La fin de la politique économique
Le vote du budget constitue, par définition, l’application de la politique économique dans sa dimension budgétaire. Mais aujourd’hui, la politique budgétaire est devenue un objet idéologique irrationnel, dépourvu de toute base théorique.
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La crise institutionnelle déclenchée par la dissolution montre aussi les limites de l’usage de la politique économique. Le gouvernement Barnier s’est heurté à un rejet du budget, entraînant sa démission puis l’installation du gouvernement Bayrou.
Le vote du budget constitue, par définition, l’application de la politique économique dans sa dimension budgétaire, à travers deux lois : la loi de finances (LF) pour l’État et la loi de financement de la Sécurité sociale (LFSS). Mais, aujourd’hui, la politique budgétaire est devenue un objet idéologique irrationnel, dépourvu de toute base théorique.
Pourtant, les débats au sein de la commission des Finances de l’Assemblée nationale ont été riches et argumentés, aboutissant à de nombreux amendements adoptés, avant d’être balayés par un recours au 49.3. Le Nouveau Front populaire (NFP) est attaqué par des arguments d’autorité, la responsabilité gouvernementale dans l’explosion du déficit public étant ainsi minimisée.
Aux États-Unis, qu’ils soient républicains ou démocrates, les gouvernements ont toujours maintenu un niveau élevé de dépenses.
Pourtant selon l’OFCE, le projet de loi de finances aurait eu un effet récessif de 0,8 %, sans réduire de manière significative le déficit public alors que le budget amendé par la commission des finances aurait, selon Éric Coquerel, réduit le déficit budgétaire « de 142 milliards, prévus initialement par le gouvernement, à 85 milliards (2,9 % du PIB) ».
Ce sont les présidences Macron qui ont conduit à une explosion de la dette publique française en promouvant un « keynésianisme de droite », une augmentation des dépenses publiques au service du démantèlement de l’État et de l’industrie, avec des bénéfices concentrés sur les plus riches, bien loin d’une politique libérale visant à réduire les déficits.
Les politiques dites keynésiennes, axées sur la relance par la dépense publique, ne sont ni de droite ni de gauche. Elles servent avant tout un projet politique. Aux États-Unis, qu’ils soient républicains ou démocrates, les gouvernements ont toujours maintenu un niveau élevé de dépenses. La dette publique n’est pas intrinsèquement problématique.
La Commission européenne persiste à vouloir imposer des politiques austéritaires.
Au Japon, elle atteint près de 260 % du PIB. Tout dépend de ses détenteurs qui peuvent faire pression sur l’État. Toutes les hausses d’impôts n’ont pas les mêmes effets (multiplicateurs). Taxer les plus riches n’affecte pas la consommation, et si les avantages fiscaux avaient réellement stimulé l’investissement, la désindustrialisation actuelle de la France n’aurait pas eu lieu.
Le récent rapport de Mario Draghi, ancien président de la BCE, sur l’avenir de la compétitivité européenne, souligne l’urgence d’adopter des politiques structurelles pour éviter un décrochage économique. Aujourd’hui, le PIB agrégé des économies européennes accuse un retard de 30 % par rapport à celui des États-Unis, contre 15 % en 2002, tandis que le PIB chinois continue de s’en rapprocher. Alors qu’il serait impératif d’intensifier l’investissement et donc les dépenses publiques, la Commission européenne persiste à vouloir imposer des politiques austéritaires.
Chaque semaine, nous donnons la parole à des économistes hétérodoxes dont nous partageons les constats… et les combats. Parce que, croyez-le ou non, d’autres politiques économiques sont possibles.
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