Michel Blanc, de rires et de larmes

Grande figure de la culture populaire, le comédien et réalisateur s’est éteint ce vendredi 4 octobre à l’âge de 72 ans.

Christophe Kantcheff  • 4 octobre 2024
Partager :
Michel Blanc, de rires et de larmes
Michel Blanc, aux Hospices de Beaune, le 16 novembre 2008.
© Jeff Pachoud / AFP

Après Anémone en 2019, Michel Blanc (1952-2024) vient de s’en aller, et l’émotion est plus que jamais à son comble – sans doute parce que la Thérèse du Père Noël est une ordure avait coupé les ponts depuis longtemps avec ses anciens camarades, on l’associait moins immédiatement avec ce passé. La disparition de Michel Blanc atteint directement un monument de la culture populaire qui vibre encore dans nombre de cœurs de nos contemporains, toutes générations confondues (ou presque) : les membres de la troupe du Splendid, et à travers cette belle équipe, les personnages qu’ils ont incarnés dans Les Bronzés (1978) – suivi l’année suivante des Bronzés font du ski, et beaucoup plus tard, du beaucoup moins inspiré Les Bronzés 3 (2006).

Il est en effet difficile de séparer Michel Blanc de Jean-Claude Dusse, petit homme fluet à moustache et au front (très) dégarni, dragueur spécialiste de la lose. L’acteur a d’ailleurs un temps été cantonné à ce type de rôles (ou à ceux d’hypocondriaque, ce qu’il était réellement dans la vie) dans des comédies à plus ou moins grand retentissement.

Palette

Son image change dans les années 1980 – peu après Papy fait de la Résistance (1983), autre immense succès auquel il participe avec ses potes du Splendid –, quand il incarne, dans Tenue de soirée (1986) de Bertrand Blier, un homosexuel sous emprise, obligé de se travestir. Aussi quand il passe derrière la caméra. Son premier long métrage est certes une comédie, Marche à l’ombre (1984), où il se donne un rôle proche de ce qu’il a déjà montré. En revanche, le suivant, Grosse fatigue (1993), raconte l’histoire sombre d’un célèbre acteur de cinéma, qu’il interprète, exclu de son existence publique et professionnelle par un sosie.

Et c’est ainsi que, peu à peu, le public cinéphile va découvrir que Michel Blanc a non seulement la trempe d’un acteur dramatique, mais qu’il est un grand comédien à la palette étendue. Plus que dans Monsieur Hire (1989), souvent cité, remake par un cinéaste sans envergure, Patrice Leconte, d’un classique de Julien Duvivier (Panique (1946), avec Michel Simon), Michel Blanc est impressionnant par sa présence dans Les Témoins (2007), d’André Téchiné, dont le scénario s’inspire de la création de l’association Aides au début de l’épidémie du sida.

Michel Blanc était un comédien complet.

Et dans L’Exercice de l’État (2011), de Pierre Schœller, où il incarne un grand commis de l’État croyant encore dans l’action publique alors qu’autour de lui les responsables politiques qui se disputent les postes ont tous cyniquement abandonné leurs convictions. La scène où Michel Blanc (plus exactement son personnage) écoute, en prenant son bain, le fameux discours de Malraux à l’occasion de la panthéonisation Jean Moulin est inoubliable.

Lors de la mort de Coluche, certains saluèrent son talent parce qu’il avait tenu un rôle « sérieux » dans Tchao Pantin. Ne commettons pas cette erreur : Michel Blanc était un comédien complet, et les rires qu’il a provoqués sont tout aussi admirables que les émotions qu’il a suscitées.

Cinéma
Temps de lecture : 3 minutes
Soutenez Politis, faites un don.

Chaque jour, Politis donne une voix à celles et ceux qui ne l’ont pas, pour favoriser des prises de conscience politiques et le débat d’idées, par ses enquêtes, reportages et analyses. Parce que chez Politis, on pense que l’émancipation de chacun·e et la vitalité de notre démocratie dépendent (aussi) d’une information libre et indépendante.

Faire Un Don