Ce qu’attaquer les femmes trans signifie

Mimi Aum Neko, coprésidente de l’association Acceptess-T, lance un cri d’alarme sur la montée des violences et attaques transphobes, auxquelles participent les institutions, comme la Cour suprême britannique avec sa récente décision  sur la définition légale de « femme ».

Mimi Aum Neko  • 22 avril 2025
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Ce qu’attaquer les femmes trans signifie
Des manifestants se dirigent vers Parliament Square en faveur des « droits des trans » à Londres le 19 avril 2025, en réponse à l'arrêt de la Cour suprême sur la définition de la « femme ».
© BENJAMIN CREMEL / AFP

Depuis un bon moment, la communauté trans alerte sans relâche le public sur la montée des violences transphobes comme une des conséquences de la fascisation de la société. Nous avons appris le 4 avril l’assassinat brutal d’une femme trans colombienne, Sara Millerey, dont le corps a ensuite été jeté dans une rivière. La flamme de colère n’était pas encore apaisée que nous avons appris deux semaines plus tard une nouvelle attaque à l’encontre de la communauté trans.

La décision de la Cour suprême britannique facilite officiellement les agressions contre les femmes trans.

La Cour suprême britannique a tranché sur la définition de la femme, qui repose sur le sexe biologique et non le genre. Plus précisément, ce sont les femmes trans qui sont visées. Désormais, elles sont criminalisées et exclues des protections et des espaces dédiés aux femmes. Elles seront fouillées par les policiers masculins, mises en détention et hospitalisées dans l’espace réservé aux hommes. Cette décision facilite officiellement les agressions contre les femmes trans, très souvent victimes de violences misogynes commises par les hommes.

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Les masculinistes et leurs complices, des pseudo-féministes, se sont tendu la main. L’extrême droite soutient et finance les campagnes mondiales contre les droits des personnes trans en les définissant comme étant la source de problèmes pour la sécurité des femmes et de la société. Comme dans leurs campagnes racistes, où les mêmes accusent les racisé·es de racisme anti-Blancs, ils utilisent la stratégie de l’inversion des rôles en désignant les dominant·es comme les victimes et les opprimé·es comme agresseur·es. L’extrême droite se victimise et utilise ce prétexte pour justifier les violences systématiques à l’encontre de nous tous.tes. Ils détournent le regard du public de le racine des problèmes comme les inégalités de classe, le patriarcat et le racisme.

Ce n’est ni la biologie ni la science qui fabrique la définition de la « femme », mais le patriarcat et le colonialisme !

L’attaque transphobe menée par les institutions n’est en effet pas un débat sur la biologie ou la science, mais une volonté politique enracinée profondément dans la misogynie et le racisme. D’abord, misogynie car cette politique de la criminalisation des femmes trans est surtout fondée sur l’idée qui réduit les femmes en organe sexuel ou en machine reproductrice. Elle renforce la division genrée du travail, un mécanisme qui reproduit les inégalités patriarcales et qui bénéficie en bonne partie de l’essentialisation des corps des femmes.

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Ensuite, racisme car c’est le colonialisme occidental qui efface par la force la diversité de genres dans les sociétés précoloniales et qui impose constamment la binarité comme une vérité absolue. Ce n’est ni la biologie ni la science qui fabrique la définition de la « femme », mais le patriarcat et le colonialisme !

Les femmes trans ou cis sont en réalité constituées comme la classe des opprimé·es. Nous sommes précarisées, discriminées, exclues, violentées et assassinées, car femmes et trans. Exclure les femmes trans de la classe des femmes revient à les invisibiliser et se faire complice des violences qu’elles subissent. Il nous faut encore rappeler que l’espérance de vie des femmes trans est de moins de 35 ans. Doit-on attendre encore combien de temps et combien de morts pour dire que la transphobie tue ? Ça suffit.

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