« Tenir debout » : les dessous des Miss
Avec ce premier spectacle personnel, Suzanne de Baecque interroge son art avec acuité.
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Tenir debout / Suzanne de Baecque / jusqu’au 6 octobre au Théâtre du Rond-Point, puis en tournée.
Suzanne de Baecque a beau n’être sortie diplômée qu’il y a une poignée d’années de l’École du Nord, à Lille, elle a déjà une manière bien à elle d’appréhender le plateau. Sa façon curieuse de faire de l’absurde, du burlesque, d’ouvrir des portes vers le sérieux, voire le tragique, séduisent Alain Françon, qui l’a mise en scène dans La Surprise de l’amour de Marivaux (2021) puis Un chapeau de paille d’Italie (2023).
En parallèle de ces aventures comiques, elle a exploré dans Vertige (2001-2021), avec Guillaume Vincent et les artistes de sa promotion, un registre tout autre. Largement autofictive, cette pièce racontant les désirs de théâtre de jeunes comédiens a certainement nourri Suzanne de Baecque pour la création de Tenir debout.
Théâtre intranquille
Ce premier spectacle personnel est en effet né lui aussi à l’École du Nord, et dit beaucoup de celle qui le porte, accompagnée de Raphaëlle Rousseau (en alternance avec India de Almeida). Le récit que nous livre Suzanne, dans une adresse directe très fine, est le fruit d’une expérience personnelle menée dans le cadre du « Croquis de voyage », expédition d’un mois en solitaire, sans téléphone, proposée aux élèves de 3e année à Lille. En faisant de cette genèse l’un des éléments de sa pièce faite de fragments plutôt hétérogènes, Suzanne de Baecque se fait autrice d’un théâtre intranquille, dont la place dans le monde est tout sauf gagnée.
Suzanne de Baecque témoigne d’un talent déjà bien affirmé.
C’est dans un milieu où les rivalités sont plus visibles, sinon plus grandes, que dans le sien, que Suzanne a choisi de s’immerger pour se dépayser, pour sortir de sa zone de confort, telle une actrice gonzo : celui des concours de Miss, où elle s’est portée candidate. Alternant narration, scènes de reconstitution – non sans un brin de caricature malicieuse –, de moments vécus et témoignages d’aspirantes reines de beauté, la comédienne, aidée de sa complice, raconte son expérience lors de l’élection Miss Poitou-Charentes 2020.
En s’amusant des distances et proximités entre l’artisanat du théâtre et la fabrique d’un concours de beauté, Suzanne de Baecque témoigne avec un talent déjà bien affirmé de la richesse des rapprochements inattendus, de leur capacité à ouvrir au théâtre de nouveaux possibles.