IVG était un génocide de masse ».

Qu’avons-nous fait de la France ?

Pourquoi l’extrême droite a-t-elle été épargnée à ce point ? Comme si nos frères et nos sœurs noir·es, arabes, juif·ves, musulman·es, – présumé·es ou non –, roms, LGBTQI, handicapé·es, ne subissaient pas depuis des semaines un déferlement de haine. Comme si, finalement, la désinhibition de la parole et des violences racistes, sexistes, homophobes, transphobes était un fantasme. Une invention pour détourner le regard de cette gauche extrême, quand ça n’est pas l’extrême gauche.

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La gauche a été rendue infréquentable parce que l’extrême droite mettait enfin la cravate à l’Assemblée nationale, d’où elle siégeait sagement. Qu’avons-nous fait de la France ? Qu’ont-ils fait de la France ? Comment avons-nous pu laisser penser que le danger venait de la gauche et non de l’extrême droite ? Sous la cravate, le racisme. Sous le vernis, la haine de l’autre, de l’étranger, de la différence. C’est l’ADN de l’extrême droite. Son moteur. De même qu’elle n’aime pas les femmes, les jeunes, les pauvres, les vieux, les artistes, les syndicalistes, les écologistes. Il faut ne pas avoir observé les expériences des apprentis fascistes italiens, polonais, hongrois ou argentins pour considérer que l’accusation relève de la pure caricature.

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Alors non, la gauche n’est pas l’extrême droite. Et LFI n’égale pas le RN. Il était temps que le sursaut intervienne. Même si timide sursaut. Non, la gauche n’est pas sortie du champ républicain. Et telle qu’elle se présente à nous, elle incarne à la fois l’honneur – de par ses désistements républicains – et l’espoir – grâce à sa nouvelle coalition et ses nouveaux visages qui la portent. La République, ce sont eux ! Ce sont celles et ceux qui, par-delà les désaccords politiques – macronistes, centristes compris –, font barrage à l’extrême droite. Ceux-là ne confondent pas adversaires politiques et ennemis de la République.

À l’inverse, ceux qui plaident le « ni-ni » prennent la responsabilité durable et immense de donner une majorité absolue à l’extrême droite. Ceux-là sont sortis du champ républicain à tout jamais. Il ne faut pas se raconter d’histoire, la gauche ne gagnera pas les élections ce dimanche. La seule victoire possible,
c’est la défaite du RN. Et elle est à notre portée !

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