« Ne nous trahissez pas » : à Paris, un rassemblement pour exhorter le NFP à gouverner

Plusieurs dizaines de rassemblements, à l’initiative de la CGT Cheminots, se sont tenus ce jeudi partout dans l’Hexagone. À Paris, quelques milliers de personnes se sont déplacées pour demander la mise en place, au plus vite, d’un gouvernement du Nouveau Front populaire.

Pierre Jequier-Zalc  • 18 juillet 2024 abonné·es
« Ne nous trahissez pas » : à Paris, un rassemblement pour exhorter le NFP à gouverner
Sophie Binet, de la CGT, lors du rassemblement à Paris le 18 juillet 2024 pour appeler à l'unité des partis membres du Nouveau front populaire.
© Pierre Jequier-Zalc

« Ne nous trahissez pas ! Ne nous trahissez pas ! ». Ils sont plusieurs centaines, ce jeudi midi, place de la République, à scander d’une seule voix ce slogan. À la tribune, Sophie Binet, secrétaire générale de la CGT, embraye : « Ne nous décevez pas avant même d’avoir gouverné ». Le message est lancé aux quatre partis qui forment le Nouveau Front populaire qui, depuis plus de 10 jours maintenant, n’arrivent pas à s’entendre sur le nom d’un Premier ministre.

Pourtant, ce message ne devait pas, initialement, être au cœur de ce rassemblement. En effet, ce dernier a été appelé, il y a plus d’une semaine, par la fédération de la CGT Cheminots, soutenu, ensuite, par d’autres organisations comme la Ligue des droits de l’Homme (LDH) et Attac. Le mot d’ordre, à la base, était de mettre la pression sur Emmanuel Macron, en ce jour de rentrée parlementaire, pour que celui-ci reconnaisse sa défaite et nomme un Premier ministre issu des rangs du camp arrivé en tête – même si non majoritaire, le NFP.

Sur le même sujet : Après des jours de négociations, le Nouveau Front populaire en proie à mille et un doutes

Mais d’Emmanuel Macron, ce jeudi, place de la République, il n’aura finalement pas été beaucoup question. Car tous les regards sont dorénavant tournés vers les négociations internes au NFP, lesquelles s’éternisent, jour après jour. Et les mots sont durs, à la hauteur, certainement, d’une déception qui croît de voir les partis de gauche se déchirer. « Mettez-vous au niveau des responsabilités que vous ont donné les électeurs », tonne ainsi Thierry Nier, numéro 1 de la fédération CGT Cheminots.

Mettez-vous au niveau des responsabilités que vous ont donné les électeurs.

T. Nier

Même son de cloche dans la bouche de Patrick Beaudoin, président d’honneur de la LDH : « Ce que nous voyons depuis dix jours est désolant pour nous, mouvement social, qui sommes unis. Vous, les quatre partis de la gauche qui constituez le NFP, mettez-vous d’accord et à la hauteur de l’espoir suscité ! » Des saillies terminées sous les applaudissements de la foule.

« Chaque jour perdu est un jour gagné pour l’extrême droite »

Derrière cette tentative de mettre la pression sur les dirigeants du NFP, se cache aussi la peur que cela serve au Rassemblement national. « Soyez à la hauteur de nos luttes », tance ainsi Sophie Binet pour qui, « chaque jour de perdu est un jour de gagné pour l’extrême droite ». À Politis, elle confie sa crainte : « Si la gauche déçoit avant même de gouverner, c’est certain que ce sera le carton plein pour l’extrême droite la prochaine fois ».

Dans la foule, tous ont encore en mémoire la crainte qui les a habités lorsqu’Emmanuel Macron a dissous l’Assemblée nationale. Et la joie qui les a épris le 7 juillet quand le RN – à qui les sondages promettaient une majorité –, a été défait dans les urnes au profit du NFP. « J’ai pleuré de soulagement pendant une heure devant ma télé », souffle Fabrice, la cinquantaine. « Je ne veux pas revivre cette crainte rapidement. Et pour ça, il faut que la gauche soit unie et à la hauteur. Ces derniers jours, j’ai honte ! »

Mobilisation populaire

Ce rassemblement a aussi surtout été l’occasion de rappeler que la mobilisation populaire sera très certainement nécessaire pour obtenir la mise en place du programme de rupture avec la politique macroniste porté par le NFP. « Il n’y a que par la mobilisation qu’on y arrivera », note Youlie Yamamoto, porte-parole d’Attac. Si la période – en plein milieu des congés d’été et à la veille des Jeux olympiques et paralympiques – n’a pas permis une mobilisation importante ce jeudi, le rendez-vous est pris à l’automne. Comme nous vous l’écrivions déjà dans Politis il y a quelques jours, l’hypothèse d’un mouvement social à la rentrée prend de l’ampleur.

Sur le même sujet : « Désormais tout commence »

En coulisse, les organisations syndicales en discutent entre elles depuis quelque temps déjà. « On avance ensemble, étape par étape, et en fonction de l’évolution de la situation pour construire la chose la plus unitaire possible », promet Sophie Binet qui évoque, par exemple, une possible mobilisation lors du vote du parlement sur le futur projet de loi de financement de la Sécurité sociale qui pourrait permettre l’abrogation de la réforme des retraites. Si la numéro 1 de la CGT ne veut pas plus s’avancer, elle conclut : « Ce qui est d’ores et déjà sûr, c’est qu’il y aura besoin d’un rapport de force social pour que les revendications des salariés soient entendues ». Un rapport de force qui sera, toutefois, plus facile à instaurer avec un gouvernement du NFP. Et c’est loin d’être gagné !

Recevez Politis chez vous chaque semaine !
Abonnez-vous