X/Twitter : partir ou rester ?
Alors que les rédactions du monde s’interrogent sur leur responsabilité à rester sur X et ainsi accompagner, voire légitimer, son climat nauséabond de désinformation et de haine, Politis a tranché : nous migrons progressivement vers Bluesky.
Partir ou rester ? Alors que le débat public dégénère sur X (ex-Twitter) et entraîne la démocratie par le fond, les rédactions du monde entier s’interrogent, de même que de prestigieuses ONG et associations, quand certaines ont déjà franchi le pas et rejoint d’autres plateformes, à l’instar de Bluesky. Au-delà de la seule question de X, la question qui se pose en réalité est la suivante : existe-t-il encore des espaces de débat possible ?
X n’a pas échappé d’abord à la droitisation du débat public puis à son extrême droitisation décomplexée.
Comprendre des espaces de débat où les règles du jeu démocratique ne sont pas biaisées, où ne règnent pas ni la confusion, ni la manipulation, ni le mensonge et le complotisme, ni la polarisation et la radicalisation comme X, propriété du nouveau ministre de l’efficacité de Donald Trump, Elon Musk, en est devenue la principale vitrine. Tout n’a pas commencé avec Musk. Déjà, Twitter concentrait tout ce qui se fait de plus violent et nauséabond en matière de racisme, d’antisémitisme, d’homophobie, de sexisme et de lesbophobie, de transphobie ou de grossophobie.
Des comptes anonymes pouvaient harceler certains profils sans jamais avoir à en rendre compte devant la justice. En réalité, X n’a pas échappé d’abord à la droitisation du débat public puis à son extrême droitisation décomplexée. D’autant plus décomplexée qu’avec la mainmise du milliardaire Elon Musk sur X, les algorithmes semblent avoir été largement rythmés à la faveur des comptes d’extrême droite, au détriment de tout ce que X comptait de propos alternatifs.
En restant sur X, nous rendrions-nous complices des agissements de Musk ?
Et l’on peut légitimement s’interroger sur la manière dont la plateforme a été utilisée pour accompagner, voire favoriser, la victoire de Donald Trump dans la course à la Maison Blanche. Dès lors notre responsabilité d’utilisateurs – nous y sommes quelques 237 millions d’abonnés à travers le monde –, est posée ? En restant sur X, nous rendrions-nous complices des agissements de Musk ?
Pour un média comme Politis, qui compte près de 70 000 abonnés, X est un réflexe, un canal de diffusion, davantage qu’une conviction. Il génère un peu plus de 10% de la fréquentation du site de l’hebdomadaire qui compte près de trois millions de connexions par mois, soit 300 000 personnes nouvelles touchées via le réseau social. Ça n’est pas rien et ça signifie que X reste une vitrine importante pour Politis. Certains nous y découvrent et finissent par s’y intéresser, parfois par s’abonner, en ayant aperçu nos publications ou en ayant identifié des journalistes de la rédaction, eux-mêmes présents sur X.
Notre souhait est (…) de quitter purement et simplement la plateforme.
Nous pourrions arguer qu’il ne faut pas déserter cet espace, même dominé par les fachos, qu’il faut mener la bataille et ne rien leur céder. Nous pourrions défendre l’idée que c’est le pluralisme qui doit s’imposer et que rester sur X s’impose. Nous pourrions nous abriter derrière ces arguments qui, même s’ils sont fondés, ont leur limite. Nous ne le faisons pas nôtres. En réalité, notre souhait est, dans les circonstances actuelles d’un média détenu par un manipulateur-complotiste-d’extrême droite, de quitter purement et simplement la plateforme.
C’est l’horizon que nous nous fixons collectivement pour Politis. Beaucoup de nos abonnés, amis, utilisateurs n’ont à ce jour pas encore fait ce choix et aucune autre plateforme ne s’est encore imposée comme véritable alternative, à la hauteur de X. C’est le cas de Bluesky que nous avons rejoint ce jour (@politis-fr.bsky.social). Nous espérons nous/vous y retrouver au complet très vite.
Depuis 2012, Politis a diffusé sur X des informations, nourri des débats, échangé avec ses utilisateurs. Nous considérons à ce titre que l’historique de ces échanges doit être préservé pour des raisons éditoriales évidentes. C’est la raison pour laquelle nous ne supprimerons pas le compte X de Politis_fr mais que nous le suspendrons progressivement à mesure que nous prendrons pleinement possession de Bluesky.
L’équipe de Politis
L’actualité vous fait parfois enrager ? Nous aussi. Ce parti pris de la rédaction délaisse la neutralité journalistique pour le vitriol. Et parfois pour l’éloge et l’espoir. C’est juste plus rare.
Chaque jour, Politis donne une voix à celles et ceux qui ne l’ont pas, pour favoriser des prises de conscience politiques et le débat d’idées, par ses enquêtes, reportages et analyses. Parce que chez Politis, on pense que l’émancipation de chacun·e et la vitalité de notre démocratie dépendent (aussi) d’une information libre et indépendante.
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