« Face à la machine administrative, la voix des étudiants est ignorée »

Depuis l’instauration de Parcoursup, à chaque rentrée, de nombreux étudiants se retrouvent sans affectation. Saïd raconte son calvaire.

• 18 septembre 2024
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« Face à la machine administrative, la voix des étudiants est ignorée »
© Yoab Anderson / Unsplash

Depuis l’instauration de Parcoursup, à chaque rentrée universitaire, de nombreux étudiants se retrouvent sans affectation et font face à une administration de plus en plus rigide. Les inégalités d’accès aux études supérieures s’accroissent, à plus forte raison pour les étudiants étrangers. Saïd, en quête d’une simple réorientation, raconte son calvaire.


Je m’appelle Saïd, je suis étudiant étranger à l’université Paris-Nanterre. Aujourd’hui, je souhaite partager mon expérience et les difficultés que je rencontre concernant mes études supérieures, en particulier ma volonté de me réorienter en licence 1 administration économique et sociale (AES). Mon parcours, qui aurait dû être une étape sereine vers la réalisation de mes ambitions académiques, s’est transformé en un véritable parcours d’obstacles.

Tout commence par mon inscription en licence 1 de philosophie à l’université Paris-Nanterre pour l’année 2023-2024. Ce choix, bien qu’initialement opportun, ne correspondait pas à mes attentes ni à mon profil académique. Étant titulaire d’un baccalauréat scientifique, j’ai rapidement ressenti un décalage entre la formation philosophique et mes aspirations profondes. Depuis plusieurs années je souhaitais en effet me spécialiser dans le domaine de l’administration économique et sociale, et j’avais d’ailleurs obtenu ma première année de licence AES à l’université des Comores lors de l’année 2022-2023.

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Au fil du premier semestre en philosophie, ma volonté de me réorienter s’est intensifiée. Conscient que ma véritable vocation se trouvait ailleurs, j’ai postulé en décembre 2023, via la plateforme eCandidat, pour intégrer la licence 1 AES de l’université Paris-Nanterre. Malheureusement, ma demande a été refusée avec un motif que j’ai trouvé sévère et injuste. On a jugé que je n’étais pas en capacité de suivre les cours proposés au deuxième semestre. Cette décision m’a laissé perplexe, car non seulement je détiens un diplôme attestant de ma réussite en licence 1 AES, mais, en plus, les disciplines du second semestre, citées pour justifier ce refus, figuraient déjà dans mon relevé de notes de ma première année à l’université des Comores.

Face à ce refus que je considère comme une injustice, j’ai pris la décision de faire un recours pour demander une réévaluation de mon dossier. À ma grande déception, la présidence de l’université Paris-Nanterre a rejeté ma demande, sans tenir compte de mon parcours et des éléments de preuve que j’avais fournis. Cela m’a plongé dans une frustration profonde, mais je n’ai jamais perdu espoir. Déterminé à poursuivre mes études dans la filière qui correspond à mes ambitions, j’ai une nouvelle fois postulé, sur Parcoursup. Cependant, mes candidatures ont été refusées dans plusieurs établissements et placées en liste d’attente dans d’autres, y compris à l’université Paris-Nanterre.

Malgré ces obstacles, je refuse de baisser les bras.

Me voilà aujourd’hui dans une situation identique à celle de l’année dernière, toujours en quête d’une place dans la filière qui correspond à mon projet de vie et à mon parcours académique.

Malgré ces obstacles, je refuse de baisser les bras. J’ai décidé de me tourner vers l’Unef Nanterre ainsi que vers le Collectif des sans-facs de Nanterre, avec l’espoir de trouver du soutien pour obtenir une inscription dans la filière de mon choix, et avec la volonté de m’associer à d’autres étudiants afin de faire valoir nos droits. Nous ne pouvons pas laisser des décisions bureaucratiques, dictées par des personnes qui ne connaissent pas nos réalités personnelles et nos parcours, nous priver de notre droit à l’éducation et de notre liberté de choisir notre avenir.

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Mon histoire n’est pas unique. Comme beaucoup d’étudiants étrangers ou en situation de réorientation, je me retrouve confronté à une machine administrative rigide, où la voix des étudiants semble trop souvent ignorée. Ce que je demande, ce n’est pas un traitement de faveur, mais une évaluation juste et équitable de mon dossier, fondée sur mes compétences et mon parcours. Mon expérience en licence 1 AES et mes aspirations personnelles devraient peser davantage dans la balance que des critères standardisés qui ne prennent pas en compte les particularités de chaque étudiant.

Je tiens à témoigner aujourd’hui de cette situation dans l’espoir que mon histoire puisse contribuer à une réflexion plus large sur la nécessité de réformer les processus d’orientation et d’admission dans l’enseignement supérieur, afin qu’ils soient plus inclusifs et adaptés à la diversité des parcours étudiants.

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