Catastrophe(s) !
Pour Maryse Souchard, universitaire, l’allocution télévisée égocentrée du président Macron, ce mardi 23 juillet, n’annonce rien de bon. Pour trois raisons qu’elle détaille.
L’exercice était annoncé comme une « interview » (1). Ce n’en fut pas une, mais alors pas du tout : le discours s’est déroulé sans tenir compte ni des interruptions ni des questions, revenant sans cesse aux propos prévus, à l’exception d’un ou deux brefs moments d’écoute de la part de celui qui tenait à expliquer aux Français comment et pourquoi ils avaient voté.
Entretien donné par le Président de la République, le 23 juillet.
Cette allocution, donc, est annonciatrice de catastrophes, de plusieurs catastrophes. La plus évidente concerne évidemment la désinvolture avec laquelle le Président a balayé la candidature de madame Lucie Castets au poste de Premier ministre. Circulez, il n’y a rien à voir ! Il est vrai que la gauche, dont certains disaient dans le passé qu’elle était la plus bête du monde – et parfois, on peut se demander s’ils n’avaient pas raison – a mis bien du temps à proposer une personnalité crédible à ce poste. Pour autant, cela méritait mieux qu’une claque magistrale s’il s’agissait de montrer du respect pour l’expression démocratique.
Magistral, il le fut, le Président. Il a tout bien expliqué : pourquoi il n’avait pas gagné les élections législatives, pourquoi il gardait le pouvoir de faire quand même comme il voulait, pourquoi il n’allait écouter que lui, comme il semble le faire de plus en plus.
Un Président enfermé dans sa dialectique qui n’entend plus rien.
C’est la deuxième catastrophe : un Président enfermé dans sa dialectique qui n’entend plus rien, qui oublie comment et grâce à qui il est arrivé au pouvoir, qui pense que tout va se dérouler comme il le veut simplement parce qu’il le veut. À force de répéter que les « pôvres » sont responsables de la montée de l’extrême droite, on pourrait en oublier que le XVIe arrondissement de Paris et Neuilly sont les lieux qui, dans la capitale, ont le plus voté pour le FN-RN.
Le pire choix
La troisième catastrophe, et sans doute, la plus dangereuse, ce sont les priorités que le Président a fixées aux futurs gouvernants : sécurité et immigration… Le programme du FN-RN et rien que ça. Cela fait des années que l’on sait – les chercheurs, les penseurs qui travaillent à comprendre la montée, inexorable, de l’extrême droite le disent et le répètent – que le pire choix, pour les démocrates et les républicains est d’adopter ses priorités. Partout où cela s’est produit, l’extrême droite a gagné. Cela s’est particulièrement réalisé localement en France, mais aussi nationalement chez certains de nos voisins.
À refuser d’entendre le résultat du vote, à se penser le maître d’une école appelée France, à improviser ses priorités au gré du vent qui tourne, le Président est en train, sans doute plus qu’aucun autre avant lui, d’assurer le pays d’une victoire prochaine de l’extrême droite. N’est-il pas allé jusqu’à laisser entendre une nouvelle dissolution de l’Assemblée dans un an ? Les vingt-deux dernières années de front républicain risquent de n’être alors qu’un souvenir…
Au secours !
PS : Et ce ne sont là que trois des catastrophes de ce discours égocentré…
Des contributions pour alimenter le débat, au sein de la gauche ou plus largement, et pour donner de l’écho à des mobilisations. Ces textes ne reflètent pas nécessairement la position de la rédaction.
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