La RTT, clé du temps libéré

Les classes dominantes ont bien compris que la lutte pour la réduction du temps de travail constitue une remise en cause du système économique qu’elles cherchent à imposer.

Dominique Plihon  • 18 décembre 2024
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La RTT, clé du temps libéré
© Jon Tyson / Unsplash

La logique du capitalisme, fondée sur l’exploitation du travail de la nature, repose sur la production de richesses économiques toujours plus importantes. Ce productivisme effréné est source d’aliénation, d’inégalités et de destruction de la planète. « La civilisation du temps libéré », selon l’expression d’André Gorz, constitue une alternative progressiste au système économique dominant. La réduction du temps de travail (RTT) est l’un des leviers principaux pour construire cette société post-productiviste qui met en son cœur le lien social et l’épanouissement personnel. Pour trois raisons principales.

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Tout d’abord, dans un monde de croissance faible, de chômage persistant et de crise budgétaire, la RTT est la politique de l’emploi la plus efficace et la moins coûteuse pour les finances publiques, par opposition aux baisses des cotisations sociales patronales sans obligations de contreparties. L’illustration en est donnée par la dynamique vertueuse du partage du travail qui s’est mise en place grâce aux 35 heures à partir de la fin des années 1990, responsable à elle seule de la création nette de 350 000 emplois sur la période 1997-2002.

La RTT a été une source de réduction des inégalités, particulièrement entre femmes et hommes.

En second lieu, la RTT a été une source de réduction des inégalités, particulièrement entre femmes et hommes. Même si cet objectif est encore loin d’être atteint, car le temps récupéré n’a pas été employé de la même manière par ceux-ci et celles-là. Le passage aux 35 heures a permis aux parents de consacrer davantage de temps à leurs jeunes enfants. Et il a encouragé un meilleur partage des responsabilités familiales en donnant aux pères le temps de s’impliquer davantage dans l’éducation des enfants et dans la vie familiale.

Enfin, et c’est un point important, la croissance à tout prix génère des coûts environnementaux qui conduisent à terme à une situation non soutenable. La construction d’une société du temps libre fondée sur la RTT est compatible avec une croissance faible et peut contribuer à lutter contre la crise écologique, principal défi de ce XXIe siècle.

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À ce sujet, les analyses proposées par Tim Jackson dans Prospérité sans croissance (1) ou par Jean Gadrey dans Adieu à la croissance (2) nous amènent à réfléchir à des politiques visant à améliorer à la fois la qualité des produits et du travail, et à accompagner une baisse de la croissance.

1

Prospérité sans croissance, Tim Jackson, De Boeck, 2009.

2

Adieu à la croissance. Bien vivre dans un monde solidaire, Jean Gadrey, Les Petits Matins, 2015.

L’aspiration profonde à une société du temps libre a été une des raisons majeures de la forte mobilisation sociale contre la réforme reculant à 64 ans l’âge de la retraite. Les classes dominantes ont bien compris que la lutte pour la RTT et la construction d’une société du temps libre constituent une remise en cause du système économique qu’elles cherchent à imposer.

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