« Le Terroriste » : La Résistance italienne, et après…
Le film de 1963 de Gianfranco de Bosio avec Gian Maria Volonté ressort sur les écrans.
dans l’hebdo N° 1839 Acheter ce numéro
Le Terroriste / Gianfranco De Bosio / 1 h 34.
Le magnifique Terroriste, de Gianfranco De Bosio (1963), longtemps invisible, est de nouveau en salle en version restaurée. Dans une Sérénissime brumeuse et glaciale, le réalisateur, ancien partisan vénitien lui-même, s’attache à mettre en scène le combat antifasciste sous l’occupation nazie et le régime fantoche de la « république de Salò » de Mussolini, déchiré par les divisions entre les formations qui le composent (des conservateurs libéraux et démocrates-chrétiens aux socialistes, républicains et communistes). En décembre 1943, la victoire étant de plus en plus certaine, le représentant du Parti communiste, dans une scène prémonitoire, se dit « trop curieux de voir ce qui arrivera après ! ».
Incarné par Gian Maria Volonté, le personnage principal, l’ingénieur Brasco, est un partisan qui souhaite « un attentat chaque jour ». Il a choisi l’action directe immédiate. Refusant surtout les combinaisons politiques entre tendances, mouvements et partis, par volonté absolue d’agir contre « l’ennemi nazi-fasciste ». Contrairement aux récits officiels, la Résistance, dans cette Venise grise et froide, à la population endormie, apparaît divisée quant à l’usage de la violence armée, dans ce film qui annonce finalement les affrontements de l’après-guerre.
Tout en reproduisant des épisodes entrés dans l’histoire, comme celui des « sept martyrs » fusillés par les sbires fascistes face à la lagune, sur un quai qui porte aujourd’hui leurs noms, le film est tout entier dédié au dépassement de la période et interroge l’Italie post-fascisme.
Comme lorsque l’ingénieur, dans les bras de sa femme (Anouk Aimée), se demande, dans une rare scène intimiste : « Est-ce que, toute cette horreur terminée, dans vingt ou trente ans, nous connaîtrons une période où les gens se laisseront à nouveau endormir, anesthésier ? Une période où, pour du pain et de la soupe, la paix et l’abondance, ils seront prêts à tout perdre de nouveau, en premier lieu la liberté ? » Une semblable question tourmentait déjà, à la même époque, Pier Paolo Pasolini. Y sommes-nous, en Italie, avec Giorgia Meloni au pouvoir ?